Comme on se sent bien chez Claude Sautet, qu’on les aime tous ces personnages si humains, si fragiles et proches de nous. On se sent en famille dans ces films, entre amis de trente ans. Claude Sautet avait le don de voir ce qu’il y a de profondément touchant en chacun de nous, ces failles toujours prêtent à devenir crevasses et en même temps cette force lorsqu’on est avec ceux qu’on aime vraiment, sans calcul et malgré les différences apportées par le temps.

Vincent, François, Paul et les autres est un film de potes, un des meilleurs à voir et sans doute un des plus aboutis. Il nous raconte les chroniques d’une amitié entre des hommes qu’on imagine l’être depuis des décennies. Le temps passe et leur fait prendre des routes parfois opposées, mais ce qui les uni au fond semble ne jamais vouloir disparaître. Même s’ils ont parfois de vrais coups de gueules, de gros problèmes de couples, leurs sentiments tiennent bon.

On sent de la mélancolie, des personnages parfois désabusés qui, alors qu’ils devraient se faire confiance et se confier, gardent pour eux leurs problèmes, par pudeur ou par peur du jugement. Sautet savait suggérer avec talent, les sentiments ne s’exposent ni ne s’étalent chez lui, tout est dit du bout des lèvres, amené avec finesse et intelligence. La finesse et l’intelligence de son casting, car comment ne pas se prendre à rêver lorsqu’on voit côte à côte Yves Montand, Michel Piccoli, Serge Regianni, Gérard Depardieu ou encore la sublime Stéphane Audran ? C’est de l’alchimie, cet art de trouver les bons ingrédients pour transformer tout scénario en film en or.

Yves Montand parvient miraculeusement à se détacher de cette merveilleuse distribution, lui qui n’a pas été assez reconnu de son vivant explose ici de fragilité malgré toute la confiance en lui que son personnage affiche. Une façade que tous ses amis prennent pour de la force, il est le chef d’entreprise endetté, pris à la gorge et qui ne se remet pas du départ de sa femme. Il l’aime toujours, elle l’aime toujours, mais le court de l’existence le leur interdit. L’acteur est d’une justesse dont il était seul capable, affichant une cuirasse de bonne humeur, de sourires ravageurs mais d’un simple regard fuyant, cette cuirasse s’effondre et Montand parvient à vous tirer les larmes, révélant un homme profondément touchant et humain.

Ce film est beau, le plus simplement possible, il apporte de la douceur à un monde qui n’en a plus rien à faire. Sautet semble faire une confiance aveugle à l’amitié, sentiment qui serait le seul véritablement stable, beaucoup plus que l’amour. La dernière image est parlante, les quatre amis toujours ensemble malgré tout, alors que leurs vies sentimentales ne sont pas des plus simples. Il y a un côté vraiment rassurant dans ce film, savoir que même si l’on connaît des moments d’extrême solitude, ceux-ci ne sont jamais définitifs.

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le 15 sept. 2013

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Jambalaya

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