C'est réjouissant de voir Disney s'aventurer, de temps à autres, sur un territoire scénaristique qu'il n'a pas l'habitude de fréquenter. Car Zootopie est construit sur une enquête policière aux légers accents de Flic de Beverly Hills ou de film noir, dans lequel évoluent une lapinette fliquette rookie et un gentil maître renard arnaqueur. Cette intriguante odyssée est rondement menée, permettant d'injecter des thématiques très adultes telles que l'utilisation de la terreur et de la paranoïa actuelles ou encore de la manipulation des médias.
Zootopie bénéficie aussi d'une direction artistique au poil et d'une beauté de tous les instants. Un véritable ravissement pour les mirettes. Dommage cependant que cette ville cosmopolite ne soit pas plus exploitée, alors que sa présentation dessine le temps de quelques secondes une multiplicité et une variété de décors qui auraient à coup sûr dépayser le spectateur.
L'action n'est pas en reste : elle est entraînante, stylée et agréable, tout comme l'humour qui navigue entre les situations tordantes, des personnages au cordeau et des références constantes. Il est juste un petit peu regrettable de constater que malheureusement, aucun passage ne se hisse à la hauteur de ce qu'on avait vu dans la bande annonce, avec ce paresseux qui a tout l'air d'être une sacrée flèche.
Mais Zootopie, par certains aspects, est bel et bien un film Disney, symptômatique du fait que le studio aux grandes oreilles n'a pas encore tout à fait fini sa mue. Parce que son enquête policière, le film ne l'exploite pas totalement alors que c'est son atout numéro un. Tout comme son duo improbable immédiatement attachant. Parce que Disney a cru bon "d'aérer" son récit avec son message typique sur l'acceptation de la différence et le fait de croire mordicus en ses rêves. Non pas que je sois devenu un vieil aigri, mais ces thématiques sont assénées avec tellement de simplisme, sans la moindre nuance, que cela peut agacer. Et surtout trancher de manière assez nette un film qui, même s'il fait évoluer des animaux pour se mettre à la portée de son public cible, en profite pour se parer d'un discours beaucoup plus mature et qui fait expressément référence aux névroses et aux peurs d'un monde dans le lequel nous vivons dorénavant.
Ce défaut a pour conséquence de faire parfois sortir du film, alors que l'ambiance enquête intrigue et intéresse pourtant jusqu'à un final bien vu et maîtrisé. Jusqu'à faire penser par instant, que l'on sent que Zootopie fait bien 1H50. Ce léger problème de rythme se ressent aussi lors de certaines séquences. Comme le running gag avec l'appli concernant cette gazelle chanteuse qui ne sert finalement, comme on le subodorait depuis longtemps, qu'à faire la promo gratos du nouveau single de Shakira dans une scène finale de concert inutile. Tout comme En Route, chez DreamWorks, roulait pour Rihanna en tapinant afin d'essayer de refiler quelques palettes supplémentaires de ses CD de chants de salle de bain. Si dans ce nouveau film Disney, ce joint venture est moins envahissant, il ternit cependant le pedigree d'une oeuvre qui n'en avait à aucun moment besoin.
Zootopie, au final, est un produit agréable à suivre, à la technique irréprochable et mettant en scène un duo de personnages animal friendly ultra attachant. Dommage seulement que les thématiques qu'il aborde peinent à être traitées avec le même ton et la même attention. Mais Zootopie emportera à coup sûr l'adhésion et fera passer un bon moment à son public. Le charme Disney continue d'opérer.
Behind_the_Mask, qui n'aime pas les chansons gratuites dans les films d'animation.