En temps normal, cette comédie « des banlieues » serait probablement passée sous le radar, la faute à scénario très prévisible. Toutefois, l’actualité brûlante met en lumière la justesse avec laquelle ces problématiques délicates sont abordées dans ce film.

Trois pré-ados (Diamadoua Sissoko, Abdelmadjid Guemri, Yanis Salliot) tournent un clip de rap « selon les codes du genre », c’est-à-dire avec une mise en avant vulgaire d’argent, de drogue et d’armes, ce qui crée un scandale national, bien au-delà de leur banlieue parisienne. Pour les médias, les coupables sont évidents : ce sont leurs parents ! Leurs mères (Zaho, Claudia Tagbo, Sophie-Marie Larouy) décident alors de tourner également un clip de rap pour répondre aux frasques de leurs enfants et créent elles aussi un phénomène national.

Quand les ados dérapent, les mamans rappent. Cette phrase d’accroche de Yo Mama annonce la couleur : ce n’est pas une comédie extraordinaire et le film se repose beaucoup sur l’argument de son intrigue, soit le décalage entre ces mères de familles et les codes du rap. Au-delà de ce prétexte, il n’y a pas vraiment de quoi se dilater la rate ni se passionner pour un scénario très prévisible. Pourtant, alors que l’actualité des banlieues françaises est encore brûlante, le film a un gros mérite. Il parvient à raconter la vie de ces cités sans sombrer dans des clichés fantasmés, ni dans un angélisme bien-pensant artificiel. Mieux, ils arrivent à vulgariser les multiples composantes qui s’entremêlent derrière le rap. Ce gros exploit est probablement dû au passif des deux coréalisateurs qui connaissent bien le milieu du hip-hop ainsi que le terreau social qu’ils mettent scène. Leila Sy, journaliste spécialisée, ex-compagne de Joey Starr, a réalisé plusieurs clips notamment pour le rappeur Kerry James. Amadou Mariko quant à lui est originaire de Sarcelles, la commune dont il est question dans le film. Ensemble, ils arrivent à concevoir une fable qui, malgré son positivisme affiché, n’évitent pas les problématiques liées à l’émancipation sociales et féministes qu’on retrouve dans ce type de grandes cités françaises. Alors certes, ces thématiques sont abordées très superficiellement et on peut regretter qu’elles ne soient pas plus approfondies, mais cette « légèreté » permet aussi d’éviter aux auteurs de se prendre les pieds dans le tapis de la complexité sociologique du sujet. Après tout, Stomy Bugsy maire de Sarcelles ? Pourquoi pas !


el_blasio
6
Écrit par

Créée

le 30 juin 2023

Critique lue 1.4K fois

5 j'aime

el_blasio

Écrit par

Critique lue 1.4K fois

5

D'autres avis sur Yo Mama

Yo Mama
Cinemaxipotes
7

Avant qu’elle rappe

Si ce n’est pas l’école qui a dicté nos codes, alors qui ? Lorsque leurs trois fils de onze ans sortent un clip de rap dont les violentes paroles font pâlir les animateurs réactionnaires de BFM TV,...

le 20 juil. 2023

4 j'aime

Yo Mama
flowrak
4

Critique de Yo Mama par flowrak

Encore une vieille comédie française sur la banlieue française, mélangeant rap, jeunes enfants rebelles... Yo Mama, réalisé par Leïla Sy et Amadou Mariko, qui pour la première a offert le plutôt...

le 14 janv. 2024

2 j'aime

Yo Mama
Cris68
10

Un film à voir

Ce film est un bijou, il parle aux gens et les personnes ressortent du cinéma heureuses.Ca fait du bien de rire, de pleurer, tout en chantant des superbes chansons.Le casting est top, les actrices...

le 8 juil. 2023

2 j'aime

2

Du même critique

Don't Look Up - Déni cosmique
el_blasio
5

Don't Watch Up

Malgré un postulat malin et bien-vu, cette farce s’avère être finalement assommante et répétitive. Un casting prestigieux et beaucoup d’agitation pour pas grand-chose. Cela fait une vingtaine...

le 10 déc. 2021

74 j'aime

4

Jamais plus – It Ends With Us
el_blasio
5

La vie en pas si rose

Cette romance impose à son public le même phénomène que vit son héroïne : la dissociation cognitive. Des clichés à la pelle, un cinéma très illustratif, un scénario digne d’un roman de gare… pour...

le 14 août 2024

17 j'aime

Love Lies Bleeding
el_blasio
8

Gym Tonic

L’émancipation du patriarcat est au cœur de Love Lies Bleeding (de Rose Glass, USA, Royaume-Uni), célébrant le retour aux affaire de Rose Glass. La réalisatrice avait déjà fait forte impression avec...

le 7 mars 2024

14 j'aime