Vexille
5.8
Vexille

Long-métrage d'animation de Fumihiko Sori (2007)

Critique publiée par moi même sous le pseudo Mugen le 3 mai 2008 sur le site animeFR (http://www.animefr.com/)

Attention spoiler !!!


Vexille – 2077 Nihon Sakoku aka Vexille tout court pour l'international est un film d'animation japonaise réalisé par Fumihiko Sori (réalisateur du film live de Ping Pong et producteur d'Appleseed) en 2007. La musique est composée par Paul Oakenfold, mélangeant rock et électro pour un obtenir une ambiance des plus vivante. Sori a regroupé autour de lui l'éditeur Shogakukan, la société Shochiku qui se charge de la diffusion d'œuvres cinématographiques et Customer Concierge Rights Engine (CCRE) pour les droits d'auteurs.

Le réalisateur a su s'entourer d'une bonne équipe pour une grosse production. Ce nouveau film est réalisé en CG (Computer Graphics). Cette technique est appelée plus communément image de synthèse. Au vue du staff il est visible qu'à l'instar d'Appleseed, Vexille utilise une technologie qui a déjà fait ses preuves et des thématiques récurrentes dans les films de japanimation de ces dernières années. Cependant est-ce suffisant pour en faire un film qui transcende son modèle ?

Sori a, avant de se lancer dans la japanimation, eu un parcours hors du commun ainsi il a fait parti de l'équipe responsable des effets spéciaux de Titanic de James Cameron (pour lequel il obtient l'Oscar des meilleurs effets spéciaux en 97). Il a ensuite travaillé à la société TBS (Tokyo Broadcasting System qui est un géant de la télévision japonaise) et produit Appleseed par la suite. Quant à la musique elle est composée des mix de Paul Oakenfold, des excellents Boom Boom Satellites déjà entendu sur Appleseed mais aussi The Prodigy, Asian Dub Foundation ou encore Dead Can Dance. Ainsi l'original soundtrack est résolument électro et le thème musical est composé par l'artiste mink.

Au vue du staff, il est clair que le but de ce film a été de faire une démonstration de la puissance technologique du CG mais hélas au dépend du scénario (comme souvent !). Dès le début du film, le rythme est donné par dix minutes d'action maîtrisées par un parfait timing dans les combats et une fluidité dans les mouvements qui égale le réalisme d'Appleseed. Au fur et à mesure que va se dérouler le film, on va avoir le droit à des scènes d'actions toutes plus sublimes les unes que les autres mais hélas sans aucune grande originalité car se cantonnant à de simple affrontements assez téléphoné dans des lieux assez communs.

Autre point fort du film les décors qui sont parfaitement modélisés, ici le réalisateur alterne des backgrounds qui fourmillent de détails comme ceux de Tokyo dans le passé ou des États-Unis. En même temps, il contraste avec les plans du Japon et du Tokyo du présent qui sont que très peu détaillés laissant ainsi une part plus importante à l'imagination du spectateur. À noter cependant que les mouvements de personnages ne sont pas toujours naturels et fluides comme lorsque Maria fume ou que Vexille mange avec Takashi. Ces défauts donnent l'impression que le réalisateur a bâclé la modélisation des personnages pour une meilleure qualité des scènes d'actions et des décors. De plus on y retrouve les mêmes effets de couleurs et d'ombres que dans Appleseed, et les expressions du visage des personnages laissent toujours à désirer, donnant l'impression de voir des poupées de cires.

Vexille, à la manière de Wonderful Days, ne s'attarde pas sur la narration pour aller plus loin dans la mise en scène et la recherche de la beauté de l'image. Dès le moment où l'on comprend que le but du film est d'atteindre le paroxysme de la beauté graphique alors on a une vision différente mais qui ne gomme pas pour autant ses défauts à l'inverse d'Appleseed. Parlons maintenant un peu du scénario qui laisse un avis mitigé car de qualité inégale.

D'abord le scénario de base est totalement dans la mouvance actuelle avec un futur cyberpunk dans un univers post-apocalyptique. Rien de bien original jusque là, pourtant Sori arrive à sortir des sentiers battus en ne décrivant pas une société utopique mais une société jusqu'au-boutiste et inconsciente. Le seul souci de Tokyo est la productivité au dépend de sa population qui leur sert de cobayes. Mais hélas le film reste très vague et ne détaille pas spécialement ce point, laissant encore une fois travailler l'imagination du spectateur. Le gros point fort du film est le fait que le Japon soit présenté comme le méchant de l'histoire. Cela donne un point de vue intéressant car le film nous présente le Japon vu de l'extérieur par les yeux des autres pays alors que dans la plupart des autres films, le scénario ne prend généralement jamais en compte d'autres pays. L'introduction du début du film avec la voix off établit tout de suite un univers géopolitique avec des tensions habituelles dans les relations diplomatiques. Ainsi on a plutôt affaire à un film d'anticipation qui essaye d'être réaliste mais au final le pari est perdu car il est difficile de croire un seul instant à une domination du monde par les machines japonaises alors qu'on ne sait pas vraiment d'où elles viennent.

La chute finale est assez ridicule, le propos est que la population de Tokyo s'attache encore à son fragment d'humanité pourtant elle n'hésite pas à trahir les rebelles qui vont tenter de détruire les machines. La population a un comportement irrationnel. Néanmoins, l'idée d'un Tokyo ravagé et d'une population anéantie à 90% était une bonne idée mais le réalisateur n'a pas encore une fois développé ce point-ci montrant juste des gens qui veulent survivre sans essayer d'étudier la psychologie d'une population victime d'un génocide.

Ensuite, pour ce qui est des personnages, on a encore une influence provenant d'Appleseed avec en héroïne Vexille (dans Appleseed l'héroïne est Deunan), là aussi les personnages sont peu fouillés avec des comportements totalement téléphonés et basique sauf pour Vexille qui sort du lot grâce à ses actions héroïques qui va aider les rebelles... Les dialogues se tiennent sans trop tomber dans les stéréotypes ou dans le ridicule, ils restent d'une qualité à peu près potable sauf la scène d'anthologie où le militaire est au téléphone avec le président des États-Unis, on se croirait dans une mauvaise série américaine !!! Quant au message et à la réflexion du film, c'est la que le gros point faible apparaît c'est encore une fois superficiel bien plus que dans Appleseed qui était cohérent, ici nous avons le droit à une pseudo réflexion sur l'immortalité, thème très commun dans l'ensemble. Il aborde aussi un thème cher à la science fiction présent à travers les androïdes : à quel moment perd-on notre humanité ? Quelle est la frontière entre un humain et une machine ? Nos actions ou notre aspect fait-il de nous un humain ? Les scénaristes enfoncent un peu des portes ouvertes...

Vexille est un produit bien fade qui prouve bien que seul l'aspect et la technique ne suffisent pas à faire un bon film. Cependant, Sori avait de bonnes idées qui auraient pu être exploitées pour donner naissance à une œuvre sûrement équivalente à un Ghost in the Shell. Il a juste été à coté de la plaque sur ce projet.
CREAM
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le 15 juil. 2011

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