Bien que la Shaw Brothers soit en déclin au début des années 80, ça ne l’empêche pas de continuer d’enchainer les films, et même parfois les très bons films. Ne faisons pas durer le suspense plus longtemps, What Price Honesty? est clairement un des meilleurs films du studio. Mais là où il se démarque vraiment de la masse des wu xia pian, c’est qu’il est surtout un des plus sombres, un des plus pessimistes. Voici comment le réalisateur Patrick Yuen définit son film : « Bien qu’il s’agisse d’un drame en costumes, il est conçu pour refléter l’aspect sombre de la bureaucratie, les injustices sociales et les fragilités humaines qui sont également évidentes dans la société actuelle ». Plus le film va avancer, plus il va monter en tension, plus il va devenir violent, plus il va devenir cruel, noir et désespéré jusqu’au plan final donnant une touche encore plus nihiliste à l’ensemble. Oui, vraiment, What Price Honesty? est un très grand cru de la Shaw Brothers.


La corruption dans la Police est un thème qui a souvent été utilisé dans le cinéma de Hong Kong. Très tôt, on a pu le voir dans des films tels que Killer Constable (1980) ou Secret Service of the Imperial Court (1984). What Price Honesty? joue également sur ce terrain-là, avec des officiels corrompus à tous les postes clés, jusque dans les hautes sphères. Ici, les héros, trois jeunes policiers, ne sont pas invisibles, ils en prendront plein les dents, et devront faire face à l’impuissance contre cette corruption qui est partout. Des personnages réalistes qui vont être mis dans des situations qui mettent leur moralité à l’épreuve et, par ricochet, celle du spectateur également. Le film est sans concession pour ces personnages qui font le bien, mais qui vont souffrir physiquement pour leurs principes. Même le dénouement du film ne fait que rendre le monde de What Price Honesty? plus injuste et moins porteur d’espoir. Le film est très violent, certains personnages se font tabasser gratuitement très fort. Le gore est également présent avec son lot de décapitations, corps transpercés, sang qui coule, mains et bras tranchés, renvoyant directement au cinéma de Chang Cheh. On a même des humiliations (à base d’urine ou de cafard) et même une tentative de viol, très appuyée, avec un personnage qui sera présent à l’écran totalement nu durant de nombreuses secondes afin d’appuyer encore plus certains côtés horribles de l’être humain. Tout est fait pour rendre les méchants parfaitement détestables et ils le sont complètement. Il est clair que What Price Honesty? n’a aucune subtilité, la corruption est flagrante, directe et extrême. La Police accepte les pots-de-vin, relâche les criminels qui ont acheté leur liberté, commet toute sorte d’actes de boucheries et de meurtres. Certaines scènes sont très marquantes (la pendaison forcée par exemple), aussi bien par les images que par la moralité de ce qu’il se passe.


Le casting est pour beaucoup dans la réussite du film. Jason Pai Piao tire son épingle du jeu, fournissant une grande palette d’émotions et prouvant qu’il peut sens souci porter un film en tant que premier rôle. Danny Lee incarne pour la première fois ce rôle de flic droit et intègre qui va lui coller à la peau une bonne partie de sa carrière. Dommage que son personnage ne soit présent que dans la première moitié du film. Sun Chien est également très bon en policier intègre mais pas trop, auquel on a un peu forcé la main pour ne pas rester sur le droit chemin. Dans les rôles de méchants, c’est la même chose, que ce soit Lo Lieh, Chiang Nan, Keung Hon ou encore Chan Shen, ils arrivent immédiatement à rendre leurs personnages antipathiques et détestables à souhait. L’histoire et l’intrigue sont très bien construites, What Price Honesty? est un film assez facile à suivre. Il est bien rythmé, il se passe toujours quelque chose et le scénario ne laisse que peu de temps de répit au spectateur. La photographie est superbe, avec de très jolies couleurs, et certains plans sont juste magnifiquement bien cadrés. Le réalisateur sait toujours où bien placer sa caméra pour donner du style sans essayer de créer artificiellement des effets de style. On sent que le film est assez ambitieux, que les moyens ont été mis, avec des décors studios magnifiques, fourmillant de détails, et donnant encore plus de puissance aux différents affrontements qui parcourent le film. Les combats justement sont tous très réussis. Ils sont nerveux, fluides, très bien chorégraphiés et très techniques, avec une caméra qui accompagne toujours très bien l’action. Ils ressemblent bien plus à ce qui se fera par la suite qu’à ce que faisait la Shaw Brothers à cette époque. Un final complètement fou, où vont s’enchainer plusieurs combats tous aussi excellents les uns que les autres pour finir sur un plan que n’aurait pas renié Chang Cheh, vient clôturer cette excellente découverte qu’aura été What Price Honesty?


Oui, vraiment, What Price Honesty? est un très grand cru de la Shaw Brothers. Certes, ça manque de finesse, mais l’intrigue est captivante et suscite la réflexion, les combats sont de haut niveau, le ton est sombre et désespéré, et le casting est impeccable. Un must see !


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-what-price-honesty-de-patrick-yuen/

cherycok
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le 20 oct. 2022

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