Avant d’atterrir dans le Labyrinthe, comme la plupart d'entre nous, j'ai arpenté la sphère de Dyson de Tsutomu Nihei. J'ai exploré la maison de Mark Z. Danielewski. Je me suis emparé du Bureau Fédéral de Contrôle de Remedy. Comme certains encore, j'ai exploré mes propres méandres avec le Liber Novus de Jung. Comme d'autres j'ai découvert les nombreuses réalités alternatives entrevues par Philip K. Dick. Comme les plus anciens, j'ai visité les Cités Obscures de Schuiten & Peeter et les prisons de Pyranese
Les anciens archétypes sont remontés du tréfonds de notre inconscient collectif et ont pris la forme de couloirs jaunes, hostiles et infinis. Tout semble avoir été dit. Tout semble avoir été vu. Et pourtant ...
Nous continuons d'avoir ce rapport un peu occulte et métaphysique avec l'art. Nous essayons de trouver dans les œuvres quelque chose qui dépasse la pensé du créateur. Nous explorons l’œuvre pour en découvrir l'essence inconsciente qui a échappé à l'artiste qui lui n'en est que le vaisseau.
Pour avoir la réponse à une question insaisissable que nous avons oublié.
Pourquoi ai-je décidé de remplacer le veilleur ? Parce que j'aimais ces espaces mornes et paisibles plongés dans une douce et froide obscurité ? Parce que je souhaitais oublier ma solitude en retrouvant, même pour un instant, la fille aux yeux jaunes ? Parce qu'observer et comprendre le Labyrinthe aurait été une façon de lui être intime ? Parce qu'accepter la tyrannie du destin m'aurait apporté la paix ?
Et alors, assis sur mon trône un souvenir lointain, très lointain m'est revenu.
Richard Linklater dans le rêve d'une personne, ou dans son propre film¹, raconte au protagoniste un rêve marquant qu'il a fait, à la suite de la lecture d'un livre² de Philip K. Dick dont l'esprit semble avoir transcendé l'espace et le temps.
Richard Linklater explique ce qu'est la nature de l'univers et surtout l'expérience que nous en faisons.
Assis sur le trône, depuis une éternité, je me souviens. Le temps n'est qu'un instant. Et cet instant n'est que "la réponse négative à l'invitation de Dieu". Une invitation mal comprise sans doute, mais une question qui demeure et qui attend une réponse positive. La seule acceptable. Qui finira par advenir, tôt ou tard.
Au fond de moi je le savais... Et pourtant je me suis assis sur le trône. Alors finalement, j'accepte l'invitation, en m'avançant vers Carcosa, je suis partagé entre honte et regret. J'ai le sentiment de m'être trahi moi même. De m'être infligé un inutile supplice. Et pourtant à mi chemin, je veux revenir. Il doit y avoir autre chose qui m'a échappé, quelque chose que je n'ai pas vu ou que je n'ai pas compris. Ça ne peut pas être juste ça.
Alors je rebrousse chemin. Mais je réalise trop tard qu'il n'y a pas de retour en arrière.
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¹ Dans le film "Waking Life" dans la scène du flipper à 1h25m25s
² Coulez mes larmes, dit le policier