Zombi Brain
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le 16 juin 2019
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Bertrand Bonello est un habitué de Cannes. Autant présent dans la compétition officielle (Tiresia, l'Apollonide) qu’à la Quinzaine (De la guerre), ses œuvres se retrouvent souvent dans une des sélections proposées par ces deux festivals. Zombi Child ne déroge pas à ce constat puisqu’il fait partie des long-métrages retenue pour la 51éme édition de La Quinzaine des Réalisateurs.
Le film se divise en deux récits. D’un côté, nous suivons chronologiquement le parcours de Clairvius, ses péripéties. De l’autre, Mélissa, étudiante au pensionnat de la Légion d’honneur à Paris, nous narre le passé de sa famille. De ce fait, plus la bobine se déroule et plus nous convergeons vers un instant précis de leur Histoire.
L’auteur avance donc en mettant, en parallèle, leurs trajectoires. En œuvrant de la sorte, les situations de l’un permettent de rentrer en résonance avec celles vécues par l’autre. Un choix vital pour créer une dynamique à l'ensemble.
En effet, la contemplation, le non-dit ou l’utilisation d’une voix off sont une partie des outils dont se pare Bertrand Bonello. Ce procédé crée un rythme, de primes abords, lent, sans qu’un fil rouge ne soit clairement défini. En agissant ainsi, le réalisateur nous permet de nous familiariser avec ses protagonistes, à analyser leurs comportements et leurs interactions.
Bien que l’œuvre se focalise sur Mélissa et Clairvius, les personnes gravitant autour d’eux sont étoffées. Ils ont suffisamment de consistance pour créer des échanges constructifs et éviter ainsi de se retrouver trop en retrait face à ces deux individus.
Cette étape est nécessaire pour que les intentions de l’auteur soient concrétisées. En effet, les cheminements de ce duo mettent en exergue comment des facteurs externes nous rendent étrangers autant en nos terres qu’ailleurs.
Pour comprendre pleinement les évènements qui se jouent, il est important de souligner un fait propre en Haïti. La zombification haïtienne a une définition bien différente de celle popularisée par la pop-culture américaine. Il existe trois types de zombis : le toxique, le psychiatrique et le social.
Dans Zombi Child, il est question de la première catégorie. Cette sentence est infligée à des individus jugés néfaste à la société (violeurs, assassin, …). Il est possible qu’un citoyen lambda en soit la victime pour des raisons d’intérêts familiales. Nous découvrons donc comment Clairvius est exclu brutalement de la vie en communauté et le business qui se cache derrière ce phénomène. L’homme devient ainsi étranger en ses terres car sorti du système et oublié de ses pairs.
La situation de Mélissa est diamétralement opposée. Exilée en France, elle goûte au confort offert aux futures élites de la nation. Pour autant, de par son passif et ses croyances, elle doit se créer une image en adéquation avec les us et coutumes de la métropole.
Leur objectif est donc le même, ils ont été mis au ban de leur société et vont devoir trouver une solution pour la réintégrer.
De par son approche, Bertrand Bonello offre donc une œuvre exigeante, se dévoilant lentement et gratifiant le spectateur d’un final empli de fureur, de larmes et de cris. Zombi Child est une odyssée naviguant entre deux Mondes : celui des Vivants et celui des Morts ou celui des parias et celui des citoyens "intégrés". Un voyage déroutant et fascinant qui laissera certains sur le bord de la route et récompensera les plus téméraires.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes "Trois jours à Cannes" 2éme édition : ma sélection et Quinzaine des réalisateurs 2019 : Longs métrages
Créée
le 10 juin 2019
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