Andrey Iskanov est le gars qui s'est tapé une réputation presque planétaire avec ce qui fut considéré un temps comme le film le plus violent de l'histoire. Pour les hérétiques qui ne le connaissent pas, on parle bien de "Philosophy Of A Knife" qui était un docu-fiction sur le terrifiant Camp 731. Parce que oui, durant la seconde Guerre Mondiale, il n'y eut pas que les camps nazis mais vu que l'éducation nationale est une daube absolue, tout le monde ne le sait probablement pas. Au delà de ça, le gaillard ne s'est pas limité à cela. Il y eut Nails et Visions Of Suffering que je me dis qu'il était temps de sortir de sa couche de poussière surtout que c'était Halloween. Moi qui m'ai toujours dit de commencer par Nails pour explorer Iskanov, je ne me suis pas écouté et c'était sans doute une mauvaise idée.
"Visions Of Suffering" c'est le film que l'on va encenser ou détester. Il n'y a pas de demi-mesure possible. Et comme jusqu'à présent, il n'y avait qu'une critique dithyrambique sur le site, il en fallait bien une pour contraster. Je me suis posé la question au cours de la séance de savoir si j'avais un problème avec le cinéma expérimental. De mémoire, je l'adore justement au vu des trucs bien secoués que j'ai louangé comme Tetsuo (un de mes films favoris au passage), La Clepsydre, Une Page Folle, Meshes of Afternoon et les machins stratosphériques et inidentifiables du collectif ICPCE. Donc pas de souci à ce niveau là de fermeture d'esprit ! Je me suis dès lors justement rendu compte que l'expérimental n'est pas automatiquement gage de qualité à mes yeux et qu'il fallait bien que je tombe un jour sur un truc qui me fit perdre mon temps. Peut-être que le style de Iskanov ne me parle pas, ce qui est tout à fait possible.
Toutefois, il y a malgré tout plusieurs problèmes et pas des moindres. Si le début n'était ni plus ni moins qu'emblématique avec ce cauchemar éveillé en sépia, jamais on ne retrouvera ces moments de fulgurance. Cette horreur qui se retrouve sur l'affiche du film ne sera vue que là et à de minces reprises durant deux ou trois passages. Moi qui n'ai jamais osé le voir dans ma tendre jeunesse à cause de cette pochette, je me rends compte que finalement, "Visions of Suffering" était tout sauf flippant. Une sorte de trip cauchemardesque et paranoïaque qui finit par devenir sans queue ni tête. Le personnage est entraîné dans un tourbillon d'instants glauques où gore, drogue, violences sexuelles et nécrophilie sont aux abonnés présents. Mais revenons aux problèmes dont je parlais. Juste, c'était vraiment nécessaire cette durée de 2h06 ???
Parce que les passages que j'ai trouvé sans intérêt peuvent se compter sur les doigts de toute ma famille réunie. Encore 1h30, j'aurais accepté mais là really ? Donc durée abusive en numéro 1 des reproches. L'autre point majeur est que Iskanov ne sait pas faire preuve de pondération. Parlons en du stroboscope. En soirée techno, c'est un classico que j'adore, le tout bien lancé avec une 15ème bière (si je n'ai pas tapé before avec mes chers partenaires). La différence est qu'il se prête à l'ambiance et qu'on ne se le mange pas 7-8 min non-stop. En l'occurrence, ici c'est tout le contraire. Donc soit en Russie, on aime se taper ça toute une soirée et finir chez l'ophtalmo le lendemain la rétine cramée. Soit c'est exagéré. Et m'est l'avis que c'est ce deuxième cas de figure qui prédomine. Arrive un moment où l'on en a marre et l'on va regarder ailleurs car c'est très désagréable sur une longue durée. Ceci implique que l'on manque des passages car ça pique les yeux.
En ce qui concerne le reste, on en vient par ne plus rien comprendre. Si le film avait duré entre 20 à 1h30, ça serait passé. Deux heures, ça devient barbant. Notez que je ne suis pas hostile au concept mais que c'est juste abusif pour ce que le réalisateur a à nous dire. Néanmoins, le concept aura ses limites car même avec toute la bonne volonté du monde, je n'ai pas pu m'empêcher de trouver les CGI visuellement atroces (moins que les stroboscopes hourra !). Alors oui c'est amateur, c'est série Z patati patata. Je le conçois mais l'indulgence a ses limites. Même Naqoyqatsi est plus évolué et Dieu sait qu'il savait être repoussant à plusieurs moments. Au passage, Iskanov m'aura fait relativiser sur Mommy dont je trouvais l'image rikiki. "Visions of Suffering" est un cran au-dessus dans le minuscule.
Quoi qu'il en soit, je ne me fais pas de doute sur le fait que ce (trop) long-métrage en fera triper plus d'un devant. Ce n'est juste pas passé chez moi à mon grand dam car je plaçais beaucoup d'espoir dedans, surtout à l'aune d'une première séquence génialissime.