Nouvelle licence originale dans le "Disney Cinematic Univers", Zootopie s'impose comme une des plus belles réussites du studio depuis plusieurs années. Structuré autour d'un monde original, le film propose différentes lectures et se permet de venir chatouiller son cousin Pixar sur son propre territoire. Après le très surestimé Vice-versa, l'animation étasunienne propose enfin un divertissement équilibré, fédérateur et enthousiasmant.
Zootopia est construit autour du couple Judy/Nick. Elle, lapine dynamique qui veut contre l'idée générale, devenir agent de police. Lui, arnaqueur flegmatique qui prend sa revanche sur la société. Duo asymétrique et complémentaire, il s'appuie sur les différences de chacun pour mieux développer ses arguments. On a jamais vu de lapin policier, un renard ne peut être qu'un truand. Tout au long de l'intrigue, le film déconstruit les certitudes pour aboutir à une conclusion infusée de tolérance et de préjugés cassés. Judy et Nick porte le fardeau de leur espèce, ils évoluent dans cette société où les castes sont uniquement bâties sur les différentes « races » animales. Moutons serviables, tigres, rhino et buffles policiers, lion maire, ours blanc gardes du corps et musaraignes mafieuses. Le parallèle avec la société humaine est amusant et donne parfois des analogies réjouissantes comme la fameuse scène des paresseux ou des loups hurleurs.
Judy et Nick possèdent également des personnalités plutôt affinées, au-dessus de la moyenne caricaturale disneyienne. Il en découle des dialogues envolés où les subtilités et les références peuvent décrocher le jeune public. Ce jeu du chat et de la souris entre nos deux héros fonctionne très bien et puise dans la tradition du film à duo improbable et complémentaire. Judy et Nick proposent des personnages qui se construisent tout le long du film et cette progression se fait de manière très fluide. Sans employer un ton trop démonstratif ni avoir recours aux clichés du genre, Zootopia créé la surprise et parvient sans cesse à se renouveler. Véritable budy movie d'animation, il se dégage par instants de légères fragrances des 80's.
Un autre aspect qui tire le film vers le haut des productions actuelles est qu'il possède une vraie intrigue. Contrairement à un Vice-versa uniquement élaboré autour d'une suite d'idées sans véritable lien, Zootopia développe une histoire prenante construite comme une enquête de police. Le scénario est parfaitement maîtrisé, il enchaîne les éléments propres à l’enquête et l'évolution du couple Judy/Nick. Si le dénouement ne brille pas par son originalité, il reste efficace sans tomber dans la redite. On se retrouve ainsi avec une belle sensation de fraîcheur une fois le générique de fin enclenché.
Sur le plan technique et artistique, le studio fait un sans faute. Zootopia est une cité vivante où toutes sortes de détails nous éblouissent à chaque plan. On se croirait chez Pixar tant la ville semble cohérente dans son fonctionnement. Les trouvailles visuelles sont en abondances sans jamais provoquer d’écœurement, l’identité graphique est homogène, parvenant à faire cohabiter intelligemment des animaux anthropomorphes au sein d'une société « humaine ». Mais la grande réussite technique tient au rendu des expressions. Le jeu des regards est saisissant, les émotions exprimés par les « acteurs » facilement déchiffrables sans être grossière ni trop caricaturales. La mise en scène dynamique arrive à concilier moments intimistes, scènes d'action pêchues et gags irrésistibles.
Zootopia est une franche réussite qui apporte un élan de renouveau dans les productions Disney. Moins prétentieux que certains de ses aînés, il arrive à contrôler les travers inhérent à sa marque de fabrique. L'ensemble est beaucoup moins didactique, le message moins moralisateur et la narration plus subtile. Le film réussit à s'adresser à tout les âges, proposant une lecture à plusieurs niveaux qui flatte plus la réflexion que le sens moral.