Come on, come to me now...
Vidéodrome : le titre du film prépare déjà le spectateur à un visuel fort, et il tient ses promesses. Cronenberg, d'abord derrière sa plume, puis à la réalisation, nous plonge dans un univers à la fois sombre et sensuel, ou la sophistication de la mise en scène se mêle à la vulgarité de l'intrigue. Max Renn est le directeur d'une petite chaine locale qui n'a de « civique » que son nom puisqu'elle diffuse de la pornographie et des programmes chocs, que le héros se plait à regarder à longueur de journée. Mais un jour, alors que Max est en quête de nouveaux programmes beaucoup moins soft, il tombe par hasard sur une vidéo pirate mettant en scène de jeunes victimes torturées par leurs bourreaux, tout de cuir vêtus : Vidéodrome. En la compagnie de Nicki, une jeune animatrice radio rencontré sur un plateau télé, il va développer un comportement addictif envers ce programme très réaliste, qui va lui provoquer des hallucinations de plus en plus fortes. Max va alors tenter de remonter à la source de cette chaine pirate, derrière laquelle semble se cacher le professeur O'blivion, un personnage énigmatique qui n'apparait que par le biais d'un écran télé.
Avec un casting encore assez méconnu au cinéma composé d'un acteur de téléfilm, James Woods aka Max, et d'une chanteuse pop, la belle Deborah Harry, leader du groupe Blondie, dans le rôle de Nicki, le réalisateur se positionne comme l'auteur de l'horreur avec un grand H grâce à ce film dont la beauté dérange. Après Scanners, Cronenberg affirme son penchant pour l'esthétique des corps mutilés et le croisement entre l'homme et la technologie, le tout arrosé d'une atmosphère à perturber les âmes insensibles. Des machines organiques prennent vie tout au long du film grâce à des maquillages et effets spéciaux hallucinants pour l'époque, sous la direction de Rick Baker. Si vous ne voyez pas de qui je parle, c'est également à ce cher monsieur que l'on doit la plus belle scène de transformation bestiale au cinéma, celle du Loup Garou de Londres en 1981 (bien que sa carrière ne se résume pas à cela!).
Alors que le réseau télévisuel s'élargit de façon significative aux États-Unis dans les années 70, Cronenberg pose la question de la violence dans les médias, mais aussi de la fiction, toujours plus véridique et plus proche de la réalité. Alors que Vidéodrome sort sur les écrans, on ne parle encore à l'époque que de la claque Star Wars, un terme qui sera repris par Reagan pour désigner le programme de défense anti-missile. Hallucination de masse ou extrapolation de la fiction ? Sommes nous la nouvelle chaire, des enregistreurs sur pattes, désensibilisés par les images violentes que nous emmagasinons ? Comme le disait Raymond Depardon : « Le réel possède un avantage considérable sur la fiction, c’est d’être unique ».
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