Arkham Origins est le seul (enfin, presque, on y reviendra) des Batman Arkham à n'avoir pas été réalisé par Rocksteady. A la place, ce sont les canadiens de Warner Bros Montréal qui s'en sont chargés, histoire de laisser les développeurs principaux peaufiner l'arrivée du Chevalier Noir sur consoles next-gen (qui sont aujourd'hui de la old-gen, le temps passe).
Pour la peine, les suceurs de sirop d'érable ne prennent pas trop de risques sur le scénario : ce sera une simple préquelle et non une suite à City. L'action se déroule plusieurs années avant Asylum et nous raconte la nuit blanche la plus relou de la vie de Bruce Wayne.
En effet, notre pauvre chauve-souris est bien démunie. Non contente d'être traquée par la police (tout ça parce qu'on assomme juste l'intégralité du commissariat de Gotham en 10h de jeu, roh, c'est mesquin), sa tête a été mise à prix par un nouveau méchant : Black Mask. Celui-ci a en effet été embaucher toute l'équipe B de l'écurie DC pour assassiner Batman avant le lever du jour : des personnages aussi mémorables que Deathstroke, Copperhead, ton voisin électricien et un bourdon géant sont donc à la recherche de notre Batou adoré.
Au total, ce sont huit adversaires qui nous pourchasseront pendant tout le jeu, en plus d'une galerie de méchants annexes comme le Pingouin ou le Chapelier Fou (qui nous offre à nouveau une variante du combat contre l'Epouvantail d'Asylum, dans des décors assez classes). Bien évidemment, c'est Black Mask qui attire toute notre attention : qui est ce mystérieux homme qui contrôle la pègre ? Qui peut donc avoir autant d'argent ? Qui a pu concocter un plan aussi tordu ? Qui ? QUI ????
Bah c'est le Joker, voilà. On commence à être habitués dans cette série.
Soyons honnêtes, ça reste une interprétation assez intéressante du personnage. Il ne perd pas son temps avec des plans idiots qui réclament une logistique millimétrée ou une chance insolente, il se contente de faire sauter des immeubles. Une menace simple, précise et efficace (même si les scénaristes bottent en touche en nous faisant croire qu'il ne fait exploser que des immeubles inhabités), qui se paye le luxe d'être la toute première rencontre entre nos deux protagonistes. En plus c'est un plot-twist qui n'arrive que vers la moitié du jeu, donc ça laisse aux autres méchants le temps de faire leurs preuves.
Malheureusement, huit méchants ça fait quand même beaucoup de monde à introduire. Deux sont donc expédiés dés les premières minutes de jeu et deux autres sont relégués à des quêtes annexes (étrange puisque comme je le disais d'autres méchants indépendants du scénario sont déjà dans les quêtes annexes), seule la moitié d'entre eux s'illustre lors du scénario principal. J'ai la vague impression que le jeu a été pas mal rush pour pouvoir sortir à Noël 2013, ce qui expliquerait ce traitement très inégal au niveau des adversaires de Batou.
Ca se ressent aussi un peu dans les bossfights qui sont moins imaginatifs que ceux de City. Deadhsot et Bane sont des copier-coller de ceux contre Double-Face et Mr.Freeze par exemple, tandis qu'une bonne partie des autres combats sont de simples affrontements en arène. Le combat contre Jean-Bourdon est plutôt chouette, mais c'est le seul qui se démarque. On note au passage l'introduction de QTE qui nous avaient pourtant été épargnés dans les jeux précédents, ça ne fait pas spécialement plaisir.
Est-ce à dire qu'Origins est une version low-cost de City ? Pas vraiment.
Certes, le jeu reprend la formule en monde ouvert de son prédécesseur, et il réutilise même une partie de sa map (grosse erreur à mon sens, même si l'aire de jeu totale est bien plus vaste). A côté de ça, il introduit de nouvelles idées qui font du bien au rythme du jeu, à défaut de révolutionner la licence.
Vous vous rappelez du système de combat par exemple ? Spammer X, contrer de temps en temps avec Y, faire le Cirque du Soleil avec A, tout ça tout ça ? Bon, ici c'est toujours de la merde, mais les développeurs ont eu la bonne idée de vous filer des gants électriques vers la moitié du jeu. Du coup, tous les combats deviennent une grosse blague puisque les ennemis finissent en PLS en un coup, ce qui permet de réduire significativement la durée des combats contre les meutes que le jeu t'envoie à la gueule toutes les 10 secondes.
Les développeurs ont aussi drastiquement amélioré un élément qui était juste inintéressant dans les jeux précédents (au point où je n'en ai même pas parlé dans les critiques) : les scènes de détective où tu analyses ton environnement. WB Montréal a inclus dans ces scènes plusieurs indices à récolter (au lieu d'un seul dans les précédents jeux) et surtout la possibilité de remonter le temps pour identifier un détail dans les scènes du crimes. Ca rend cette partie du jeu vraiment amusante, alors que c'était des phases super lourdes avant.
