Woman on the Beach aurait pu être mon premier de Hong Sang-soo au moment de sa sortie en France, il y a une bonne dizaine d'années et je crois que c'est bien que je ne l'ai pas vu à ce moment là, je n'aurais sans doute pas été prêt.
Aujourd'hui j'arrive à être, encore une fois, séduit par son cinéma, par ces personnages qui ne sont que des « hommes coréens normaux », pour citer l'héroïne du film et qui tentent maladroitement de conclure avec une fille qui leur plaît. D'ailleurs ça commence comme un triangle amoureux assez classique, deux garçons, une fille, tous les trois sont à la plage pour y passer quelques jours et la fille va devoir choisir entre les deux. Mais là ce qui est intéressant c'est que le personnage principal du film, un grand réalisateur, se comporte véritablement comme un enfoiré, tandis que l'autre semble plus sur la réserve et sent petit à petit sa copine lui échapper.
Il y a une réelle tragédie du quotidien qui se déroule sous nos yeux, comment une fille va être séduite par un type détestable, qui lui fait en plus des reproches sur ses amours passés avec des étrangers (des allemands...), juste parce qu'elle semble aimer l'image qu'elle se fait de lui en tant que réalisateur connu.
J'aime cet aspect, le type qui fait des films n'est pas exactement le même que l'ivrogne qui râle parce qu'un fille a une sexualité un peu libérée, Proust avait donc raison.
Hong Sang-soo le met encore une fois en scène avec des plans séquences et un grand calme, il va laisser les personnages évoluer, donner du temps et de l'importance à leurs interactions ce qui permet, encore une fois, de faire naître un malaise chez le spectateur... un malaise tout à fait banal d'ailleurs, celui qu'on ressent lorsqu'on assiste à une conversation qui ne peut pas bien finir... Comme lors de la rencontre entre deux maîtresses d'un même homme, comme lorsqu'une femme annonce à un type qu'elle n'a jamais été sa petite amie... Celui qu'on est bien content de ressentir devant un film parce que ce n'est qu'un film, bien que chez Hong Sang-soo ça semble terriblement vrai.
Mais le film ne se contente pas de ça, de ce simple triangle amoureux, après une heure de film il part d'autres directions et comme à chaque fois avec le réalisateur on ne sait pas trop où ça peut mener... Un réalisateur connu sur la plage il peut lui arriver plein de choses, plein de rencontres...
Tout ça a un côté délicieux parce que terriblement vrai que ça soit dans l'écriture des personnages, dans leurs défauts, leurs petites jalousies mesquines, mais également dans leurs passions, leurs tentatives de tirer un coup...
Je ne sais pas si c'est le fait que ça se passe à la plage, parce qu'il y a un petit côté vacances qui me plaît bien, ou si c'est juste parce que ça fait quelque temps que je n'avais pas vu de films du réalisateur, mais en tous cas j'ai adoré et il fait clairement, pour moi, partie du haut du panier de la filmographie du réalisateur.