Chère Maribel,


Je t'aime. J'ai même pas envie de te dire bonjour, tant j'ai envie de te dire je t'aime. On me taxera de sexisme mais je crois que c'est ça une actrice, pour moi : une femme dont je tombe amoureux. Je me fous qu'elle soit belle, en vérité, je veux seulement qu'elle fasse battre mon coeur. Et pour tout te dire, Maribel, mon coeur tu l'as fait battre à l'en mener proche de l'explosion. Déjà, une femme qui parle espagnole parle la langue secrète de mon âme. Roule un seul "r" et je suis à toi. Je pige rien à l'espagnol, entendons-nous bien, mais je te comprends, toi, quand tu parles.


J'aurais voulu rouler avec toi dans ce Mexique pauvre mais authentique, comme on dit quand on vient d'un pays riche et pas authentique. J'aurais voulu, comme ces deux petits salopards, céder à ton érotisme absolu, me plonger dans tes bras comme on fait un grand saut dans le vide, dans un gouffre sans fond mais prometteur de plaisirs sans fin. Jamais l'érotisme n'avait été si bien rendu qu'ici, avec toi, sur les routes du Mexique. Jamais non plus je n'avais tant aimé voir la jeunesse filmée, elle qui m'agace souvent à force de postures et de manières. C'est peut-être grâce à toi, justement, que tout est si réel dans ce film. Parce qu'on ne peut rien feindre à ta vue, qu'on ne joue ni le désir ni l'amour face à ce que le désir et l'amour ont de plus concret : toi. Je me suis dit que ce devait être délicieux que d'être jeune à tes côtés. Je repense à cette main tendre que tu poses sur la tête du pauvre Julio qui a jouit trop vite, emporté fatalement par ta beauté latine, sans doute tétanisé dans un bonheur terrifiant en goûtant ta peau qui, je n'en doute pas, a le goût du sel de la mer. De toute façon, Maribel, ça aurait été trop rapide. Même mille ans, même dix mille ans en toi passent en une seconde. Tu les a rendu fous, ces deux gamins qui découvrent encore leurs bites avec ébahissement, certains d'avoir entre les jambes l'assurance de ne jamais être trop malheureux. Tu les a rendu fous et tu m'as rendu fou.


J'aurais voulu que ce soit moi qui t'emmène à la Boca del Cielo, j'aurais voulu être là, sur le sable, tout proche de toi. Je sais que tu le sais, je l'ai vu : tes seins pointaient vers mon coeur.


Maribel, je t'aime. Je t'aime parce que tu es de la plus glorieuse race de femmes qui existe : les pas farouches. J'ai toujours pensé que c'était les femmes pas farouches, pas avares de leurs corps (avec qui elles souhaitent le partager, évidemment) et de leur beauté qui étaient les vraies puissantes, les vraies glorieuses. Les cachottières, les blocs de glace, les petites princesses Disney, je ne leur trouve aucun prestige, je ne vois aucune grandeur à leur haine des lèvres qui claquent. J'aime les vigoureuses, les folles furieuses, les excessives. Elles parlent souvent espagnol, ces filles-là, figure-toi. J'en sais quelque-chose.


J'aurais voulu et j'ai roulé avec toi, Maribel. J'aurais voulu et j'ai couché avec toi, Maribel. J'aurais voulu et j'ai aimé avec toi, Maribel. J'aurais voulu et j'étais là, Maribel. Tout du long. C'est ça aussi le cinéma. On sait plus bien où on se trouve. C'est la magie du cinéma et celle des femmes comme toi, Maribel. Je te pardonne de m'avoir fait pleurer en apprenant la raison de ton envie farouche de voyage et de baise. Je te pardonne de ne m'avoir rien dit, rien qu'à moi, pour que je puisse au moins t'aimer comme un dit adieu : lentement, très lentement. Je te pardonne tout parce qu'on pardonne tout quand on aime, et surtout quand on aime comme je t'aime, Maribel.


Un jour, peut-être, j'irai au Mexique, sur la Boca del Cielo. Et je t'y verrai même si tu ne seras pas là. C'est la magie du cinéma. C'est ta magie à toi, Maribel.


Amoureusement.

Ruru_
9
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le 30 juil. 2016

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