XCOM: Enemy Within
8.2
XCOM: Enemy Within

Extension de Firaxis Games, Inc. et 2K Games (2013PC)

Note : c'est une critique du jeu entier, pas de l'add-on pris isolément.


Je ne voulais pas l'acheter, l'original est le meilleur jeu de tous les temps, passé et futur (le Dr me l'a confirmé) et reste largement jouable malgré les deux décennies qui nous séparent de sa sortie. Puis je me suis laissé convaincre, la perspective d'arrêter de saigner devant une 3D isométrique moche était alléchante, il faut bien l'avouer. La perspective de le récupérer lors de soldes Steam aussi, forcément.
Qu'avons-nous là ?
Un excellent jeu assurément. Un jeu dont l'aspect tactique est bien plus développé (que l'original, ne cherchez pas, je vais passer toute ma critique à le comparer à l'Auguste), dont l'aspect stratégie/logistique a été un peu relégué au deuxième plan.
Est-ce que c'est grave ? Oui.
Est-ce que c'est gênant ? On verra. Il va falloir décortiquer tout ça, et donc pinailler à l'extrême. On peut aussi passer directement à la conclusion, car cette critique est longue.


Gestion de la base


La gestion de la base est franchement simplifiée. On peut donc considérer qu'en voulant sabrer dans le gras du premier (jeu parfait sans le moindre bout de gras, je vous rappelle), on a tranché dans le muscle. Si je suis de bonne humeur, je dirais plutôt qu'on a réduit le nombre de choix possible en évitant les choix moins utiles. La gestion des stocks de grenades ou missiles Air-Air n'avait pas grand intérêt, cette fonctionnalité ne manquera pas.
On n'aura pas à se poser des questions aussi existentielles / futiles que "Combien de scientifiques je peux me permettre d'avoir, sachant qu'il me faut tant d'ingénieurs pour assurer une production permanente d'armure (pour couvrir les pertes) et de pistolet laser (pour faire du cash), et quand devrais-je envisager une extension de l'espace disponible ?" ou encore "Pour construire ce vaisseau, est-ce que je taille dans les effectifs des chercheurs, construit un deuxième atelier, recrute massivement des ingénieurs quitte à les virer après pour avoir mon avion au plus vaisseau au plus vite, ou bien est-ce que je réduis la cadence de production des autres items tout aussi indispensable, ou bien est-ce que j'accepte que la production s'étale sur plus d'un mois ?".
On fera plutôt des choix de missions pour privilégier un aspect ou l'autre, on optimisera l'implantation des différents éléments de la base. C'est simple, c'est efficace, mais ça n'est pas le même jeu.


Personnages


Au premier abord, la possibilité de personnaliser ses personnages semble une idée moderne, inutile, dans un genre qui s'en passait bien. Regarder ses personnages évoluer, identifier ses faiblesses et forces, les armer en conséquences, on pouvait déjà le faire. Untel est plus rapide, untel est un excellent lanceur, les pouvoirs psy d'untel sont largement supérieurs à la moyenne ; en fonction de tout ça, on armait ses gars et on se préparait. Quand l'un était blessé, on essayait d'identifier lequel des autres pouvaient le mieux le remplacer.
C'était parfois fastidieux, c'était pas si utile que ça car la différenciation opérait surtout au niveau du grade plus que dans les stats, on pouvait s'en passer. Le joueur motivé avait sa fonctionnalité cool, le joueur moins intéressé pouvait se contenter d'aligner tout le temps la même équipe, tout le monde s'y retrouvait parce que seuls les niveaux de difficultés les plus élevés justifiaient une gestion aussi fine.
Maintenant ? Le système de personnage est devenu rigide avec des personnages enfermés dans un système de classe. Le bon côté c'est que ce qui était parfois fastidieux est devenu limpide ; untel est un commando, il bourre, untel est grenadier, il explose des trucs. Le système n'est malgré tout pas frustrant grâce aux choix que le joueur conserve pour donner une certaine orientation à ses personnages.
Le revers de la médaille c'est que le jeu perd en profondeur. On ne peut plus improviser sur le champ de bataille, on ne peut plus récupérer le lance roquette laissé par un personnage trop blessé.
Les choix faits en amont, à la fois lors de l'évolution des personnages mais aussi lors du choix de l'équipe deviennent donc cruciaux.
Si seulement ces choix n'étaient pas largement faits à l'aveugle...


Les missions


Bien évidemment le gros point fort du jeu, les missions sont bien plus agréables à jouer, tout aussi stressantes ; l'interface est évidemment bien plus soignée, plus limpide. Devoir gérer une plus petite équipe est une surprise, mais n'est pas un problème, on peut encore plus facilement s'y identifier et mettre au point la tactique.
La grosse différence, c'est le remplacement des unités de temps par un concept issu clairement du jeu de rôle papier, type "un personnage peut faire une action complexe ou deux actions simples". Ce choix a probablement été dicté par une volonté de simplifier les interactions entre les différentes actions des différentes classes, il réduit malgré tout le panel d'actions possibles pour un personnage.
La variété dans les types de missions évite la lassitude et met à l'épreuve notre capacité à faire les bons choix, sur le terrain et dans la phase de préparation.
Cette phase est a priori frustrante, les choix sont bien plus contraints - mais au final, ça participe à l'expérience de jeu, ça rend la préparation bien plus importante. On ne peut pas se contenter d'y aller avec toujours le même matériel, on va devoir prévoir ce qu'on va faire et comment on va le faire sur le terrain. Frustrant pour un ancien, mais faire des choix c'est l'essence d'un jeu, non ?


