A l'origine était le roman américain de Ken Kesey. L'intérieur d'un hôpital psychiatrique raconté par un indien schizophrène dans un style à la fois psychédélique et très sombre.
Milos Forman y voit l'expression du totalitarisme qu'il a connu en Tchécoslovaquie.
La production (Michael Douglas), manque de fonds, mais obtient l'accord d'un hôpital psychiatrique pour abriter le tournage. Les acteurs, totalement investis dorment sur place et jouent leurs personnages 24h/24. Le personnel soignant comme les malades sont recrutés, tant pour la figuration ou les petits rôles que pour seconder les techniciens. Autant dire qu'il y a fusion entre l'équipe de cinéastes et les occupants de l'hôpital dans une étonnante ambiance créative, car Milos Forman n'hésite pas à s'écarter de son scénario pour suivre les idées de ses acteurs.
L'histoire s'écrit donc sur trois niveaux: le romancier américain qui dénonce le système psychiatrique, le réalisateur qui dénonce l'inhumanité d'une administration totalitaire aveugle, et les acteurs qui apportent chacun leurs idées et leur expérience des abus des petits chefs.
Miraculeusement, cela fonctionne. Milos Forman réussit à utiliser toute cette créativité et à l'ordonner en un mouvement puissant et inéluctable. On comprend que malgré toute la truculence et la force vitale déployées par le personnage principal, cela ne peut que mal finir. Nous sommes embarqués avec le héros qui se débat inutilement face à un système implacable représenté par cette infirmière en chef d'autant plus terrifiante qu'elle est convaincue d'agir pour le bien de ses patients en exerçant son métier avec toute la rigueur des règles de l'établissement. Qui ne s'est jamais trouvé face à un fonctionnaire dans une administration, qui vous répond poliment tout en restant sourd à votre problème? Qui n'a jamais eu le sentiment d'être totalement impuissant face à une administration absurde qui échappe à tout contrôle et broie aveuglément tout ce qui n'entre pas dans les cases?
Il y a du Kafka dans ce film.
Les psy se plaignent encore aujourd'hui du tort que ce film leur a causé, car bien sur, ce n'est plus comme ça aujourd'hui, bien sur... Dans les émissions de télé, ils sont charmants, drôles et même humains, mais si on lit leurs écrits, on peut se demander quels sont les effets pratiques de leurs suffisantes certitudes.
Les conditions de réalisation de ce film font qu'il est joué avec une justesse exceptionnelle qui happe le spectateur dans une affaire déstabilisante et sans issue.
Une histoire où l'humain se brise contre l'administration.
Mais Forman nous dit aussi: Résistez! Vous y perdrez peut-être tout, mais résistez! Vous ne le verrez peut-être pas, mais un jour cela paiera ... Mais surtout ne vous laissez jamais enfermer.
Ne vous soumettez jamais!
Révoltez-vous avant!