Where no eagles fly
Vertigo m'a intrigué par son concept de base qui, il faut bien le dire, est absolument génial : aborder l'angoisse d'une employée dans une entreprise de l'ultra-capitaliste Corée du Sud, au...
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le 7 juil. 2021
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En coréen, 버티고 (vertigo / vertige) aurait deux significations :
[nom commun] : vertiges, sensation de rotation.
[verbe] : résister et endurer un travail, une pression externe.
Seo-young (Chun Woo-hee) travaille dans les bureaux d'une entreprise située dans un gratte-ciel, une situation commune à Séoul ou en tout cas dans les œuvres coréennes (petit ordre de comparaison : 157 grattes-ciels de plus de 100m à Séoul contre 27 à Paris). Ce qui est intéressant ici avec Vertigo, c'est que pour la première fois je retrouve une utilisation de ce contexte pour dépeindre l'angoisse et l'insécurité à travailler dans ce type de structure en open-space du haut d'un quarantième étage à ciel ouvert. J'y avais jamais pensé.
Seo-young, que l'on voit dans une relation intime avec son supérieur hiérarchique dès les premières secondes du film, vit de plus en plus mal cette situation entre étourdissements, acouphènes et vertiges. Une situation allant en s'empirant partiellement provoquée par sa relation et situation professionnelle mais aussi par sa solitude puisqu'elle s'est désunie de sa famille pour s'installer seule à Séoul pour cet emploi. De notre côté, on peut même y voir un lien involontaire et pourtant d'actualité depuis le Covid-19 avec la remise en cause de l'existence des open spaces.
Le film ne manque pas d'aborder habilement ce que l'on voit plus régulièrement dans des films ou dramas pour décrire l'environnement nuisible de travail. C'est à dire le pouvoir et la domination exercée par les supérieurs hiérarchiques, le sexisme et donc de facto l'emprise délétère que ça a sur des salariés en contrat précaire comme Seo-young.
Si cela s'arrêtait là je vous dirais déjà que Vertigo est un excellent film indépendant pour traiter de ces sujets sociétaux, mais comme d'autres avant ou après lui (Kim Ji-Young, Born 1982 pour citer l'un de mes préférés).
Vertigo ne se contente pas de ça. Il y appose une réalisation et une photographie que j'ai trouvé époustouflante et si importante pour nous faire ressentir l'atmosphère anxiogène de son milieu de travail à travers entre autres les étourdissements, vertiges et/ou problèmes auditifs de Seo-young. Cela fonctionne impeccablement notamment avec quelques grandes scènes en caméra subjective ou corporelle (voir ici le clip). C'est accompagné d'une bande-sonore somptueuse (extraits de l'OST sur Bugs!) mais également primordiale pour ressentir au mieux les bruits parasites ou silences assourdissants. Puis forcément, on a le jeu d'actrice d'une Chon Woo-Hee (A cappella) à nouveau sensationnelle par ses expressions qui même silencieuses nous transmettent tant. Et qui donc continuent de me bouleverser, entre frissons et larmes.
Vertigo réserve bien d'autres surprises puisque je n'aborde même pas un personnage principal ô combien important. J'ai partiellement / à peine vu une bande-annonce et me suis directement plongé dans le film tant le scénario m'avait de toute façon déjà trop convaincu. Pour les avoir regardées ensuite, et comme je le suggère souvent, c'est mieux d'éviter. Les BA prennent pêle-mêle mes passages préférés (à retrouver aussi sur mon twitter) et même parmi les dernières images du film, c'est dommage de se les spoiler. On ne reprochera pas aux BA de ne pas savoir nous transmettre l'envie avec autant d'indices sur l'histoire !
Très belle présentation à lire sur Fantasia Festival, où j'ai découvert l'existence de ce film.
Mise à Jour: Les sous-titres français proposés par moi-même sont sur Subscene.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Top 10 Films et Les meilleurs films coréens
Créée
le 6 oct. 2020
Critique lue 912 fois
8 j'aime
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