Je pense que l'histoire aurait pu marcher dans un support différent, comme une BD. A l'instar des dramas japonais, c'est difficile d'entrer dans le délire. On sent la volonté d'en faire une escapade onirique mais les éléments pour nous y faire croire ne fonctionnent pas.
D'une part l'immersion est rushée (à ce titre, la temporalité est bizarrement gérée : une petite larme et hop your pikachu evolved into pik-hobo ?). Cela n’irait pas dans le sens du propos du film mais j’aurais trouvé beaucoup plus engageant que l’exploration de l’univers soit un corollaire à une situation dramaturgique (comme dans le manga Dragon Head) et non pas simplement par… envie ou curiosité innocente.
D’autre part il aurait fallu complètement assumer le truc et aller à fond dans l’imaginaire, faites péter la féerie ! Quitte à vomir du kitsch et à faire pleurer les créanciers. Parce que là on se retrouve avec du semi-conte forcé dont on ne croit jamais à l’enchantement.
Croire, croire. Et oui c’est bien l’idée générale. Tel le spectateur assistant au lancer de chaussure du Stalker dans les champ, il faut faire preuve d’une extrême bonne volonté pour relier la magie aux images qu’on nous sert. Quand l’arrière-plan sonne plus comme une paresse du script que comme un fragment de l’envoûtement, cela montre bien l’aspect bancal du projet, qui va donc de paire avec le cadrage global (je parle de l’absence de miam-miam, il faut croire (oups) que les bambins carburent au script et non à la viande remplie d’hormones et autres baguettes jambon-beu… euh pesticide-additif comme tout le monde). Ou alors j’ai perdu mon âme d’enfant (je plaisante, je ne laisserai pas au réal’ le sentiment de victoire qu’il souligne avec son sarcasme benêt en me regardant là).
Je me dois de rebondir sur ce schéma de «croyance» lancé à tout va. Je réitère mon opinion idoine que j’avais à mi-chemin, «c’est relou le tu quittes l’enfance quand tu découvres la tristesse». Le secret de l’immortalité est ainsi de croire que c’est possible («t’es mignon mais t’es un petit peu con»). Ah bah il est ici le kitsch, la «négation de la merde». La période mini-hooman est la plus heureuse, ô jeunesse glorieuse et protégée du monde autoconscient, n’évoluons surtout pas (pensée exclamée par ledit pikachu lorsqu’on le rapproche de la pierre de pandore de la réalité qu’elle est pas belle) ! blablabla c’est sans compter que les mômes peuvent être les champions de la puterie hein. Comme ce Peter qui a l’impulsivité d’un fanatique hystérique (si tu as la vision d’un grassouillet dans un maillot de foot et non pas d’un dégénéré religieux, je t’invite à revoir tes priorités et tes choix dans ta vie bisous) en proclamant la sentence : crois ! Rien à battre du sens de la mesure ou de l’analyse logique, ton pote s’improvise ancre jetée à la mer ? Mais tant mieux ne brise pas ses rêves ! Crois crôa-crôa, saute les obstacles de la réalité ! Gobe le présent pour que le futur n’ait pas sa place au dessert ! Dans son univers des possibles, les responsabilités sont rendues caduques tant que brille la lueur de l’insouciance et de la joie, mais c’est malhonnête ou plutôt cela rend le parallèle avec la vie véritable bien boiteux. Et ça m’a agacé.
Ça m’a agacé qu’il ne soit jamais puni pour ses choix d’illuminé (de la jalousie athée ?) avec son non-charisme et ses sorties verbales type arrête de lire les notes de papa t’es grillé. Mais ce n’est pas le seul en fait, Wendy a les même tares avec ses yeux idiots. Ne pouvons-nous poser un cadre ? Soit les marmots agissent comme tel et sont vaguement stupides, soit une germe de maturité est présente mais on n’y croit pas une seconde dans ce contexte et d’ailleurs ça flingue l’anti-agisme latent. Parce que la scène conclusion de l’escapade déboule et c’est pénible, très pénible.
Voyage sur une île espace-temps, fruits bio-québecois (enfin je suppose que dès lors qu’on doive imaginer sa victuaille, on peut y apposer un label équitable imaginaire également), nature vierge (Paul et Virginie ont été subjugués par la beauté originelle capturée et ont même carrément posé un like sur la BA (mais avec un fairphone faut pas déconner) pour soutenir la thèse de la naissance tout-en-pureté-mais-la-vilaine-tâche-c'est-la-société, refrénant les ardeurs de premier commentaire youtube d'un l'enfer c'est les autres). Dommage que les dialogues ne soient eux pas… naturels (mais arrêtez de me lire, c’est horrible). Enfin, les enfants n'ont certes pas personnifiés le bon vieux moustachu Made in Deutschland au moyen d'un Dieu est mort ! de derrière les fagots mais c'en était pas loin lorsque les adultes ont décidé de faire n'importe quoi en chassant le poisson-rêve car ce dernier n'avait pas émis le souhait de partager avec eux sa ballade si sublime.
Non vraiment on ne respecte plus rien. Et on ne réfléchit plus d'ailleurs. Car si le but est de rajeunir, que les émotions négatives (monsieur Peter, pouvez-vous définir en quoi une émotion, désagréable soit-elle, est invariablement destructive sur le long terme, vous avez trois heures) font grandir et que ton acte va inéluctablement te donner le poids de la culpabilité, tu le sens pas ton plan foireux ? Mais voilà il fallait bien une raison pour aller flipper des burgers comme avant (tip : remplacer la bidoche par un steak de pois-chiche/haricots rouges, la différence de goût est compensée par une culpabilité moindre, et de toute manière ce qui fait un sandwich c'est la sauce j'ai dit) mais sans cynisme s'il-vous-plaît ! "On créera-vivra nous même encore plus d'histoires !" : MENTEUSE. T'es restée dans ton pub craignos donc ta délusion tu la gardes pour toi. Mais voilà il faut bien se persuader qu'on n'a pas foiré la totale comme l'ont vécu les chasseurs de cerf sacré dans la forêt à Kodamas. Mais c'est trop tard, le poisson lumineux s'en est allé ailleurs en prononçant ces mots si durs "Il est temps de se réveiller". Tu as beau implorer "encore cinq minutes Mère", l'île étrange disparaît petit à petit de tes souvenirs pour ne laisser bientôt plus que l'hibiscus à Marine comme dernier vestige mémoriel.
Je m'emballe, pour de vrai y a aucun sentiment puissant qui en ressort (Thorgal l'avait dit lui à la cadette des trois sœurs en constatant que le temps (cette pute) avait repris ses droits en sortant du jardin oublié, ce tu as eu tord mais tu as choisi). Le film oscille donc entre classique et fantasmagorique sans savoir où aller vraiment, seul l’ennui étant une valeur sûre (j’ai menti, la lourdeur des symboles et métaphores est également une constante).
La mer, la Mère¹ et la merde², Dagoni out.
¹ T'as cru à un plot féministe comme dans les Enfants de la Terre ? Mais non patate c'est beaucoup plus terre à... bref c'est une simple idée niaise qui aurait cependant pu être cool si la conclusion avait été dans le style du Film Lego
² Ce qui est écrit plus haut (cela devait rester morcelé dans une critique commune mais on m'a poliment demandé (à la manière soviétique donc) de laisser une trace complète.