Economie du jeu


Cette partie de la critique est évidemment la plus sensible. L'économie d'un jeu, c'est probablement la moitié de son intérêt ludique, et pour un jeu de gestion, la totalité.
Cette partie sera donc probablement retouchée, au fur et à mesure que j'avancerai dans le jeu et que j'expérimenterai les différentes possibilités qui sont offertes au joueur.
L'économie, c'est la gestion des ressources, et dans X-Com (outre quelques fioritures) il y en a deux : le temps et l'argent, en sachant que comme le dit le proverbe, "le temps c'est de l'argent". Si l'original nous demandait de gérer les stocks de façon anecdotique et bien plus concrètement nos ressources humaines, cette micro gestion est un peu laissée aux oubliettes.
Ici, il faudra donc gérer ses recherches/constructions de base de façon à accéder au matériel le plus évolué en fonction de nos priorité. Équiper nos hommes ou nos vaisseaux ? Combien de satellites, à quelle vitesse les déployer, pour couvrir quelle surface ? Trouver le bon équilibre entre production et recherche, pour éviter de se retrouver avec du matériel qu'on ne peut acheter par manque, ou une équipe complètement équipée d'un matériel inférieur ?
Il est possible qu'une martingale soit trouvée au fur et à mesure des parties permettant d'avancer régulièrement sans perdre de temps, mais d'ici là le joueur tâtonne, procède par essai/erreur, corrige ce qui lui a manqué dans la partie précédente pour mettre en place la meilleure économie.
Et ça, c'est une économie qui fonctionne.


Scénario


X-COM: UFO Defense était largement un bac à sable. Les aliens réagissaient à vos actions, vous réagissiez aux leurs, le jeu n'était pas scripté mais devait toujours se terminer de la même façon ; aux petits OVNI succéderont les gros, plus les très gros et les bases aliens, pour finir sur Mars. Il peut donc y avoir répétition des missions : avant de parvenir à capturer un leader Ethereal vivant, on devra faire et refaire des missions sur les plus gros types de vaisseaux. Et même si aucune mission ne ressemble vraiment à une autre, une lassitude pouvait s'installer, que venait compenser le stress inhérent à chaque contact avec un alien.
Son remake est un jeu à scénario, entrecoupé de parties aléatoires. Les choix sont larges, on fait les choses dans l'ordre dans lequel on peut/veut, mais il n'y a pas cette sensation d'être seul maître à bord. Cela permet malgré tout une grande variété dans les missions puisqu'elles peuvent être uniques et avoir un autre objectif que "trouver et tuer".
La présence d'un scénario enrichit donc clairement le titre ; il contraint un peu le joueur à le suivre, en contrepartie d'une plus grande variété dans les possibilités offertes, tant dans le choix des missions que dans les différentes missions possibles.


Ambiance


Si la direction artistique de X-COM: UFO Defense n'a pas à rougir de ses 20 ans, il ne fait aucun doute qu'il était nécessaire de remettre le jeu au goût du jour sur ce point ; c'est fait, et c'est une réussite. L'ambiance d'un jeu de lutte contre la vermine alien est bien là, l'inspiration évidente de SG dans la conception de la base ne pose aucun problème, et du côté des missions, la musique contribue parfaitement à la montée du stress, l'ambiance sombre et désespérée est parfaitement retranscrite à l'image.
Si on peut (et au point où j'en suis de pinaillage, on doit :) ) s'interroger sur la pertinence des cinématiques de décollage / atterrissage des vaisseaux, les autres animations de bases collent au scénario (l'écran qui se referme sur l'interrogatoire d'un alien, j'aime beaucoup).
Reste une interrogation sur les cinématiques dans les missions. Le gros plan sur les aliens quand on en découvre, il me semble que ça casse un peu l'ambiance, parce qu'ils ont plus l'air d'être surpris en pleine partie de belote qu'en train de mettre à exécution leur plan de conquête du monde. Idem pour les sprints, une vue à la troisième personne pousse à s'identifier au personnage - mais moi, je ne suis pas le personnage, je suis le responsable de l'escouade !
Pour certains joueurs, ça doit pousser à l'immersion à se mettre dans la peau des soldats et que c'est une identification désirée ; j'ai trop l'habitude de voir mes bonshommes comme des pions pour que ça fonctionne sur moi.


Conclusion


Ce jeu est à mettre entre toutes les mains d'amateurs de jeux tactiques, stratégiques, de la licence X-Com, y-compris les fans absolus du jeu original. Pour ces derniers, cela leur permettra au moins de réaliser que ce jeu a beau être le meilleur jeu de tous les temps, il n'en reste pas moins perfectible, et que sur certains aspects ce remake lui est supérieur, et que bien souvent il ne lui est pas inférieur. La simplicité n'est pas un gros mot, contraindre le joueur à choisir est une décision parfaitement acceptable en terme de conception de système de jeu, contraindre le joueur à être libre en est une autre. Les deux approches sont intéressantes, après c'est une question de goût.
Ce titre offre clairement une approche plus orientée vers la tactique et la mission est le cœur du jeu. La direction artistique nous pousse à l'identification avec nos bonshommes, la petitesse de l'équipe aussi ; la musique fait monter le stress, des cinématiques nous plongent dans l'ambiance ; l'interface épurée, la limitation des possibilités de gestion du temps réduisent nos possibilités à l'essentiel, sans nous laisser le temps de nous perdre dans des considérations plus calculatoires.


À un niveau plus personnel, je me demande si je ne vais pas reprendre ma critique de X-Com: Ufo Defense, puisqu'elle est faite, en filigrane, dans celle de son remake.

Créée

le 9 déc. 2014

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Pierre Marot

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