On souffle en sortant de la salle, d’exaspération et de soulagement. Parce que Wonder Woman n’est pas le ratage catastrophique des deux précédents, mais pour s’en assurer les producteurs ont lâché la moindre volonté de creuser une personnalité et d’idées au profit d'une efficacité relative. Le cahier des charges est donc rempli sans la moindre profondeur ni réflexion, et c’est terriblement frustrant.
Oui ! Ils ont entendu et pris en compte les critiques. Le film se regarde sans que l’on se questionne sur un potentiel problème de bobine mal calibrée ou redécoupé par un projectionniste blagueur.
Je ne m’étendrai pas sur les aspects techniques, il y a beaucoup à en dire et tout le monde va y aller de son analyse pour finalement se réfugier dans un facile « les goûts et les couleurs ». De même pour les trop nombreux problèmes d'écriture de personnages, de lieux et d'action.
J’ai personnellement trouvé le film beaucoup trop long et de nombreuses scènes s’étendent inutilement jusqu’à la gêne. Parfois joli parfois (très) laid. Je ne crache pas sur quelques touches d’humour mais certaines scènes sortent du film comme pour nous dire donner un shot (exaspérant) de comédie comme si on ne pouvait absolument pas s'en passer parce qu'on est habitué ailleurs.
Le lore de Wonder Woman est attrayant et raccroche les wagons de son passé en name-droppant des références tout le long du film, quitte à nous ajouter un personnage complètement inutile que j’ai vu comme la réponse excessive au fait d’avoir tué Jimmy Olsen (même rôle historique mais de moindre importance).
Une petite mention pour Robin Wright (House of Cards) et Saïd Taghmaoui (La Haine), à l’étroit dans ce film ultra calibré. Et une autre pour Gal Gadot qui nous fait son meilleur froncement de sourcils de l’incompréhension tout le film, mais reste une Wonder Woman forte et presque convaincante.
Cependant, et malgré les quelques bonnes choses qui peuvent en ressortir, l’écriture est enfantine et tout n’est que cliché. Chacun des soupçons de bonne idée nuancée est balayé d’un revers de main pour du simple, de l’idiot, de l’explosion, du déjà-vu à l’extrême. Chaque évènement du film respecte consciencieusement le schéma narratif d’un film de super-héros moyen, au point de me découvrir un infaillible don de prémonition durant la séance.
Le développement de sa protagoniste avait tellement de potentiel que j’en suis ressorti en riant de frustration et peut-être de moquerie. La morale concluant le film est on-ne-peut-plus convenue, pour ne pas dire terriblement ridicule, et c’est pourtant la ligne directrice de Wonder Woman pour l’avenir. J’en suis à me demander si ce n’est pas même directement les mots d’un enfant qui explique le personnage.
Bien sûr je défends le droit d’être enfantin pour un divertissement super-héroïque mais il faut la jouer plus fin si le but est de plaire à la fois au jeune public et à celui plus mature. Car avec cette esthétique sombre, cette ambiance se voulant poisseuse et presque misérabiliste de l’horreur de la Première Guerre Mondiale, DC ne peut cacher ses intentions d’aussi vouloir plaire aux adultes. Ce qui aurait pu alors sauver un film comme celui-ci sans vouloir expédier la genèse de son héros, ç’aurait été une envie de vraiment explorer son héros plus qu’avec les 2 doutes de surface conventionnels posés çà et là. On ne peut plus être aussi simple avec une telle prétention. Plus maintenant.
Le film est mathématiquement conçu et taillé pour plaire. Pour être un spectacle tout public. Mais c’est prendre le public pour des ignares que de croire qu’il n’a jamais vu d’autres films dans sa vie. Et c’est regrettable car DC arrive avec beaucoup trop de retard sur le créneau des films du genre sans comprendre l’expérience et les attentes en termes de thèmes et de personnalité. C’est dommage d’arriver avec une origin story basique qui ne déroge à aucunes règles préconçues après un Logan qui déconstruit le mythe super-héroïque et le fait entrer dans un âge mature, conscient de son genre et ses limites. Wonder Woman manque profondément de réflexion sur soi et du contexte dans lequel il sort, et n’est écrit que pour fonctionner, pas plus. Comme son personnage, le film prend la pose mais n’est pas iconique.
On gagnerait en puissance si même le public se posait la question du choix, se retrouvait face au doute. Ici, on sait par avance ce qui va arriver à Diana car, contrairement à elle, on connait notre monde, la période et ses enjeux dans la diégèse, c’est même utilisé comme ressort humoristique donc assumé par le film. On sait que rien n'est ni noir ni blanc tout le long du film, surtout pour la Première Guerre Mondiale, pas elle.
Hors diégèse, on pressent les événements du film par expérience, on sait aussi qu’il y aura une suite, on sait que Trevor va mourir un jour puisque tout le film est un flashback de 100 ans auparavant, pas elle.
On attend de la nuance pour pouvoir se distancer de la prévisibilité du film, et ainsi déstabiliser le public avec l’héroïne. Mais rien ne nous étonne, rien ne nous permet de s'investir dans le personnage et de percevoir avec elle les doutes et la conviction dans des situations qui sont qui-plus-est trop usées pour ne pas sentir de déjà-vu.
On se sent étranger au film, et il n’y a rien de pire pour un film de super-héros, où le plaisir se situe justement dans l’identification au héros.
Un autre coche raté pour le DCEU mais principalement pas pour des raisons techniques, et c'est préférable. Ne reste qu’un divertissement fade et oubliable, qui peut faire plaisir pour de petites raisons mais qu’il est impossible d’encenser entièrement comme un renouveau profitable pour la franchise au vu du creux de son propos et de la faiblesse de son écriture.