Non, Votre Honneur au risque de vous décevoir, je ne suis pas un de ces illuminés qui hurlait au prochain "GOTY" ni au messie suite à l'annonce du jeu. Pas même après le visionnage de trailers où démonstrations in-game, s'il y en a eu.
Malgré ma haute appréciation pour les deux premiers volets, Mon niveau d'attente sur Bioshock Infinite a été très neutre. En cette année 2013, il était facile pour moi de citer au moins une bonne poignée de jeux que j'attendais bien plus que celui-là. Ce n'était pas mon but non plus de rédiger une critique quand tout ceux qui ont apprécié le jeu ont parfaitement résumé ce qu'il y avait à dire. Ca devient un exercice très difficile.
Ce que je vais faire ici est un mélange de tout mais aussi une belle occasion pour faire une mise au point sur ce qu'on appelle, la malédiction de la hype, la légitimité a accorder a une oeuvre la note parfaite. Ce sera plus un long statut qu'une critique, dites à la cour de faire péter le dislike et le mépris, j'enfreins la règle n°1.
Bien sûr que Bioshock Infinite est plus linéaire que les deux premiers dans son level-design très couloir, bien sur que c'est pas le plus grand représentant du genre FPS en terme de sensations comme en terme de liberté. C'est pas le pire d'ailleurs. Bien sûr qu'on peut avoir des choses à redire sur le moteur du jeu.
Mais qu'importe, dès l'instant où j'ai mis les pieds dans Columbia, j'y ai cru. Et ce même en y jouant sur Xbox 360, j'étais pas occupé a chercher quelle texture était moins bien faite que les autres et pleurer sur mon sort pour ne pas l'avoir fait sur PC. Je suis devenu touriste d'un magnifique couloir, certes. Mais c'est aussi le plus beau couloir que j'ai vu de toute ma vie. Je pense avoir des goûts très variés quand on parle d'un genre, de musiques ou d'une direction artistique. Mais un univers situé dans les cieux avec toutes ces couleurs contrastant avec la noirceur terrible de certains thèmes prenant place dans l'histoire, moi ça me parle plus qu'autre chose.
Quand je vois un héros doté d'une voix, une personnalité, des répliques bien senties dans un FPS. Assez intéressant et charismatique pour que je puisse retenir son nom, non pas par défaut mais parce que j'ai réellement fait la connaissance de ce cher Booker De Witt... Est-ce qu'on va me blâmer pour avoir trouvé ça génial?
Je suis tombé amoureux d'Elizabeth qui est le PNJ le plus crédible et le plus attachant et ce dès l'instant où je la rencontre et qu'elle se joint a moi pour une folle escapade d'une douzaine d'heures, la voir dans tous ses états d'âmes suite a ses découvertes sur le monde extérieur, le fait qu'elle soit non passive lors de mes affrontements contre les ennemis et suivre tous ses échanges fabuleux avec Booker. Est-ce qu'on va me reprocher d'avoir craqué pour elle? D'avoir rêvé de poser mon flingue, hurler un "fuck this shit", lui passer la bague au doigt quand je l'ai vue savourer sa liberté en courant dans tous les sens pour finalement l'apercevoir en train de s'amuser au beau milieu d'une piste de danse?
Varier les gunfights au sol puis sur les rails célestes, me balancer à tout va, tout capoter à coups de vigor, me jeter sur la gueule des ennemis, et conclure sur un finish au corps à corps m'ont procuré un plaisir bien plus important que ce que j'ai pu vivre dans les précédents volets. Quand s'ajoute à ça un punch un peu plus prononcé au niveau des armes, je peux pardonner le côté moins tactique enlevé des premiers volets. Est-ce qu'on va me reprocher d'avoir trouvé le rythme de la progression plus qu'excellente?
Parce qu'à la somme de toute une aventure marquante est venue s'installer une fin que je considère comme une des plus belles que j'ai pu voir de toute ma vie de gamer. Quoi? On va me l'enlever ça aussi?
Je sais bien que non, à la place on me demande des "défauts".
Hé bien, je vais vous dire moi, Votre Honneur.
Quand je commence a adorer un jeu, tant que les défauts ne se mettent pas en travers de mon chemin au point de m'ennuyer, faut pas compter sur moi non plus pour aller exprès vers eux. La voie de l'immersion, du plaisir de jeu, de l'émerveillement, de l'émotion à travers plusieurs séquences qui me touchent au plus profond, le tout porté par une excellente histoire n'ont pas été compromises. Ce sont des choses que moi j'attendais beaucoup d'un Bioshock après le premier et je dois dire que j'ai été comblé. Plus que je ne l'imaginais. Tant pis pour les autres, je peux comprendre les raisons citées. Mais moi quand j'aime à ce stade-là je ne compte plus.
Bien sûr que je pourrais toujours en relever pour expliquer aux autres a quoi il faut s'attendre, peut-être aussi afin de prouver qu'on est pas en présence du jeu parfait sur tous les points une nouvelle fois. Mais je sais que tout ça je me forcerais de les relever parce que je suis sur Sens Critique, et non pas parce que ces choses m'ont dérangé. En aucun cas des choses que j'ai considéré comme des broutilles en cours de jeu vont affecter ma note.
Chez moi, Bioshock Infinite a tout à fait sa place parmi des jeux que j'adore au plus haut point, tous genres et toutes machines confondues. Que ce soit lui ou les autres jeux sortis lors des générations précédentes, j'ai pas attendu dix ans pour leur attribuer ce statut de jeu inoubliable. Toujours après une petite méditation qui s'ensuit pendant ou après le générique final, je peux évaluer l'impact que le jeu va avoir sur moi. A partir du moment où c'est très fort, je me fiche de savoir si dans vingt ans, les gens continueront d'en parler. Moi, je sais que j'en parlerai toute ma vie, pour ce qu'il représente et ce qu'il a représenté à l'époque où je l'ai fait.
