Ecrire une critique d’un film que l’on a aimé en étant enfant est toujours compliqué, parce que l’idée que l’on s’en fait est toujours tronquée, passée par le prisme de notre jeunesse. Malgré tout ce qu’on en dit et ce qu’est réellement le film, j’ai longtemps maintenu ma note à 8, subissant les moqueries et autres piques de mes pairs qui ne cessaient de me dire que « AHA de toute façon ton film préféré, c’est Volcano, AHA ». Oui, « aha », comme vous dites, mais ce n’est pas forcément le cas. J’ai regardé une nouvelle fois le film avec l’optique d’en faire une critique quand je m’y suis décidé, et j’avoue que de nombreuses choses m’ont finalement chagriné, ce qui me déçoit car je pense que j’aurais préféré continuer à avoir cette fausse idée du film dans ma tête, cette idée du film catastrophe rendu épique par un seul et unique personnage, qu’on aimerait devenir, et interprété par Tommy Lee Jones.


Car Volcano, c’est tout d’abord l’histoire d’un mec, Mike Roark, qui habite à Los Angeles et qui dirige l’OEM, Office of Emergency Management, c’est-à-dire l’organisation qui peut avoir les pleins pouvoirs dans la ville et en utiliser toutes les ressources en cas de catastrophe le nécessitant – et vous vous en doutez, ça va le nécessiter. Un scénario finalement banal de film catastrophe classique. Oui… Mais non.


Je ne suis pas expert en film catastrophe (ni en film tout court d’ailleurs), mais là où je trouve le film intéressant et différent de bien des films catastrophes que j’ai pu voir, c’est qu’il ne raconte pas l’histoire d’une personne qui se bat pour sauver sa peau (et éventuellement celle de sa bien-aimée), mais bel et bien d’un homme qui se bat pour sauver la ville. Au fond, même si le personnage de Roark est développé, il ne l’est pas à outrance : assez pour qu’on s’attache, pas trop pour qu’on oublie le réel enjeu du film, qui est de sauver Los Angeles d’une éruption volcanique impensable.


Et pour appuyer mon propos, j’aimerais parler d’un angle du film que je trouve extrêmement bien pensé et surtout très actuel (paradoxalement puisque le film date de 19 ans tout de même) : celui des médias. Le film s’ouvre sur des images de gens normaux dans la ville, et au son des radios et des chaînes de télévision locales qui racontent une matinée banale à Los Angeles : la température, les embouteillages, les faits divers… Quand tout à coup, un tremblement de terre est ressenti, assez léger. Après un bref instant où la ville a arrêté de vivre (on est d’ailleurs aux côtés d’une équipe médicale pendant cette secousse, qui tente de sauver un patient : et même eux stoppent leur activité les quelques secondes durant lesquelles la Terre tremble), elle reprend son cours, cette fois-ci en évoquant le sujet que tout le monde a en tête : le tremblement de terre. Le séisme étant de faible intensité, rien de grave n’est envisagé : on en parle aux médias comme on parle de la météo. Et c’est exactement ça qui fait que, finalement, la véritable héroïne du film, c’est la ville elle-même, sauvée certes par un Tommy Lee Jones en grande forme, mais héroïne tout de même. Tout au long du film, cet angle des médias est abordé, à l’image de ce reporter en duplex de l’éruption qui hurle ce qu’il voit dans son téléphone pour une chaîne de télé, ou de tous ces journalistes qui rassurent les habitants, sont sur le terrain ou informent des dernières avancées. De là à dire que c’est une critique du monde médiatique et informatif, je ne pense pas, mais le film fait en tout cas énormément écho à cette recherche médiatique du sensationnel que l’on vit aujourd’hui.


Autre point fort du film : son déroulé. Une première partie haletante, où la tension monte petit à petit. Du premier tremblement de terre à l’arrivée de la catastrophe, on sent que quelque chose va se passer. Bon, on n’est pas stupide, on se doute de ce qu’il va arriver, on sait lire le titre du film. Mais tout de même : un léger tremblement de terre, une vérification de routine qui tourne au cauchemar mais qui peut s’expliquer par une fuite de gaz, l’eau d’un lac qui augmente drastiquement en température… Et le tout en suivant un sismogramme qui apparaît de temps en temps, et qui devient fou lors d’un gigantesque tremblement de terre qui prive la ville de toute électricité avant d’y faire apparaître un volcan. La lutte contre la lave qui se déverse sur l’avenue est intéressante parce qu’elle met en exergue certaines particularités qu’on aurait tous dans des catastrophes qu’on ne contrôle pas, j’ai nommé : les idées de merde, comme… renverser un bus pour contenir de la lave. C’est du détail, et pourtant ça rend les choses crédibles : quelqu’un, au sein de Los Angeles, sait-il réellement se battre contre une coulée de lave ? Ils finissent finalement par y arriver, évidemment, mais non sans mal et scepticisme. Le film aurait pu s’arrêter là : mais il nous plonge dans une seconde intrigue : la lave a continué de circuler, même si en surface tout va bien, ce n’est pas le cas en sous-sol. Et il faut trouver un moyen de vite l’arrêter parce que, tel que c’est parti, elle va de nouveau sortir … au niveau d’un hôpital de fortune. Bien évidemment, la ville est sauvée, malgré les centaines de morts qu’ils évoquent à la fin du film, les milliers de blessés et les milliards de dégâts.


Décrit comme ça, je suis sûr que vous vous dites que ouais, ce film vaut le coup : et vous aurez raison. Je pense sincèrement que c’est une référence en terme de film catastrophe (bon vous me direz que vu l’état du genre à ma connaissance, c’est pas compliqué). Mais – parce qu’il y a un mais – je ne peux pas être honnête sans évoquer certains gros défauts du film, que j’ai pu noter en regardant malheureusement avec un œil plus critique ce film.


