Il est intéressant de constater une espèce de miroir entre les deux sagas X-Men qui auront été portées au cinéma sur les 20 dernières années. Dans les deux cas, quand la question de conclure a été posée, la même réponse revient : il faut finir en abordant Dark Phoenix, qui est très certainement l'antagoniste le plus redoutable que les héros doivent affronter.
Et à chaque nouveau film X-Men, la même problématique revient. Est-ce vraiment la fin ? Ou est-ce que ce sera le film de trop ? Si Apocalypse pouvait largement être considéré comme le film de trop, ce Dark Phoenix met un point final sur le débat, tant il présente toutes les caractéristiques du mort né.
Il y a déjà l’évidence. La Fox ayant été rachetée par Disney, les héros tels que nous les connaissons aujourd’hui sont destinés à disparaître pour que la licence puisse être rebootée et intégrée au MCU dans un futur plus ou moins proche. Naturellement, la production a souffert (et le terme est faible) d’un développement plus que chaotique et les intentions de ce Dark Phoenix sont fatalement très floues. On se retrouve donc avec un film fait pour les mauvaises raisons, ce qui provoque, tout d’abord, un espèce de je-m’en-foutisme assez désagréable à l’écran. Les acteurs ne sont pas concernés, et ne sont là que pour faire acte de présence ; Jennifer Lawrence (mon dieu quelle catastrophe) en premier lieu, puis Sophie Turner et son charisme minimaliste seront d’ailleures les premières concernées. Le film ne surprend pas, n’est pas bien rythmé et se perd totalement dans la gestion des personnages (sauf un, j’y reviendrai), et la note d’intention est au niveau zéro. On pourrait presque relativiser sur l’horreur qu’était l’Affrontement Final, qui lui aussi s’enlisait dans son traitement du Dark Phoenix, mais en réalité, les films se singent presque, à ceci près que Famke Janssen était bien plus charismatique que Sophie Turner mais que le personnage de Jean Grey est mieux traité dans cette dernière adaptation.
Et c’est bien un des points positifs qu’il faut souligner sur ce film, le traitement de Jean Grey est plutôt pas trop mal fait. Il faut sortir les pincettes pour argumenter mais disons que son évolution fait sens, et le film essaye réellement d’en faire le personnage principal. On la trouve tantôt fragile, perdue, acharnée ou violente, mais le tout dans une cohérence qui tiendrait presque du miracle quand on remet en perspective la production du film. Et elle n’est pas la seule, car même si la plupart des acteurs ne suivent pas, certains personnages tiennent la route. Notamment Xavier, particulièrement impacté par son rôle paternel envers Jean Grey, mais également Magnéto (il faut mentionner Fassbender, complètement absent lui aussi) qui démontre une impuissance rare face à tant de cruauté. Ce qui fait finalement tenir le film debout, ce sont ces personnages.
Et il y a le cas Bryan Singer, qui paye son passé borderline et dont le studio devait se débarrasser alors qu’il avait repris le fil conducteur de la saga. En résulte un nouveau venu derrière la caméra, qui est certes un historique de la franchise, mais surtout, qui n’est pas un réalisateur. Simon Kinberg est un scénariste (auteur notamment de films formidables tels que Les 4 Fantastiques de Josh Trank ou encore X-Men : L'Affrontement final (le bougre était déjà là, les gens n’apprendront jamais...)) et son inexpérience de metteur en scène est criante, notamment quand il s’agit de filmer l’action (pour le reste, on s’en doutait, c’est d’une platitude absolue). Et n’oublions pas que c’est tout de même un film qui a été tourné il y a presque 2 ans maintenant, et que les nombreux reshoots, suite au rachat de Disney, viennent logiquement ébranler une structure déjà bien branlante. En cause de ces reshoots, on peut évidemment mentionner le climax final, trop proche, selon les exécutifs, de celui de Captain Marvel, et qui se déroule dans un train (et qui pue la production express) alors qu’il devait se dérouler dans l’espace. On se retrouve avec une séquence mal filmée, mal chorégraphiée, et pénible à regarder.
S’étendre plus sur le film n’est pas très pertinent, tant l’attention qui lui est porté, par, littéralement, tout le monde (Disney, le service communication, la presse, le public etc…) est proche de zéro. X-Men Dark Phoenix aurait pu donner quelque chose d’intéressant. Conclure sur cet arc narratif si important dans l’histoire des Comics est un pari très risqué. Mais la pression des studios, et le statut de sacrifié qu’a revêtu le film dès son lancement ont fini d’achever une saga qui s’était déjà égaré il y a 3 ans avec Apocalypse.