La séduction de la violence, c'est qu'elle oblitère momentanément la souffrance. Même celle infligée par la violence elle-même. Et ainsi, par facilité, elle se reproduit spontanément en un cycle infernal que parfois seule la mort peut briser. Un sujet aride et dense pour ce film sombre et beau qui se passe en territoire Objiwé. Comme dans n'importe quel ghetto, la misère et la relégation provoquent des drames familiaux et intimes dont les enfants ne sortent pas indemnes, jusqu'à commettre eux-mêmes des actes bestiaux irréparables, qui préfigurent seulement le pire. Comment faire face ensuite ? Les deux jeunes protagonistes de cette histoire terrible tentent des stratégies différentes. L'une mène à la rédemption, l'autre à l'oubli. Toutes deux sont dramatiques, mais de façon radicalement différente. Difficile d'en dire plus sauf à éventer le suspense, auquel on est suspendu parce qu'on a rencontré ces deux hommes quand ils étaient enfants. Si on les croisait aujourd'hui adultes, on verrait un pauvre type et un psychopathe, catégories qui ne déclenchent pas spontanément la sympathie. Et pourtant, ils ont une histoire, de celles qui plaident pour qu'on s'occupe mieux des enfants si on veut que le monde soit un jour meilleur et que la violence cesse de remporter systématiquement tous les combats. Et si ça voulait dire soigner les parents, avant tout ? Une mère de 13 ans, un père de 18, l'alcoolisme, le chômage, la solitude, tout ça pèse lourd face à un système scolaire qui représente le seul repère stable de ces vies chahutées. Et que peut-il vraiment ? Des questions essentielles, donc, auxquelles ce film n'apporte pas de réponse, bien entendu, comme toute œuvre d'art qui se respecte, mais qui ouvre des pistes qu'on a envie d'emprunter...

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le 27 oct. 2022

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