D’abord, je l’ai dit, ce film n’a, à mes yeux, pas de véritables héros (même si évidemment, Mike Roark tient ce rôle à première vue). Pour appuyer ce propos une nouvelle fois, il est important de noter que l’on suit non seulement Roark (et son équipe) se battre contre la lave en elle-même, mais on suit également deux autres personnages : Stan Olber, responsable du métro de la ville, et Jaye Calder, médecin dans un hôpital pas très renommé. Je précise à dessein dans quel hôpital elle travaille, car une pseudo-intrigue amoureuse est montée à propos de cet hôpital et son petit ami qui souhaite qu’elle travaille dans un hôpital où, je cite, « elle n’aurait qu’à soigner les tendinites des riches qui jouent au tennis ». Texto. Alors c’est la VF, mais ce genre de niaiserie et d’idiotie est symptomatique de l’inintérêt d’avoir séparé les intrigues : le médecin est inutile puisqu’on le voit deux fois faire sa tambouille et ignorer son mec, et… Voilà. Idem, le responsable du métro : trois scènes, dont celle de sa mort totalement ridicule et mal jouée. C’est vraiment dommage parce que prendre en plus de tout ça l’angle de personnages clés de la ville pendant cette catastrophe était une bonne intention et aurait pu être une bonne idée. Mais ça n’a pas été le cas. En plus, conséquence collatérale de cet agglomérat de personnages, finalement, Mike Roark paraît un peu bâclé, notamment dans certaines scènes où on le voit avec plusieurs aspects différents sans réelle raison. Et je ne parle même pas du personnage de Rachel (juste Rachel, pas de nom) qui, bien qu’apparemment très amie avec la caution jolie femme du film (la géologue qui suit Mike tout au long du film), meurt de façon assez spéciale et tout le monde s’en fout. Elle est oubliée en deux scènes.


Au niveau du déroulé lui-même, dont j’ai vanté les qualités tout à l’heure, un petit bémol est à préciser, bémol qui est d’ailleurs présent dans un autre moment du film. Ce bémol, c’est l’explicitation outrancière des morales du film. Deux morales sortent du lot : « olala le racisme c’est mal » et « olala l’Homme ne devrait pas autant agir sur la nature ». La première est visible au travers d’autres personnages dont on suit les aventures : un policier blanc, chauve et moustachu, et un noir américain pseudo-gangstah. J’aimerais attirer votre attention sur une scène particulière du film, où le noir vient réclamer de l’aide aux pompiers parce qu’il y a le feu dans sa rue… et se plaint qu’on ne la lui fournisse pas alors que, à 20 mètres de lui à tout casser, de la lave coule, ce qui ne fournit apparemment pas une excuse valable pour lui. Et là le policier blanc lui met les menottes, il est accusé de racisme et tout ça (??) mais finalement le noir aide les policiers, et quand la catastrophe est maîtrisée, le policier blanc et moustachu, d’un air détaché, envoie les pompiers dans ladite rue du jeune homme. Histoire sans intérêt et inutile. C’est comme à la fin du film : pour bloquer l’avancée de la deuxième coulée, ils ont détruit un immeuble et tout le monde est donc plein de poussière. Du coup tout le monde a la même couleur dans ce désastre, et c’est ça le message du film : peu importe notre origine, notre couleur ou même notre religion, tout le monde a été dans la même galère, et les voir tous plein de poussière à la fin était suffisant et envoyait un message fort. Alors POURQUOI ce gamin (que vous apprendrez à détester, croyez-moi : à Pierre-Feuille-Ciseau, ce gamin de 4 ans se croit intelligent à dire qu’il joue « de la lave »… Mec tu connais pas les règles ?) doit-il être obligé de dire « Pourquoi ils se ressemblent tous ??? ». Pourquoi EXPLICITER ce message pourtant cool ? Pourquoi gâcher cette scène de fin ?


Le deuxième problème de message explicite concerne la deuxième coulée de lave : je vous ai parlé précédemment de cette coulée qui passe dans les sous-sols. Et si elle le fait, et bien figurez-vous que c’est à cause de l’Homme, parce que la lave s’est déversée dans le métro qui a accéléré et réchauffé la lave et a provoqué une seconde coulée qui allait surgir là où la ligne s’arrête (donc si vous avez suivi, sous un hôpital de fortune). Deux problèmes se posent dans les dialogues : la géologue (un peu chiante, mais bon, passons) qui accompagne Roark est bien trop insistante sur le fait que ces tunnels ONT ETE CONSTRUITS PAR L’HOMME D’ACCORD JE NE SAIS PAS COMMENT ELLE VA SE COMPORTER AVEC DES TUNNELS CONSTRUITS PAR L’HOMME OK ? Sans oublier les délires à base de « olala quelle idée d’avoir construit au-dessus d’une faille et d’une zone à risque ». Oui, d’accord : mais trop abusé dans le martèlement de l’idée.


Je finirais par parler des quelques incohérences qui m’ont agacé : oui, on peut passer au-dessus de lave en fusion, à environ deux-trois mètres, sans être totalement cramé. Oui, on laisse les journalistes approcher à un mètre de la lave pour faire leurs reportages. Oui, on confie sa propre fille (reloue aussi) à une meuf qu’on a rencontrée là, sur la route, et qui se dit médecin. Et oui, quand on est chef de la police, on a une grosse voix venere au téléphone – carrément cliché.


Mais ça ne doit pas vous empêcher de voir Volcano : honnêtement, c’est un bon film qui fait passer un bon moment, et est, à mon sens, une référence en terme de film catastrophe.

Youghy
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le 5 avr. 2016

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