Deux comédiens connus et non dépourvus de talent. L'un d'eux est devenu ce qu'il est convenu d'appeler une gueule, le second a un jeu plus fluide et semble moins ombrageux que le premier. La paire pourrait faire le bonheur d'un bon dialoguiste, mais aujourd'hui ce dernier se contente de quelques mots plus ou moins bons et de beaucoup de sous-entendus comme s'il avait peur que les propos tenus soient rapportés au juge d'instruction. Le juge Madec/Laurent Stocker incarne, contrairement à son collègue du parquet, l'intransigeance la plus totale. Un des scénaristes lui a sans doute demandé de nous faire très peur mais il semble bien qu'il n'ait pas réussi vraiment, pas plus qu'il ne semble avoir terrorisé Patrick Bruel. Les autres personnages du film restent de pâles comparses appelés à jouer les faire-valoir des premiers sans réussir toutefois à rendre l'histoire racontée plus intelligible, ni à la rapprocher d'un thriller digne de ce nom.
Nous apprenons ainsi qu'un procureur de la République en fin de carrière peut être très préoccupé de la sinécure qu'on pourrait lui offrir pour que sa retraite soit plus confortable. Nous découvrons également qu'il faut toujours se méfier des femmes qui ne sont jamais vraiment contentes de leur sort et, pour certaines d'entre elles, même capables d'exercer un odieux chantage surtout si on leur dit trop de choses. Nous nous voyons également confirmer qu'il est agréable d'avoir beaucoup d'argent pour s'offrir un loufiat à domicile pour nous servir du vin et nous offrir à l'occasion la possibilité de passer nos nerfs sur quelqu'un. L'argent permet beaucoup de choses, comme se payer un voilier élégant avec son skipper à disposition à toute heure, un hélicoptère pour aller et venir et un jet privé pour traiter ses affaires à travers le vaste monde.
Sur la Riviera, le ciel est bleu, la mer ne l'est pas moins et le soleil brille. La cravate est absente et les vestes sont dépareillées, les tenues sont décontractées et le pantalon de Maître Germon/ Niels Arestrup bouchonne un peu et semble détonner dans le cadre. Aux plis de froissage dans le dos, nous devinons cependant très vite qu'il s'habille avec le meilleur lin. Tout est dans la suggestion et dans les petites touches.
Il va maintenant falloir que je m'y résolve. Le film a également une histoire. Suffisamment grave pour déclencher une perquisition à domicile à l'aube et pour envoyer Gilles Fontaine/ Patrick Bruel en détention provisoire pendant une semaine. Une vague histoire de pot-de-vin et de villa rachetée de manière plus ou moins frauduleuse semble-t-il, sur fond de financement peut-être pas totalement légal de campagnes électorales d'une notabilité locale. Rien que de banal sur une Riviera où l'argent coule à flot et crée toutes les fluidités nécessaires dans des relations humaines conviviales.
Avec le bleu du ciel et de la mer, la caresse du vent sur une voile blanche déployée et de la peau bronzée ou en tout cas délicatement halée, de la belle pierre et du pince-fesses de temps à autre pour égayer la vie et faciliter les affaires, nous ne sommes pas dépaysés, nous sommes bien sur la Riviera française. Quelques oligarques russes auraient pu apporter une touche inquiétante et exotique, que n'y a-t-on pas pensé ?
Afin que nous ne nous laissions pas aller à la douce torpeur des lieux, un petit rebondissement est toutefois prévu entre les rafraîchissements. Oh , pas grand chose, même pas une histoire en tiroir, tout juste de quoi nous faire comprendre que le scénariste ne s'était pas endormi sur les bords de la piscine, qu'il veillait bien au grain et était aux petits soins pour nous.
Ils étaient trois d'ailleurs : Bernard Stora, Pascale Robert-Diard et Sonia Moyersoen. Trois scénaristes pour créer un guide touristique sur la Côte d'Azur et ses larges possibilités de douceur de vivre tout en nous mettant en garde contre une Justice qui rôde. Ils nous invitent également à la plus grande prudence : ne jamais dire de mal des gens riches, quand on ne sait pas ce qui peut nous arriver un jour. La fortune frappe parfois à l'improviste, au moment où l'on s'y attend le moins.