Une alpha plus que prometteuse
NB : pour optimiser la bête, je vous renvoie à ce petit article sur mon blog http://blogs.wefrag.com/Mawwic/2013/03/07/arma-3-alpha-tweaks-premieres-impressions
Si j’ai toujours placé beaucoup d’espoirs dans la série des Arma, j’ai aussi dû - comme une bonne partie de joueurs - me débattre avec chaque titre. D’abord d’un point de vue technique ; mais aussi d’un point de vue gameplay.
En effet, je n’ai jamais vraiment réussi à retrouver mes marques, regrettant désespérément l’équilibre subtil du premier Operation Flashpoint, entre arcade et simulation. A tel point que les meilleurs moments que j’ai passés sur les Arma, ce fut avec le portage d’OFP sous le moteur d’Arma 1er du nom ; et si je dis portage, c’est parce qu’il s’agissait bien d’un import des fichiers du jeu d’origine - avec les configs relatives à la balistique, la physique etc. et toutes les répercussions que ça avait côté gameplay et feeling identique à l’original - et non pas juste d’un mod cosmétique.
Néanmoins, les ajustements apportées à la série que laisse entrevoir cette alpha pourraient bien me faire changer mon fusil d’épaule - et voilà pourquoi.
UN GAMEPLAY NERVEUX, QUI RENOUE AVEC UN BON COMPROMIS FUN / REALISME
A mes yeux, les deux premiers Arma se sont fourvoyés dans une quête illusoire d’authenticité, finissant par sacrifier le fun et la réactivité des gunfights sur l’autel du pseudo-réalisme. Le côté jeu tendait à disparaître derrière l’aspect simulation (l’influence du VBS, mené en parallèle ?). Ainsi, même Flashpoint proposait des contrôles moins pénibles, où le personnage était moins lourd et où chaque action s’effectuait avec moins de latence.
De ce côté, Arma 3 marque une très nette amélioration. On retrouve l’impression de diriger vraiment un perso’, et non plus une GoPro fixé sur un bidasse. En effet, les troufions se déplacent plus vite, sont plus réactifs ; on ne pâtit plus de ces conneries d’accélération et de lissage de la souris, qui ajoutaient de la latence (même la zone de flottement du viseur est désactivée par défaut). Les optiques sont mieux foutues, ce qui, combiné à une ballistique qui joue un peu moins sur les effets de courbes, rend les combats plus intéressants et expéditifs (plutôt que d’arroser sans cesse à côté), sans pour autant en sacrifier complètement la vraisemblance. On peut enfin avancer en épaulant l’arme sans pour autant avoir la gerbe. L’ajout de la physique donne un agréable feedback au joueur lorsqu’il fait un kill, là où avant, le temps de déclenchement des animations de mort laissait parfois planer un léger doute l’espace de quelques instants. Dégoupiller et lancer une grenade ne prend plus 2h et une animation molle. La conduite des véhicules semble également bien moins pénible (en partie grâce au moteur physique, j’imagine) - et les crashes en hélico pour la moindre manoeuvre deviennent bien moins fréquents.
Certains de ces changements vont en faveur de plus réalisme ; d’autres moins - mais l’essentiel n’est pas là. L’important, c’est qu’ils contribuent tous à redonner un sentiment de contrôle au joueur. Comme si les développeurs de Bohemia avaient enfin fini par se rappeler qu’un jeu, même à vocation réaliste, répond à des impératifs sensiblement différents d’une simple simulation crédible de la réalité.
UN ENVIRONNEMENT DE NOUVEAU LISIBLE POUR UN JOUEUR HUMAIN
Autre problème caractéristique des deux précédents Arma, et de leur souci de faire vrai : les environnements et la palette de couleurs (notamment pour les persos et véhicules) qui suintent le réalisme mais nuisent à la lisibilité de l’action (= les ennemis se noient dans les tons sur tons et l’aliasing). Une situation d’autant plus pénalisante que l’IA, elle, n’a pas ce problème. Ici aussi, Arma 3 semble avoir opéré des choix plus judicieux. Ainsi, l’environnement méditerranéen, un poil moins riche en végétation dense, offre une meilleure visibilité que la contrée verdoyante de Chernarus. Et les couleurs des tenues des soldats semblent cette fois-ci avoir été choisies en accord : ces derniers portent ainsi des uniformes qui vont du jaune foncé au marron, en passant par l’ocre ; tandis que le terrain donne en général plutôt dans des teintes claires, comme le vert jauni. Conséquence : sans pour autant rendre les troupes extrêmement voyantes, elles se détachent davantage sur le paysage, ce qui facilite la lisibilité de l’action, et rend les échanges moins frustrants. On est bien loin d’Arma 2 et de ses troupes en vert sur fond vert… Enfin, d’un point de vue purement esthétique, le design futuristico-réaliste de l’équipement des soldats force le respect : on reste dans le crédible, et on évite le syndrôme soldat-LCD des derniers Ghost Recon, par exemple.
