Saletés de limaces !

Another World, c'est d'abord la légende d'un jeu développé tout seul à la maison par le désormais célèbre Eric Chahi. Mais c'est aussi, et surtout, un monument du jeu 16 bit.

En le lançant, le premier choc est d'ordre graphique. Grâce à cette sublime et cultissime introduction, on est plongé dans le bain. On nous prépare déjà à une aventure qui sera indéniablement froide et impitoyable. Puis en un clin d'oeil, on arrive sur le tableau du jeu. Et si on ne réagit pas dans la seconde, c'est déjà la mort, noyé et dévoré au fond de l'eau par une drôle de créature tentaculaire. Car aucun cadeau ne vous sera fait dans cet autre monde étrange et fascinant. Le moindre pixel qui bouge à l'écran est susceptible de vous tuer.
Et c'est donc dans ces terres inhospitalières que le jeu va se dérouler. On se retrouve très vite emprisonné par les autochtones pas très accueillants, avec un des leurs, puis une fois libéré, on trouve vite un pistolet. Pas très efficace vu le nombre d'ennemis mais il faudra faire avec pour s'évader de cet enfer...

Jamais aucun mot n'est prononcé dans Another World, si ce n'est tout au plus que quelques phrases dans un langage extraterrestre incompréhensible confiant au jeu un caractère mutique particulier que je n'ai retrouvé nul part ailleurs. Tout semble vouloir rendre ces terres nouvelles plus étranges et différentes, surtout les rendre de moins en moins accueillantes. Mais elles en restent néanmoins fascinantes. La découverte de chaque nouveau tableau sera à chaque fois accompagné d'un sentiment d'inconfort, et surtout d'une curiosité insatiable qui nous pousse à en découvrir plus sur ce monde étrange.
En plus de la claque graphique, Eric Chahi a en plus réussi à donner une véritable patte graphique reconnaissable entre mille. Les couleurs semblent jetés à l'écran à tel point que parfois on se croirait devant une peinture abstraite. Bien sûr les différents éléments du jeu sont parfaitement représentés afin de ne pas perdre le joueur, mais il n'empêche. Au final, ça ressemble peut-être un peu à des peintures de Nicolas de Staël (par exemple : http://www.senat.fr/evenement/phillips/images/de-stael_parc_de_sceaux.jpg ). Tout est parfaitement compréhensibles, mais il n'empêche qu'il y a quelque chose qui rend les écrans un tant soit peu mystique.

Totalement unique en son genre, Another World est un véritable bijou. Pour peu que l'on ne soit pas effrayé par sa difficulté un peu stupide qui fait de lui un véritable try-and-die, l'aspect immersif du soft est total. Impossible de ne pas succomber à cette aventure hors-normes avec plein de gros pixels.