En mission pour le Seigneur
J'ai tendance à me définir comme agnostique et à respecter les choix religieux de chacun, mais il y a des fois où je me dis que les chrétiens fondamentalistes cherchent uniquement à ce qu'on se foute de leur gueule. Peut-être que c'est juste un niveau dans l'art du troll que je n'ai pas encore atteint.
Bible Adventures est un de ces nombreux exemples de prosélytisme hors de propos dont ils sont capables, et probablement l'un des meilleurs.
Ce jeu est composé de trois parties, dans lesquelles on incarne respectivement Noé, David et la soeur de Moïse (pourquoi pas Moïse lui-même, je l'ignore, il a sans doute compris que ça allait être une arnaque et n'a pas donné son accord). Ces trois parties utilisent le même moteur, donnant au final trois jeux de plate-forme où il faut transporter des éléments et les amener à un certain point pour finir le niveau. Je vais les détailler dans le désordre, afin de mieux rendre compte du chaos que ce jeu a semé dans mon esprit.
La partie où l'on incarne David est sans doute la plus classique et la moins drôle. Un jeu de plate-forme comme il en existe des centaines, où on doit récupérer des moutons en esquivant des lions et où Goliath fait office de boss de fin. Passons.
Celle où on joue la soeur de Moïse (une certaine Miriam, merci Wikipédia) est un peu plus intéressante. Il s'agit là encore de plate-forme, où il faut atteindre la fin du niveau tout en évitant de se faire capturer par des soldats égyptiens, en transportant Moïse bébé au-dessus de sa tête (c'est tellement plus pratique que de le porter dans ses bras). Malheureusement, à chaque fois qu'on se fait toucher, le futur prophète s'échappe et part à l'autre bout de l'écran, et il faut aller le récupérer, dans la plus pure tradition de Yoshi's Island (mais au moins bébé Moïse ne nous gratifie pas du vacarme de bébé Mario). Là où ça se corse, c'est que s'il tombe à l'eau (les niveaux se déroulant au bord du Nil), c'est game over. Pourquoi tout ça alors que le but final est justement de confier Moïse aux flots du Nil, mystère.
Avec la partie où on contrôle Noé, on touche au coeur du jeu, la cerise sur le gâteau qui est meilleure que le gâteau en lui-même. Les animaux de l'Arche se sont enfuis dans une forêt pleine de dangers, et il incombe au brave patriarche de les rassembler par couples. Pour ce faire, il ne peut compter que sur son courage et ses talents de ninja.
Oui, car ce que Bible Adventures nous apprend, là où la Bible elle-même n'osait aborder la vérité, c'est que Noé est un ninja. Il est capable de grimper aux arbres tout en portant au-dessus de sa tête un cheval et une jument, les deux équidés reposant en équilibre sur un épi de maïs. Cherchez des vidéos du jeu si vous ne me croyez pas, c'est vraiment impressionnant.
Comme je l'ai dit plus haut, ces trois jeux utilisent le même moteur (donc en fait, David est capable d'empiler les moutons au-dessus de sa tête comme Noé, mais c'est carrément moins impressionnant sans les épis de maïs). A chaque fois qu'on récupère une vie (représentée sous la forme d'une Table de la Loi, ou quelque chose comme ça), le jeu nous gratifie d'un message, pouvant être un conseil de jeu ou une citation de la Bible, généralement sans aucun rapport avec le contexte. Voilà pour la caution culturelle.
On peut donc dire que Bible Adventures s'adresse à deux publics en particulier: les joueurs à la recherche de spiritualité, et les fans de jeux de ninjas. Je fais partie des deux, ça tombe bien.
(A tout seigneur tout honneur: le titre de cette critique est un hommage à un superbe graffiti qu'on peut apercevoir à la station Saint-Michel sur Orge du RER C)