(Attention ! Cette critique / analyse, contiendra des spoils, alors, je ne vous conseille pas de la lire si vous n'avez pas vu le film ! )
https://youtu.be/J5XtZPs2QfE
Bienvenu spectateur des cristaux liquides, vous allez être accueilli à Videodrome, un film de David Cronenberg sorti en 1983 avec James Woods dans le rôle principal.
Le film vous placera dans le quotidien de Max Renn, un patron de la chaîne 83, diffusant des programmes violents et pornographiques, mais il souhaite aller encore plus loin, trouvant ses programmes trop doux.
Il découvrira alors ; Vidéodrome !
Mais qu'est que Vidéodrome ?
Videodrome est un programme proposant du Snuff a l'état pur, découvert par un ami hackeur, Harlan.
Après coup, il fera part à une émission sur le sexe et la violence où il rencontrera le professeur Brian O'Blivion (qui veut dire Brian oubli) et Nicky joué par Déborah Harry du groupe Blondie à travers une télévision.
Max invitera Nicky après que le courant soit très vite passé avant de lui faire découvrir Videodrome pour que la jeune femme soit intrigué par ses élans sadomasochistes.
Sauf que pendant qu'ils font l'amour, Max commence à avoir une hallucination le plongeant dans Videodrome …
Videodrome est un film abordant de nombreuses problématiques avec l'aide de multiples genres : en particulier le Body Horror et le cyberpunk tout en restant suffisamment flou pour laisser place à différentes interprétations.
Le film parle aussi bien du rapport entre le virtuel et le réel (que j'ai beaucoup abordé dans mes critiques sur Satoshi Kon), l'emprisonnement face aux médias, la manipulation des masses, la religion, le futur de l'évolution de l'être humain, transhumanisme, etc.
Il s'immisce en plein changement dans le mode de consommation, car les gens désertaient les salles de cinéma pour se diriger vers la télévision à regarder des programmes similaires provoquant une uniformisation des masses, alors que les médias colonisent nos espaces privés qui donnera lieu aux émissions de télé-réalité menant David Cronenberg à se pencher pour un film d'anticipation.
C'est pourquoi la première scène du film est une scène où on voit une pub avec le " Civic TV, celle que vous emmenez dans votre lit." participant à nous éloigner du réel , phénomène s'étant accru avec les réseaux sociaux qui ne laissent aucune frontière entre réel et virtuel.
Le professeur O'Blivion dans le film prédit avec ses phrases énigmatiques, ce qui se passe de nos jours, où nos pseudonymes internet, nous créant une nouvelle chair qui prend le pas sur l'ancienne.
Cette nouvelle chaire sera un moyen d'ego trip déformant la réalité pour une plus avantageuse pour nous.
L'idée que la vision de la télévision est plus importante que la réalité en présentant des personnages tout d'abord par des écrans de télévision.
Le virtuel en devient si puissant qu'il nous arrive de reproduire les comportements de celle-ci par la publicité ayant toujours recours à la psychosociologie, behaviorisme ou les théories de Pavlov (qui ont l'idée que le consommateur est un être passif et soumis au conditionnement, qui donneront naissance à des œuvres comme Fight Club) pour manipuler plus facilement les masses.
C'est dans cette optique, qu'il est important de parler de Marshall McLuhan, l'enseignant de Cronenberg qui lui a influencé le docteur O'Blivion, Mcluhan est connu pour avoir prononcé la phrase : " le médium, c'est le message ", en travaillant sur l'impact sur notre inconscient de l'utilisation de l'aspect sensorielle des technologies dont les théories ont été détournées pour que Cronenberg dénonce ce détournement.
La religion est un autre thème important de Vidéodrome, en effet, là où les crucifies ornaient les maisons avec une importance capitale. La télévision prend en quelque sorte ce rôle pour nous fournir une œuvre proche de " Consumer Jesus " de Banksy, où le profane fait du temple, sa propre maison, en rendant le sacré serviteur et où le sacrifice de Jésus se transforme en ersatz de don par les cadeaux sur ces bras.
Dans le film, la mission du tube cathodique joue le rôle de refuge religieux à la place de l'épaule d'un homme d'église, on a des gens venant prendre leur dose de télévision afin de se rattacher à la table de mixage du monde comme un dieu qu'il faudrait prier chaque jour.
Max y incarne un christ contemporain où il meurt en martyr pour revenir à la vie en tant que nouvelle chaire, fusion de l'ancienne chaire et du média. Il voit à la toute fin Nicky lui annoncer qu'il y a une sorte de vie après la mort, un paradis dans la télévision !
L'aspect cyberpunk du film peut être vite détaillé en se basant sur une phrase de Bruce Sterling, un des grands auteurs du mouvement cyberpunk : « le courant cyberpunk provient d'un univers où le dingue d'informatique et le rocker se rejoignent, d'un bouillon de culture où les tortillements des chaînes génétiques s'imbriquent. »
Avec cela, on peut également dire, que Videodrome est très similaire à Matrix des Wachowski dans le sens où Max serait Neo, avec les hallucinations de la télé en tant que la matrice, qui le placerait en tant qu'élu, élu pourchassé par la multinationale dans Videodrome et par l'agent Smith dans Matrix. La fille du professeur O'blivion serait Morpheus.
Sauf que dans Videodrome, Max fusionne directement avec la technologie en se débarrassent de sa chair. Neo quant à lui, se fait utiliser comme source d'énergie inspirée des théories de Jean Baudrillard qui a été influencé par Mcluhan.
Au niveau des acteurs, après Il était une fois en Amérique, James Woods montre encore à quel point il est un grand acteur par un jeu en subtilité qui se montre plus expressif lors des moments les plus symboliques.
Déborah Harry fournit également une performance de haute volée, un lien se crée directement à l'écran avec James Woods, qui élève le film dans son premier acte.
La réalisation de Cronenberg regorge d'intentions de réalisation qui servent le fond, le découpage est impeccable, je n'ai pas grand chose à dire à part que c'est excellent !
La BO est composée par Howard Shore, compositeur reconnu pour son travail sur les trilogies le Seigneur des Anneaux et le Hobbit, qui cette fois-ci compose des morceaux très expérimentaux aux sonorités industrielles qui a, à coup sûr influencé Reiichi Nakaido pour Serial Experiments Lain.
Pour conclure, longue vie à la nouvelle chair ! Découvrez Videodrome et suivez moi donc spectateur des cristaux liquides pour un voyage … particulier …
Merci de m'avoir lu et si vous voulez en savoir plus sur le Body Horror que je n'ai pas trop abordé, je ne peux que vous conseiller le 7e Stendhal Syndrome dédié au Body Horror d'Alt 236 si vous souhaitez vous renseigner sur ce sujet.