Loin du calme indifférent
Pour Piero Usberti, ce documentaire devait initialement être dépouillé de sa propre présence, pour ne mettre en avant que les Gazaouis et leur quotidien. Heureusement, il s'est aperçu de sa place...
le 23 oct. 2024
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Alors j'avais beaucoup d'espoirs sur ce film, entendre des jeunes Palestinien parler d'eux de leur vie est quelque chose de rare vu le peu de liberté et de moyens d'expressions dont ils jouissent. Ensuite les images que j'avais pu voir avant le visionnage m'ont tout de suite séduit, camera épaule tremblante pouvant se faufiler partout, dans les moments de vie de chacune des personnes filmées. Une restitution de ce à quoi peut ressembler la vie à Gaza ou les gens mangent comment ils se rencontrent, travaillent comment ils vivent cette pression permanente. C'était ce qui semblait se dégager de ces images j'ai donc foncé en salle dès que j'ai pu.
Tout d'abord, les images de ce documentaire sont saisissante, le réalisateur sait capturer de purs moments de vie, comprendre leur intérêts au vu des conditions de vie des gazaouis et des bombardements, c'est réussi. On le voit tantôt accompagner des paysans au travail, suivre une manifestation de 2018 et ses conséquences tragiques, tout comme filmer des jeunes gens faire du sport sur les bâtiments en ruine (scène assez époustouflante). Mais pas que, on le voit rencontrer les gens chez eux on film ce qu'ils lisent, on les voit rire. De ce point de vu la c'est très réussi.
Maintenant sur ce qui coince j'ai deux trois réserves et pas des moindres: la parole.
La voix off au début du film contextualise historiquement le lieu et la situation géopolitique de la bande, c'est normal et cela nous permet de comprendre l'implication de ce qu'il nous montrera plus tard. Malheureusement cette voix ne nous quitte plus et explique tout.
Alors quand c'est pour expliquer des éléments historiques ou géographiques passe encore même si j'aimerais que les habitants me parlent de ça eux même. Mais quand c'est pour nous dire " Sara vient d'une famille de trois enfants" "elle m'emmène au nord de Gaza dans cet endroit", "Mohamed m'explique laisser ses fenêtres ouvertes pour ne pas les voir souffler par le souffle des explosions" " Il a été arrêté trois fois par le Hamas" " Ces jeunes gens se réapproprient les lieux en ruine en y faisant du sport".... Les exemples sont tellement nombreux.
Mec tu pourrais pas laisser les mecs que tu film t'en parler au lieu de nous expliquer ce qu'ils t'ont dit? Ils n'ont presque jamais eu le droit à une exposition comme celle ci et tu leur coupe la parole pour raconter leur histoire à leur place? J'en suis mal à l'aise.
Bien sur il arrive que les gazaouis s'expriment directement à la camera dont ils ressort d'ailleurs des moments particulièrement touchant, notamment sur le jeune cherchant éperdument à s'évader et quand même puissamment attaché à cet endroit. Mais ces moments nous amènent à un autre problème, ils ne montre dans ce documentaire presque que les moment ou il a choisit que les gazaouis allaient s'exprimer sur un sujet. Il leur pose des questions, ils répondent. Presque jamais alors qu'il est à leur contact et filme quasiment tout le temps c'est ce qu'il dira lui même dans le documentaire, il ne décide de capturer une discussion sur le vif qu'il n'a pas provoqué par des questions. En effet les mots en arabes ne sont traduit que quand il le décide et dans les moments que j'ai cité juste avant. C'est dommage pour capter la réalité de la vie ces petites discussions de rien ou de tout nous permettraient de nous sentir encore plus proche de ces gens d'une part tout en prenant conscience de l'écart vertigineux de nos modes de vie. Nous qui ne serions absolument pas capable de travailler en chantant dans un chant en sachant que la buffer zone est proche et qu'on peut se prendre une balle à tout moment. C'est vraiment dommage et encore une fois en expliquant ça tu leur coupe la parole.
Autre problème le prisme idéologique du film, d'une main il dénonce les agissements génocidaires et terroriste de l'état d'Israël et l'abandon des pays voisins face à la situation à Gaza. C'est explicite et très bien documenté, la voix off fait d'ailleurs une analogie très révélatrice et juste avec l'Amérique sur la légitimation des colons faisant passer leur annexion pour une guerre émancipatrice, inversant les rôles. Ok.
D'autre part il relate par l'intermédiaire des gens qu'il filme (toujours en expliquant la plupart du temps à leur place ce qui est dommage) la pression opéré par le Hamas sur la population gazaouis. En terme de droit pour les femmes, de mœurs de jeunes gens, de positionnement politiques etc... La encore je suis ok c'est tout a fait précieux e nécessaire de recueillir des témoignages de personnes vivant sous un pouvoir oppressif.
La ou j'ai un problème c'est le grand absent de ces points de vues... Le gazaoui qui soutient le Hamas ou alors sans le soutenir qui peut ne pas être totalement réfractaire à leurs actions. Ben oui j'imagine que dans la bande de Gaza tous ne sont pas résolument pacifistes et d'accord sur les modes de luttes non violents et anti Hamas... Comment pourrait on les juger??? Il est rigoureusement impossible de s'imaginer à leur place vu l'horreur que représente ces décennies de d'exterminations. On aurait tout à fait pû entendre la voix d'un gazaoui un peu plus radicale que les autres sans pour autant accuser le réalisateur d'islamo gauchisme ou je sais pas quelle autre connerie vide de sens.
On a un entretien faites par une gazaoui à un gazaoui sur ce qu'il pense du fait que Israël dise que les manifestants sont pro Hamas ou sont payé par le régime. Le questionné répond non, explique que ce n'est pas le cas des proches à lui présents dans la pièce qui ont pris des balles sans être affilié au Hamas. Ces témoignages sont important vu la désinformation grossière à laquelle s'adonnent les médias Occidentaux.
Mais à un moment le frère de l'interviewé (il me semble) répond mais les gens du Hamas sont des Palestiniens non? Ils luttent aussi pour la Palestine ? Puis il se tait. On aimerait en entendre plus la dessus, des discours de colère noire doivent exister sur la bande sans pourtant être proférés par de dangereux terroristes, ils sont pourtant absents du documentaire.
Pour résumer je suis content que ce documentaire existe et heureux que la voix des gazaouis et leurs vies puissent être portée en occident par l'intermédiaire d'un objet d'art immersif. J'aurais préféré néanmoins qu'on leur donne la possibilité de raconter leur histoire eux même.
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il y a 6 jours
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