Tous ces grands jeux sans exception ont reçu le même traitement et en aucun cas je regrette ces déclarations élogieuses aujourd'hui et il en sera de même pour celui-ci. J'étais loin de me douter qu'un peu plus d'une décennie plus tard, certains de mes jeux préférés sortis et joués à l'époque allaient truster les hautes marches des plus grands classements parus jusqu'à aujourd'hui.
Par exemple, si Sens Critique avait existé en 1992, je suis sûr qu'un joueur emballé par The Legend of Zelda : A Link to The Past serait d'abord prêt a le nommer Game of The Year '92, plutôt que prendre le risque de prédire qu'il sera considéré comme l'un des plus gros diamants bruts vidéoludiques après plus de vingt ans d'existence. Un débordement de ce genre et le type se serait fait taxer de "gros fanboy over 9000" à coups de remarques dans le style : "Non mais arrête la drogue, le jeu est bien mais faut pas déconner, le premier Zelda NES était bien plus marquant, et puis le ranger au dessus d'autres jeux comme Super Mario Bros et Pong ça relève du blasphème ! ".
Sa place au Top 111 serait un vrai scandale pour les défenseurs du rétro-gaming d'hier.
Mais au final, je me dis que demain le cycle va se répéter avec tous les grands jeux de cette génération. Rien qu'aujourd'hui beaucoup d'entre eux ont déjà occupé de très bonnes places. Alors qu'est-ce que ce sera quand ces jeux représenteront toute l'enfance des vieux gamers de la génération 2000? Ces jeux que l'on verra sacralisés sans bornes par tous ces représentants de la "nouvelle élite"?
Quoi qu'il en soit, je ne note pas sur Sens Critique pour jouer au tiercé du jeu vidéo. Bioshock Infinite n'est pas un nouveau "cheval de course" sur lequel j'ai parié en collant un 10 et qui se doit à tout prix d'arriver premier d'un classement. Je n'irai jamais coller la note maximale a des jeux qui n'ont fait que marquer l'histoire du jeu vidéo en faisant fi de tout ce que je ressens en son égard. C'est bien beau de vouloir jouer les "soldats du bon goût", de dire ce qui est digne d'être culte demain et ce qui ne le sera pas. Malheureusement l'avenir ne dépend pas de vous, ni de moi. Et ces jeux que j'adore par dessus tout marquent d'abord mon histoire et il n'y a que ça qui compte.
Beaucoup de membres s'indignent a chaque nouvelle arrivée en première place dans le Top 111, clamant à tout prix que ce titre de "meilleur jeu de l'histoire" (selon eux) soit destitué. Une fois que c'est fait, tout va bien dans le meilleur des mondes. Circulez, il y a rien à voir. Surtout que l'autre jeu qui précédait sur le trône ne figure pas toujours parmi leur plus beaux souvenirs de gamer. Mais qu'il a plus de 10 ans sans doute. C'est excusable.
Parce c'est ça le pire, en visitant le profil de certains plaignants, je retrouve même pas le n°1 de leur Top 10 personnel dans ce classement. Mais parmi tous les n°1 que j'ai pu voir il y a de tout, des jeux dotés d'une excellente réputation ou considérés comme "lambda". Mais jamais considérés comme "objectivement parfaits" (parce que tout le monde sait que ça n'existe pas) ni "au-dessus de tout" comme ils le disent si bien. Ce sont juste des jeux qui les ont marqué, au point d'oser lui coller la note ultime. Soit. Chacun ses goûts. Normal.
Bien sûr, ils aboient mais je parie que s'ils avaient vu leur jeu favori en première place, alors là pour eux, ça ne serait que justice absolue comme par hasard.
"Surtout ne changez absolument rien, c'est parfait, ce jeu c'est la tuerie ultime! " s'exclameraient-ils avec la plus belle hypocrisie du monde. Et comme à chaque fois ce changement deviendrait un nouveau "cauchemar" pour les autres... La bataille continuerait sans fin. "Pourquoi lui et pas ça?" "Depuis quand X est mieux que Y?"
Même des types plus vieux que moi... De grands enfants.
Faire la part belle au sens critique est une bonne chose. Le site est fait pour ça et porte le nom, mais au vu de quelques réactions abusées, je constate à force de voir qu'au moment où ce phénomène se produit il y a pas mal de gens complètement ravagés par le système du site au point d'en perdre la raison, qui préfèrent noter par principe "d'accomplir un devoir" ou parce qu'il respecte mal un cahier des charges quitte a sacrifier tout ressenti. Personnellement, ça me désole beaucoup.
Alors Votre Honneur, si je suis conscient que Bioshock Infinite n'est pas un jeu parfait, la note très subjective que je lui attribue est assumée car en plus de penser que c'est un excellent jeu, il constitue à mon sens, une des plus brillantes réponses a une question que chaque gamer digne de ce nom a dû se poser une fois :
"Pourquoi est-ce que je continue de jouer et aimer les jeux vidéo?".
J'ai vécu le trip à fond, j'ai eu du mal à lâcher la manette alors que DuffMan m'avait prévenu, j'ai pris des claques sans tendre les deux joues... et j'ai bandé sans Viagra. Non, ne me regardez pas comme ça, ce n'est pas sale.
Je n'ai pas débranché ma cervelle en allumant la console, c'est le jeu qui s'est chargé de le faire à ma place. Il a totalement brisé ma garde du début à la fin tout en laissant le soin de me rappeler au cours du voyage que je possède encore un coeur qui peut battre très fort à plusieurs reprises.
Deal with it. I'm a fanboy now.