Le documentaire de Thomas von Steinaecker propose un tour d'horizon sous la forme d'une rétrospective assez mainstream sur la carrière de Herzog, pouvant servir d'aperçu vis-à-vis de ceux qui ne se seraient pas encore totalement immergés dans sa filmographie étendue et délivrant quelques sucreries éparses aux groupies dont je fais partie. C'est un résumé assez sincère qui se concentre sur les régions les plus célèbres du réalisateur — disons pour résumer qu'on passe beaucoup de temps quand Kinski s'énerve sur "Aguirre" mais aucun mot sur des films plus complexes comme "L'Énigme de Kaspar Hauser" ou "Cœur de verre" — et qui brosse un portrait attachant en compagnie de Werner l'octogénaire qui a récemment joué dans "The Mandalorian".
Personnellement je me suis plus attaché à ce personnage, le vieil Herzog, qu'au reste. Un doux, très posé, avec la bonne dose de malice discrète qui fait son charme ainsi que cet accent lorsqu'il parle anglais qui a sans doute le plus fortement contribué à sa renommée aux États-Unis (le docu insiste sur le personnage des Simpsons qu'il a inspiré) et au portrait de l'homme allemand. En tous cas l'équilibre entre les images d'archives et les échanges plus directs est agréable, et même si en 1h30 on fait l'impasse sur une quantité astronomique de choses essentielles, le résultat reste attachant. Il me semble ne l'avoir jamais lu au sujet de son enfance, et ici on en apprend quelques détails, sa jeunesse sans père, la faim récurrente, etc.
Les intervenants sont nombreux et pas toujours très pertinents (je trouve que Kidman, Pattinson, Zhao, comme d'autres, font partie des points faibles), mais c'est compensé par les anecdotes qu'il est toujours agréable d'écouter, sa marche pour rejoindre Lotte Eisner malade à Paris en 1974 (racontée dans "Sur le chemin des glaces"), son calme hallucinant alors qu'il s'est fait tirer dessus à la carabine à air comprimé en pleine interview sur les hauteurs de Hollywood, la chaussure mangée suite à un pari perdu, les séances d'hypnose sur un tournage, l'épisode du bateau dans "Fitzcarraldo", la liste est interminable. Et avec Herzog, on ne sait jamais où on se situe sur l'échelle de la vérité quand il nous raconte qu'il ne rêve jamais, quand il prend ses airs si singuliers pour affirmer "I've always wanted to fly. It's an injustice from nature that we don't have wings", quand il nous dit qu'on possède tous un paysage qui correspond à notre âme...