"We need to talk about Kevin" ne peut pas laisser indifférent.
Quoiqu'on pense du film, en bien ou en mal, il laisse un trace indélébile qui pour ma part risque de me hanter encore quelques jours.
D'ailleurs, je ne devrais pas me risquer à faire une critique comme ça à chaud mais bon j'ai envie d'en parler et je sens que c’est maintenant ou jamais.

Le film est dense et brasse beaucoup de choses avec beaucoup d'attention et même s'il n'évite pas par moment une certaine caricature, Lynne Ramsay peut se targuer d'avoir été jusqu'au bout de son sujet.
L'intrigue pourrait se diviser en deux ( même si d'un point de vue narratif , les 2 approches sont mélangés voire attachées l'une à l'autre).
La première , classique, nous montre le visage d'un tueur en devenir.
Froid , inexpressif, il développe une haine viscérale qui va l'amener à commettre un acte atroce mais qui semble presque inévitable.
Faussement en retard, il s'avère manipulateur, calculateur et cela dès les premières années.
L'une de ses premières victimes est sa mère, comme s'il voulait lui faire payer son manque d'attention.
En effet, elle commençait tout juste à vivre et elle se retrouve enceinte pour un acte d'amour non réfléchi.
Les quelques images du début nous font comprendre qu'elle n'est pas prête, qu'elle ne veut pas vraiment de cet enfant (la scène où elle se met devant un chantier pour ne plus entendre les cris de son fils résume à elle seule toute la complexité de ce que va devenir leur relation).
A côté de ça , on a un père aveugle qui ne se rend pas compte de ce qu'endure sa femme et qui va excuser toutes les bizarreries et dérives de son fils.
Par un certain côté , c’est un peu lui qui l'amène vers le chemin de la violence entre les jeux vidéos puis le cadeau de son premier arc qui deviendra fatalement l'arme de son crime.
De ce point de vue, le film est malin et questionne les personnages sur leurs fautes : Est ce innée chez Kevin ? Est ce qu'il dérape pour faire souffrir sa mère ( ou pour lui montrer qu'il existe ?) ? Est ce que le père est responsable à cause de son laxisme ? Ou est ce l'assemblage des 3 qui amené à ce cocktail d'horreur .

La responsabilité est un axe majeur du film.
Comment vivre avec les crimes de son fils ? Penser à ce qu'on a bien pu faire de mal , se remettre en question?
Et comment continuer à vivre dans une ville où elle peut croiser les parents des victimes de son fils ? Qui peut lui pardonner et pourquoi le ferait t'il ? ( le film là aussi brasse divers situations sans forcement s'étaler mais en montrant juste qu'elles existent )
La rédemption se fait à travers une nouvelle vie qu'elle a du mal à se construire symbolisée par le nettoyage de sa maison ( salopée de rouge , une couleur omniprésente dans le film alors qu'on ne voit pas une seule goutte de sang.)
Nettoyer sa maison, c'est en quelque sorte sa façon de purger ses pêchés.

"We need to talk" ne parle pas que de la naissance d'un meurtrier.
Il parle aussi d'une relation conflictuelle entre un fils et une mère qui ne se comprennent pas et qui pourtant, par de nombreux points, se ressemblent.
Perturbant , cette vision laisse un peu perplexe mais elle pousse à une certaine réflexion , une réflexion qui aurait pu être encore plus aboutie si la folie du personnage de Kevin n'était pas aussi perceptible. (totalement incarné par Ezra Miller, il faut bien le dire)
Stephane_Hob_Ga
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2011

Créée

le 21 mai 2014

Critique lue 551 fois

13 j'aime

5 commentaires

Critique lue 551 fois

13
5

D'autres avis sur We Need to Talk About Kevin

We Need to Talk About Kevin
Velvetman
8

I saw the Devil

C’est l’histoire d’un enfant roi, à la couronne ensanglantée. Une petite tête blonde dont l’esprit semble se remplir d’une haine viscérale années après années jusqu’à exploser aux yeux du monde. De...

le 16 avr. 2016

81 j'aime

6

We Need to Talk About Kevin
Marvelll
8

Portrait d'un monstre : parlons de Kevin

Une énorme fascination pour ce film maitrisé de bout en bout. Si on est complètement paumé au début avec des allers-retours dans le temps sans aucune explication, ni même de repère historique,...

le 29 sept. 2011

79 j'aime

8

We Need to Talk About Kevin
Before-Sunrise
7

Sortez couverts

We Need To Talk About Kevin ou comment réaliser la plus longue pub pour les capotes du Monde. Eva tombe enceinte « par accident » avec un type fraîchement rencontré. Elle n'est pas faite pour être...

le 10 avr. 2012

66 j'aime

24

Du même critique

Amarillo - Blacksad, tome 5
Stephane_Hob_Ga
6

Un jaune de l'espoir un peu délavé.

Blacksad fait partie de ces séries qu'on attend avec une impatience plus ou moins importante. Elle s'est démarquée, dès le premier tome, par le dessin de Guarnido , transfuge de Disney qui maîtrise...

le 17 nov. 2013

33 j'aime

8