Et franchement, le scénario est cool. Je ne vais pas forcément revenir dessus, mais des personnages secondaires comme Anarky (dont j'ai vraiment cru qu'il s'agissait d'une identité secrète de Robin avant qu'il ne rejoigne Batman) sont vraiment réussis, Batman est un connard imbu de lui-même au début (je vous jure, la scène où il engueule Alfred m'a dégoûté, il est cool Alfred) qui apprend à faire confiance à l'Autre au fil de son aventure... Et il y a un moment ultra-réussi qui ne dure peut-être que 5 secondes mais où on incarne Batman dans une scène de baston du point de vue d'une caméra de journaliste. C'est une mise en scène très efficace.
Bien sûr, à côté de ça on peut pester sur le fait que le jeu est censé se dérouler en une nuit alors qu'il se passe 15.000 trucs, que les seuls habitants de Gotham sont des criminels (les civils sont sous couvre-feu paraît-il, mais on a bien vu ces dernières années que non, les gens ne respectent pas ce genre de règles du tout) ou qu'Harley Quinn tombe amoureuse du Joker en 2 minutes montre en main, mais ça reste assez mineur, je pense que c'est mon scénario préféré de la série jusque-là.
Notons toutefois que le jeu me semble bien moins beau que City, possiblement parce que j'y joue sur Wii U au lieu d'y jouer sur PC (celui-ci n'était pas offert par l'EGS, que voulez-vous ?).
Ca me paraît d'ailleurs être une bonne transition pour parler de cette version Wii U. Si elle n'incorpore pas toutes les features qu'avait la version Wii U de City (comme le batarang qui se dirige au gyroscope ou la gestion de l'inventaire au tactile), elle conserve toutefois la vision de détective au gyroscope (osef un peu) et surtout la minimap sur le Gamepad. Enfin, on a une carte accessible sans faire pause lorsqu'on explore la ville, ce qui permet de tout de suite repérer les quêtes secondaires en cours sans avoir à mettre le jeu en pause, que c'est bon ! C'est tout con, mais ça m'a bien incité à faire ces quêtes secondaires tout au long de mon aventure alors que j'avais assez vite lâché l'affaire dans City, dégoûté par l'interface reloue.
Cette version a cependant moins de contenu que ses consoeurs : elle ne possède pas de mode multi-joueur qui est la nouveauté de cet opus. Cela dit, qui avait demandé un mode multi dans les précédents Batman ? Et de toute façon, les serveurs du jeu ont été désactivés il y a quelques années, donc maintenant tout le monde est au même niveau.
Elle ne possède pas non plus le DLC Coeur de Glace, censé nous narrer la rencontre entre Batman et Mr.Freeze. Dommage, c'est un de mes méchants préférés de la série et il semblerait que ce soit un DLC plus réussi que celui sur Harley Quinn dans City, mais bon, je peux faire sans.
Enfin, le jeu galère pas mal lors des phases de combat contre beaucoup d'ennemis qui arrivent dans la dernière ligne droite du jeu. Le combat contre Bane dans l'arène est particulièrement douloureux au niveau du framerate. Est-ce réservé à la Wii U, je ne sais pas, mais ce ne serait pas très surprenant.
Un petit mot sur le doublage qui me laisse perplexe. Si quasiment tous les personnages conservent leur voix des précédents jeux (Batman, le Pingouin, Harley...), le Joker a drastiquement changé et n'est plus doublé par Pierre Hatet. Si je ne regrette pas forcément ce choix (le Djo est plus jeune dans ce jeu, et de toute façon je trouve la performance de M. Hatet trop similaire à celle de Doc Brown), son remplaçant n'essaye même pas d'imiter son timbre de voix ou son parler. On a vraiment l'impression d'entendre un autre Joker que celui qu'on affronte dans Asylum/City, ce qui diminue un petit peu la crédibilité de cette préquelle.
Après recherche, il s'avère que c'est Stéphane Ronchewski qui a repris le rôle, à savoir la VF du Joker dans The Dark Knight de Nolan (que j'ai vu en VO, donc je ne l'ai pas reconnu du tout). Choix logique, dirons-nous, mais peut-être que le directeur du doublage aurait dû lui demander de faire une performance plus proche de celle d'Hatet. Dommage de foirer ça pour le deuxième personnage le plus important de la licence.
Bref, Origins n'est peut-être qu'un épisode bouche-trou, mais on ne peut pas dire qu'il démérite. Il reprend et peaufine la plupart des éléments de City tout en nous offrant une histoire dense mais jamais incompréhensible. La version Wii U s'en sort avec les honneurs, malgré l'absence de DLC.
Dommage que les bossfights soient vraiment peu inspirés et que des QTE, certes peu nombreux, commencent à faire leur apparition dans la série. J'espère ne pas en revoir dans Knight. En améliorant ces deux éléments, Origins aurait sûrement été mon jeu préféré parmi ces trois premiers épisodes.