Sans originalité, j'ai joué à Borderlands 3 parce que je suis fan de la série depuis le premier jeu, que j'ai fait coup sur coup avant le 2, autant dire qu'à l'époque j'étais en pleine hype, j'adorais l'univers, l'humour et le gameplay. Puis est venue la Pré-Séquelle, bancal épisode aux allures de gros DLC entre les deux premiers jeux, mais qui apportait un peu de contenu narratif et technique (la glace, l'oxygène, le vide spatial, les armes lasers) constituant son identité.
J'ai toujours détesté que Tales from the Borderlands soit un jeu canonique dans la série, et je n'ai jamais eu l'occasion d'y jouer. Dommage parce qu'il concentre un certain nombre de persos et d'événements majeurs de la série (la mort de Scooter par exemple).
Autant dire qu'après ça, le 3, je l'attendais pas vraiment, l'épilogue de Tiny Tina et la Forteresse du Dragon faisait un dénouement parfait pour moi. Mais j'ai eu le 3, gratuitement sur Epic, et j'me suis dit allez, pourquoi pas.
Toujours sans originalité, je vais me prêter au jeu de la comparaison, vu que ce jeu est le 4ème de sa série.
J'ignore si les scénaristes ont essayé de retrouver l'ambiance de réunion de Borderlands 2 mais si oui, c'est un échec complet. Là où, affrontant le Beau Jack, on rassemblait tour à tour Lilith, Roland, Mordecai et Brick, on débarque ici des années après les derniers événements. Lesquels, on ne nous le dira jamais, si ce n'est que Lilith a perdu la clé de l'Arche de Pandore aux mains d'une fratrie de Sirènes imbéciles qu'on va se farcir tout du long en priant de pouvoir les buter sauvagement à la fin.
Alors on espère, on se dit qu'on va retrouver Lilith, Mordecai et Brick, puis Axton, Salvador, Maya, Zer0, peut-être Gaige et Krieg si on a de la chance, Athéna même, on peut rêver.
Que dalle.
Tina, Mordecai et Brick sont devenus les agents libres de "l'équipe B", et franchement les revoir aussi peu est pire que de ne pas les avoir revus. Quant aux personnages jouables de B2 et la Pré-Séquelle, on a droit à Maya en moniale sarcastique, Zer0 en garde du corps glorifié pour un magnat de l'armement et c'est marre. Axton, Sal, Gaige, Krieg, Athéna ? Oubliez.
Par contre on a Ellie, et ses blagues de cul omniprésentes, ClapTrap, et sa solitude misérable et malaisante, Maurice, je sais pas ce que c'est cette bestiole mais il est là, et Vaughn, un type avec une cape, un slip et pas de collants en-dessous. Ah, et Moxxi, presque invisible, oubliez les sarcasmes et la violence raffinée de la barmaid.
Ce jeu n'est donc pas une réunion de la dream team, admettons, c'est quoi alors ? Bah il ne sait pas lui-même, j'ai l'impression. Les Calypso essaient d'être le Beau Jack, sauf que lui avait toute la puissance d'Hyperion, la violence de Wilhelm et Nisha, et s'il se comporte comme un bouffon, c'est pour faire oublier qu'il fait assassiner tout Chasseur de l'Arche qui met le pied sur Pandore, tandis que la révolte de B2 n'est initiée que parce que toi, le joueur ou la joueuse, t'es l'unique rescapé·e de la dernière chance. Même Tungstena Zarpédon, dans la Pré-Séquelle, avait toute la puissance d'une armée, le contrôle du satellite Hyperion et du laser orbital monté dessus.
Les Calypso, donc, sont des influenceurs qui dirigent une secte meurtrière à leur propre gloire, nourrie avec des podcasts et une communauté de fans. La critique sociétale n'est ni subtile, ni réussie. Y'a un ancien pro-gamer reconverti dans les cryptomonnaies aussi, Gearbox avait des comptes à régler on dirait.
Mais c'est ça le problème de B3 :
- l'humour est soit naze, soit daté. Les antagonistes ne deviennent jamais sérieux, ne cessent jamais de déconner comme l'a fait Jack en massacrant impitoyablement Sanguine et Roland. Ce sont d'éternels pitres, juste assez détestables pour qu'on veuille les trucider, mais jamais assez effrayants pour qu'on ait peur de leurs actions.
