As Dusk Falls propose une histoire interactive qui reprend la formule narrative introduite par The Walking Dead, le gameplay en moins.
Ici l'action se déroule à l'écran en clichés successifs, un peu à la manière d'un roman photo somme toutes. Personnellement je trouve ça un peu ridicule mais je veux bien reconnaître le parti pris ; ça donne incontestablement un genre, qui plaira ou pas.
Le joueur est invité à agir en choisissant entre les dialogues ou actions proposés (en temps limité ou non), et via des QTE basiques et sans difficulté. Je signale au passage que ces QTE sont également des choix et que rater délibérément (ou accidentellement mais c'est moins probable) ceux-ci ouvre certains embranchements. En début de partie mes réflexes de joueur ont fait que j'accomplissais ceux-ci spontanément, même quand l'action ne répondait pas vraiment à mon intention.
On l'aura compris As Dusk Falls est un jeu narratif. Et à ce titre c'est de mon point de vue un gros naufrage. On dirait que l'action se déroule dans un univers qui n'est pas tant le notre que le notre passé au filtre de décennies de cinéma américain (et pas le meilleur ! ). Au vu de la production cinématographique proposée par Hollywood ces dernières années j'ai du mal à dire lesquels des bons ou des mauvais scénaristes pointent au chomage mais, quoiqu'il en soit, ceux qui ont oeuvré sur le jeu font indubitablement partie des mauvais.
L'histoire est une accumulation de clichés grotesques. Considéré isolément chacun pourrait presque passer inaperçu dans une écriture d'ensemble de qualité. Sauf que le jeu multiplie les clichés jusqu'à un niveau invraisembable - c'est bien simple il n'y a rien d'autre. Le jeu ne semble pas tant s'inspirer d'un film en particulier que de TOUS les films pour un résultat improbable et risible : tout est télescopé et reproduit les poncifs éculés de la fiction US (encore une fois en déconnexion complète avec la réalité).
C'est à la fois tristement prévisible et en même temps surprenant car le jeu trouve le moyen de creuser toujours plus profond, même quand on entrevoit l'opportunité d'un mieux (le scission en deux livres est ainsi une occasion tristement manquée : les clichés du premier auraient pu former le socle d'une seconde moitié déconnectée de la première, avec un travail subtil sur les personnages survivants mais non, il se poursuit largement dans la continuité).
En ce qui concerne les embranchements ceux-ci sont clairement plus nombreux qu'il n'est d'usage dans ce genre de jeux, et débouchent sur certaines séquences vraiment différentes. Malheureusement cela ne suffit pas à sauver le jeu de la médiocrité, d'autant que l'écriture fait quand même intervenir de grosses ficelles dans les choix proposés : déjà pas mal de fausses alternatives et une vilaine manipulation dans la manière de présenter les choses pour orienter certaines séquences. Plus dommageable des alternatives absentes de manière injustifée et d'autres qui demandent de choisir avant de connaître les enjeux (ou alors que le personnage les connaît mais pas le joueur !) et sans possibilité de changer d'avis quand ceux-ci se révèlent.
De même l'enrobage dramatique à base de 'machin se souviendra de ce choix !' ou 'attention cette séquence est déterminante !' qui tend à devenir la règle ne fait qu'affaiblir l'écriture. A mon avis ce dispositif devrait être purement et simplement abandonné.
J'ai trouvé ça tellement mauvais que j'ai du mal à terminer sur une note positive. La structure du jeu est pertinente, je n'en doute pas, et l'effort apporté pour proposer des séquences alternatives consistantes est louable et généralement supérieur à ce qui se fait ailleurs. Mais l'écriture, à elle seule, en fait un gâchis complet, au-delà du fait que je vois personnellement de plus en plus les jeux à embranchements multiples comme une impasse. Je préfère les jeux avec une trame fixe mais qui laissent le choix de la manière dont on investit le ou les personnages et dont on résoud l'action. Il y a un tout petit peu de ça ici et la partie inconséquente ou triviale du jeu m'a semblé la plus plaisante au bout du compte.