Rédigé par Max Brooks (fils de Mel... Brooks, pas Gibson), "World War Z" constituait un excellent faux reportage de guerre, abordant le thème rabâché du zombie par une approche réaliste et percutante, ensemble de récits et témoignages marqués par l'absence de véritable protagoniste principale. L'adaptation de Marc Forster ne raconte pas cette histoire. Pourquoi donc ? Tout simplement parce que Hollywood est incapable de se passer de certains points, à savoir: un héros immédiatement identifiable (et si possible américain), un point de vue occidental sur une crise mondiale (avec bien entendu quelques plans shootés à l'étranger pour faire bonne figure) et une narration classique et linéaire, avec début, milieu et happy end.
Enfanté dans la douleur (nombreuses réécritures, tournage chaotique et retardé, reshoots en pagaille...), renié par Max Brooks lui-même, "World War Z" est l'exemple type d'un genre à la base marginal (le film de zombie), récupéré par l'ogre Hollywood et remixé à une sauce indigeste afin de viser le plus grand nombre, si possible un public peu coutumier du genre qui saurait lui faire un triomphe absolument pas mérité.
Edulcoré jusqu'à l'absurde (quasiment pas une goutte de sang), reniant totalement sa nature de film d'horreur pour entrer dans la catégorie du blockbuster bien sage (les zombies ne sont qu'une masse informe à peine identifiable), dénué de la moindre ampleur malgré son budget colossal, "World War Z" est un naufrage artistique incroyable dont il n'y a absolument rien à sauver, même pas spectaculaire, froid, parfois même d'une maladresse frôlant l'incident diplomatique (les "morts-vivants" attirés par les champs rassembleurs des juifs et des musulmans !), qui ne fait que confirmer l'incapacité du metteur en scène Marc Forster à gérer un projet aussi pharaonique et de filmer correctement des scènes d'action.
Dans le rôle de Jésus de Nazareth (pardon, d'un ancien de l'ONU), Brad Pitt ne se foule pas une seconde, se contentant de jouer sa partition de sauveur de l'humanité en pilotage automatique, héros omnipotent capable de piloter un avion militaire, de trouver un ersatz de remède à lui tout seul et même de survivre à un crash aérien. Fortiche, le Brad !
Enorme foutage de gueule ayant pourtant cassé la baraque (allez comprendre), "World War Z" constitue le pire de ce qui peut sortir de l'usine hollywoodienne, un blockbuster laid et tellement formaté qu'il en perd toute raison d'être, un gigantesque outil de propagande en faveur de la toute puissante Amérique, nation rassembleuse, fière et forte dans l'adversité comme chacun sait.