Quand il s'agit de survival-horror on a, passé un temps, tendance à les trouver prévisibles. C'est qu'on s'obstine à les désamorcer, on essaye d'anticiper ; pour enrayer, instinctivement, les procédés qui essayent de nous faire vivre une forme d'inconfort. Avec Amnesia c'est loin d'être aussi simple. La vue à la première personne change tout. Il n'y a plus cette distance caractéristique des jeux à la troisième personne, celle qui permet à tout moment de nous dissocier des évènements. Une sorte d'osmose s'établit avec Daniel, notre ignorance, son amnésie. Quand il a peur et ne comprend pas, un frisson parcourt l'échine et le jeu nous accapare, captivé, immobile.
Le jeu de la caméra, les murs qui se rapprochent, l'évolution et la distorsion de l'environnement rendent parfaitement les sensation d'angoisse et de panique. On a l'impression d'observer directement les évènements lorsque les yeux de Daniel s'habituent au noir, ou quand des insectes s'y incrustent insidieusement : une hallucination, parmi d'autres à venir, et à laquelle on ne peut rien faire. L'angle de vue très limité offert par la première personne implique le joueur et le force à faire face aux évènements, ou à les ignorer, quand il s'agit de tourner la tête.
(...) Amnesia, dans le prolongement de Penumbra, pourvoit consciemment de nouveaux horizons et fait du joueur un nouveau né, vulnérable, désemparé, inapte à vaincre les ennemis. L'effet est à ce point saisissant qu'il prodigue une vraie redécouverte du genre, et marque les esprits – elle manque, cette fichue frousse – tout en prouvant, s'il le fallait encore, que de beaux graphismes ne font pas tout.