Riyadh Bicycle
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le 7 mars 2013
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Wadjda est un premier film d'une réalisatrice qui se dit timide, discrète. Pourtant, une chose est sûre, ce premier essai ne passera pas inaperçu pour autant. Au delà du bruit médiatique qu'il a créé parce que réalisé dans un pays où le cinéma n'existe pour ainsi dire pas, à savoir l'Arabie Saoudite, "Wadjda" est un film servi par un scénario impeccable.
Il parait simple au départ, il se révèlera tout autre aussi complexe que la société qu'il décrit. Première image : une petite fille de 10 ans se détache de ses autres camarades, tout commence par ses pieds affublés de petites chaussures originales au milieu des souliers noirs de ses camarades, mais aussi de la musique qu'elle écoute dans sa chambre et copie sur des cassettes afin de les revendre au meilleur prix pour pouvoir, un jour, s'acheter le sacro-saint vélo qu'elle a repéré flottant dans les airs et qu'elle a suivi (une des plus belles images du film).
De ce film on peut dire qu'il est fort car il montre des femmes et des hommes dans leur vie quotidienne à mille lieux de la nôtre, enfermés dans des carcans dont ils ne peuvent plus sortir. A l'image de cette scène magnifique où la mère de Wadjda, enfin décidée à se libérer de ses interminables 3 heures de trajet quotidiens, renonce devant ce qu'elle ressent comme trop libre (un nouveau travail qui impliquerait qu'elle devienne une femme plus libérée et donc montrée du doigt). Si ces femmes aspirent à une libération, c'est toujours timidement. Ainsi, quelle force quand la directrice, dure et pleine de principes sévères et parfois injustes, glisse discrètement à Wadjda "j'étais comme toi à ton âge". Le film, sans jugement (et c'est ce qui fait sa force), montre alors le destin de ces femmes mais aussi des enfants comme relève, on l'espère plus libre, avec comme fond ce désir tenace et magique de Wadjda d'avoir un vélo pour faire la course avec son voisin. Le pied de nez du film, quand après un concours coranique Wadja annonce qu'elle achètera un vélo avec l'argent gagné alors que c'est interdit pour les femmes, est bien mené, c'est un obstacle de plus qui s'ouvre devant Wadjda toujours pas prête à renoncer. Elle qui a lu ce verset annonçant que les faux croyants ne le font croire qu'à eux-même. Car si la religion fait partie intégrante de la vie de Wadjda il n'est jamais dit si elle croit ou non, le concours n'est pas le signe d'une ferveur religieuse, juste l'envie de son vélo qui la pousse à se ranger un temps. Et même quand elle prie, magnifique avec sa mère à l'aube, cette mère qui accepte résignée le remariage de son mari (qui n'est pas un cliché d'homme dur comme on pourrait s'y attendre, encore une réussite de ce film, il a des scènes de tendresse avec sa fille), il n'est pas sûr que sa croyance ne soit pas plus en un avenir meilleur qu'en un dieu.
Wadjda est une fille balayée de l'arbre généalogique de son père qui tente de s'imposer mais est bien vite effacée, oubliée par les hommes (tous sauf un peut-être), il ne reste qu'elle et sa mère avec qui chanter à tue tête quand les hommes ne sont pas là. Mais surtout, il y a ce vélo qui l'attend (qu'elle aura peut-être, je ne vous en dit pas plus), celui qui se projette comme un rêve pendant tout le film, comme un lien entre tous mais surtout comme un petit souffle de liberté qui entre dans nos esprits, dans la vie de Wadjda comme le "voleur" de la directrice la nuit... Magnifique parce que fort et exempt de jugement. Un film juste et intelligent. A voir absolument
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Créée
le 18 févr. 2013
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