Revenons - le temps d'un article - sur le cinéma souterrain, quasiment invisible du cinéaste-dramaturge Werner Schroeter : chef de file du Nouveau Cinéma Allemand cet homme de pure mise en scène est principalement connu pour son opéra filmique retraçant les derniers jours de la cantatrice Maria Malibran, qu'il réalisa en 1972. L'année suivante sortira l'étonnant ( voire déconcertant ) Willow Springs du même Schroeter, hénaurme road-movie conceptuel aux motifs visuels réduits à peau de chagrin et à l'atmosphère extrême-occidentale pour le moins irréelle, surréelle, surnaturelle.


Willow Springs semble être le fruit d'un curieux dispositif de mise en scène tout droit hérité des ressorts dramaturgiques de l'Antiteater de Fassbinder et de l'Effet V théorisé par Bertold Brecht : en conjuguant une scénographie composée de vastes décors naturels ( ici le désert californien ) et d'intérieurs évoquant l'Europe de l'entre-deux-guerres ( là un saloon aux allures de bouge bavarois ) et une poignée d'acteurs-personnages fortement racés ( costumes de couleur unie et prononcée, maquillages éhontés, diction et phrasé soutenus...) Werner Schroeter crée une drôle de distance entre son spectacle et son spectateur, nous contraignant fatalement à garder un pied dedans, un pied dehors...


Si le film s'avère un tantinet lourd voire hermétique dans son appréhension il n'en demeure pas moins fascinant dans sa composition disparate et homogène tout à la fois, rappelant à bien des égards l'intrigant Whity, western surréaliste que Rainer Werner Fassbinder tourna deux ans auparavant ; vision cocasse du mythe américain au coeur de laquelle les cow-boys ont laissé place à un trio de tenancières assassines Willow Springs est un road-movie dans l'air de son temps, reprenant certains gimmicks de l'opéra et du théâtre pour mieux les apposer à ceux du Septième Art : un film aussi curieux que foncièrement atypique.

stebbins
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le 27 mars 2021

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