UNE IA MIEUX EQUILIBREE
A défaut d’être devenue démentielle, l’IA semble plus cohérente et moins frustrante, du moins pour le mode standard. Quelques exemples : pour peu que vous utilisiez un silencieux et que vous vous teniez hors de la ligne de vue des ennemis, vous pouvez les descendre discretos même s’ils sont assez proches de leurs camarades (sauf si lesdits camarades voient leurs copains se faire descendre, bien sûr). Y compris en plein jour. Ce genre d’approche était jusqu’alors quasi systématiquement vouée à l’échec dans les précédents Arma, avec leur IA omnisciente. De même, passés 150-200m, l’IA ne vise plus de manière démentielle. Il lui faut ajuster ses tirs ; et pour peu qu’elle se mette à ouvrir le feu de vraiment loin, vous pouvez encaisser une ou deux balles sans mourir sur le coup (la puissance de l’impact diminuant avec la distance parcourue par le projectile). Sans pour autant transformer le jeu en tir au pigeon, cela ajoute un peu de dynamisme, en permettant au joueur de se créer plus facilement quelques opportunités pour passer à l’offensive, plutôt que de rester immobile derrière sa couverture de peur de se faire tuer au moindre poil qui dépasse. Là encore, c’est peut-être moins réaliste dans l’absolu ; mais dans le cadre d’un jeu, le gameplay en profite grandement.
UNE FOULTITUDE DE PETITS AJOUTS ET DE CORRECTIONS
Comme avec Skyrim, on sent l’influence de la communauté de moddeurs (ACE, notamment) derrière certaines nouveautés - et c’est tant mieux.
On a ainsi enfin droit à des pétoires avec des détonations dignes de ce nom, qui viennent compléter une partie sonore qui était sinon déjà de haute volée ; un système de “stance” intermédiaires et progressives (relativement simple à utiliser - même si j’aurais davantage vu ça s’ajuster via la souris plutôt que le clavier, comme dans Raven Shield et MoH: Airborne) ; la possibilité de s’administrer rapidement des premiers secours ; des armes équipées de deux optiques (courte et longue portée), entre lesquelles on peut switcher à la volée ; des bâtiments quasiment tous ouverts, et dont l’intérieur est enfin praticable (même si ça reste galère lors de l’ouverture des portes) ; des NVG où le HDR part moins en vrille, ce qui les rend davantage utilisables ; une partie combats sous-marins prometteuse, sans être une usine à gaz ; une interface plus claire et lisible (et aussi de meilleur goût) ; une faune enrichie (serpents, abeilles, lièvres, et multiples poissons dans les fonds marins)…
Mais surtout, la grande nouveauté d’Arma 3, c’est de bénéficier d’un moteur qui semble enfin relativement stable, sans chutes de frame rate inexpliquées à tout bout de champ.
LES GRANDES INCONNUES
Rien qu’en l’état, Bohemia tient déjà une solide plate-forme de jeu - qui contentera sans doute les amateurs de multi (soit la majorité des joueurs d’Arma).
Reste encore à s’assurer que les performances de l’alpha - qui se déroule sur la plus petite des deux îles prévues pour le jeu - se retrouveront une fois les joueurs larguées sur l’île principale, bien plus conséquente.
Mais ce qui fera la différence entre un jeu qui sera simplement le meilleur des Arma et un autre qui sera enfin le véritable successeur d’OFP, c’est la présence d’une campagne solo digne de ce nom (et pourquoi pas jouable en coop’) - avec cette subtile alchimie de missions savamment scénarisées, comportant juste ce qu’il faut de script et de linéarité pour insuffler du rythme à un jeu ouvert ; et cette mise en scène sobre et juste, propre aux campagnes de Cold War Crisis et de Resistance.
Si les missions solos fournies lors de cette alpha sont plutôt encourageantes (notamment celle du vol de véhicule, où on peut foirer la mission en rendant ledit véhicule inopérant, puis la sauver de justesse en trouvant un autre moyen de détruire les transports ennemis - dialogues radios ad-hoc pour chaque situation à la clef), elles ne garantissent pas pour autant que Bohemia ait là aussi renoué avec le feu sacré et tienne la distance sur le long terme. Wait & see, comme dirait l’autre.
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