Un playboy au pays des zombies
J'ai été particulièrement indulgent avec Marc Forster lors de la sortie de Quantum Of Solace malgré les défauts présents dans le film. Certains lui reprochaient sa réalisation illisible, bourrine et mal construite mais j'avais trouvé ça audacieux et pêchu, en corrélation avec le personnage. Surtout quand on sait qu'il s'est retrouvé à adapter son scénario au fil des jours de tournage en compagnie de Daniel Craig lors de la grève des scénaristes.
Aujourd'hui World War Z sort sur les écrans, après être passé lui aussi, à travers de nombreux et coûteux déboires. Reshoot, ré-adaptation et j'en passe, ce film se classe parmi les productions casses gueules de ces dernières années. Pourtant il cartonne, et établit même des records. Mais cette fois-ci je n'aurais pas cette capacité d'indulgence, de respect envers ce produit conçu n'importe comment, se classant parmi les pires productions sorties ces cinq dernières années. Un film totalement inbuvable (contrairement au Pepsi) et qui n'aura de cesse de nous faire comprendre que le spectateur est aujourd'hui constamment pris pour un con sous prétexte qu'il vient pour se détendre en plein été dans une salle climatisée.
Pas une seule seconde, et je dis bien pas une seule, World War Z ne convaincra son spectateur sur la situation présentée à l'écran. A cause de sa narration éclatée et linéaire, de ses défauts criants ou de ses errances scénaristiques monumentales, jamais une seule fois les actions perpétrées par le héros semblerons crédibles ou sensées.
Outre le fait que le héros sorte tout droit d'un carton Adopte Un Mec (Tyler Durden me manque) et donc décribilise constamment l'action entreprise, c'est surtout l'ennui et ce premier degré constant qui permettent à World War Z d'aller droit dans le mur. Marc Forster signe ici probablement l'un des premiers films de zombies sans la moindre violence, sans horreur ou situations sordides. Pourtant son film est au premier degré, sérieux, réaliste. Pourquoi donc tout couper au montage ? Pourquoi par exemple ne pas présenter des cadavres en gros plans plutôt que des plans d'ensemble sensés nous interpeller sur la dimension mondiale de la chose ? Pourquoi ne pas tout simplement présenter toutes ses séquences "dures" comme l'amputation d'une main aussi réaliste que dans un nanar, en gros plan elle aussi ? Non, jamais rien de tout cela ne sera présenté, car Marc Forster préfère passer sa production à la moulinette grand public histoire d'attirer les femmes avec Brad Pitt, et les hommes avec son film Call Of Duty.
Pire que Transformers, World War Z est une production sans ambition, sans idée, sans génie ou réflexion, ne proposant à son spectateur que de "l'action" décomplexée où le sang n'a pas sa place, où les têtes décapitées sont inexistantes, où les gestes se trouvent être décomposées en 50 plans pour faire illusion d'une intensité qui de toute manière, n'a jamais existée dans ce genre de production. A la manière de Taken 2, les situations rocambolesques et complètement incohérentes s'enchaînent pour finalement former une grosse mélasse indigeste d'où il ne ressort qu'un film éclaté se décomposant en plusieurs grosses séquences raccordées par des scènes "d'enquêtes". Une sorte de sous-Je suis une Légende d'où l'on ressortira violé intellectuellement, pris ouvertement pour con pendant deux heures et une pub pour soda.
World War Z ce n'est pas juste de la merde, c'est un cancer cinématographique pour ados en manque d'adrénaline qui viendra te dire : "c'est trop bien ça explose de partout, et puis ça détend, on réfléchit pas". Le degré zéro du blockbuster mal réalisé, mal joué, pas crédible pour un sou, vide de sans et d'héroïsme mais bien emballé par des effets spéciaux dont on distinguera les fond verts de temps à autre, car c'est plus intéressant de relever les défauts que de suivre l'intrigue.