Un Scandale

1960. Après plus de 25 années passées en exil au Mexique, Luis Buñuel revient en Espagne, sa terre natale, pour y réaliser Viridiana. Ce qui aurait dû être un retour triomphal de l'enfant du pays va pourtant très vite se transformer en un gigantesque scandale...

En terre franquiste

Buñuel sait qu'en posant les pieds en Espagne, il marche sur un terrain miné. Le dictateur Franco gouverne et la censure sur le cinéma est forte. Cela n'empêche toutefois pas le réalisateur de mettre en scène un film aux sujets « chocs ». En effet, dès l'ouverture, il nous présente un vieux bourgeois, aux apparences convenables, voulant abuser de sa jeune nièce qui s'apprête à devenir nonne. Pur délire sadien et attaque en règle de la bourgeoisie et du clergé, le film va par la suite critiquer le prolétariat en montrant des mendiants se comporter comme des bêtes sauvages dans la propriété de l'oncle.

De toute sa carrière, on a rarement vu Buñuel aussi virulent, celui-ci n'épargnant aucune frange de la société espagnole. Il va même jusqu'à suggérer que ces différentes classes sociales sont toutes les mêmes, c'est-à-dire des monstres guidés par leurs instincts primaires.

Chronique d'un scandale

Dès que son montage est terminé, Viridiana est immédiatement envoyé au festival de Cannes et à la surprise générale, il remporte la Palme d'Or.

C'est alors que le gouvernement espagnol, qui se tenait plutôt tranquille jusque là, se rend compte avec effarement du contenu du film. Il en interdit immédiatement la diffusion sur son territoire et met en retraite anticipée son directeur de la cinématographie qui avait été cherché la récompense à Cannes . Même son de cloche en Italie où le Vatican, choqué par le film, met la pression pour interdire celui-ci dans le pays. Un tribunal de Milan va même jusqu'à condamner Buñuel à 1 an de prison si ce dernier venait à poser un pied sur le sol italien.

Le scandale est donc immense et le réalisateur se voit contraint de quitter à la hâte l'Espagne et de retourner se réfugier au Mexique, où la population l'accueille comme un héros, celle-ci étant profondément anti-franquiste.

L'exil de Buñuel au Mexique ne durera toutefois pas longtemps vu qu'il trouvera bientôt un nouveau pays d'adoption pour continuer à réaliser des films, à savoir la France. Quant à Franco, étonné des proportions qu'a pris cette affaire, il décidera finalement de voir le film et déclarera par la suite qu'il n'avait pas vu grand chose de choquant dans tout cela et qu'ils se demandait bien pourquoi un tel remue-ménage avait été fait.