- L'écriture de B3 est flaibarde, la moitié des quêtes annexes ne sont liées ni aux persos principaux ni à l'antagoniste (qu'est-ce qu'on s'en fout, de Clay et ses potes, ou de la vie des sociétés Jakobs, Maliwan et Atlas ?), du coup elles sont pas pertinentes au récit qu'on essaie de nous raconter (l'histoire de l'Ange c'est sympa mais c'est il y a deux jeux qu'on aurait dû l'avoir).
- B3 rejoint Game of Thrones au panthéon des histoires gâchées par des personnages d'une stupidité qui frise l'incorrection : Maya est tuée parce qu'on ne prend aucune précaution autour d'une Arche fraîchement ouverte ? Envoyons Tannis pour la prochaine ouverture, et laissons-la s'attarder inutilement ! Ouais, Tannis, la scientifique qui a été battue à mort par des bandits sur ordre de Jack et sauvée par Roland. Du coup les rares fois où on se dit que peut-être les Calypso réussiront encore à tuer quelqu'un, on s'en fiche parce qu'au fond ce sera mérité.
- B3 "corrige", notez les guillemets, la stupidité de son écriture par des incohérences : en fait Tannis n'est pas faible et inutile, c'est une Sirène, parce que les pouvoirs de Sirène, ça se transmet comme un héritage (qui sont les héritières de Steele et Zarpédon, du coup ?), comme c'est pratique (d'ailleurs faudra qu'on m'explique comment ça fonctionne la physique des Sirènes, comment elles se téléportent partout dans la galaxie, surveillent les autres planètes ou repoussent une lune entière...). Jack nous apprenait dans B2 qu'il ne peut y avoir que 6 Sirènes en même temps dans l'univers : à l'époque de B1 elles sont huit, trois adultes (le commandant Steele, Tungstena Zarpédon et Lilith) et cinq enfants (Maya, l'Ange, Amara, Troy et Tyreen), puis sept dans B2 et BPS (vu que l'Ange transmet ses pouvoirs à Tannis), et enfin six, effectivement, dans B3 (Lilith, Maya puis Ava, Amara, Troy, Tyreen et Tannis).
Bref vous avez compris le récit n'est pas engageant et les quêtes, principales et annexes non plus.
Niveau gameplay ça aurait pu être bien, surtout en reprenant une partie du contenu de la Pré-Séquelle, qui se passe en partie sur une lune sans atmosphère, en particulier si on veut faire voyager les héros sur de nombreuses planètes, mais non. Y'a bien un nouveau véhicule léger, rapide et maniable que j'ai adoré, mais les maps sont désespérément trop grandes (là où les jeux précédents avaient des maps entières sans véhicule parce qu'explorables à pied, comme Opportunity, Frostburn Canyon, Thousand Cuts et des pans entiers des DLC, chez Captain Scarlett comme dans le JDR de Tina), tu sens qu'elles ont été pensées pour les véhicules, le jeu en multi (avec des fonctions sociales d'ailleurs, on se croirait dans Fortnite) et les secrets à découvrir (spoiler : à peine B3 fini, je l'ai désinstallé et j'y rejouerai jamais).
Le système de génération d'armes a été revu, et même si c'est à l'avantage des joueurs, ça ruine l'expérience de jeu. J'ai joué Moze, la mecha, et j'ai relativement peu utilisé l'Ours de Fer (largement moins que le Gunzerking de Salvador ou le Piègemort de Gaige), tellement mes armes étaient craquées, j'étais presque toujours sous équipement orange et violet, dès le début. Alors sniper droit dans la tête et tuer les ennemis par ricochet c'est cool mais le jeu n'opposait que rarement du challenge ni n'imposait de la stratégie comme le contournement ou les grenades. Couverture, lunette, balle, tête, mort, loot. Avancer et recommencer.
Qu'est-ce qui reste, après un constat d'échec aussi frappant ? Ouais parce que j'ai pas parlé de la bande-son, de la mise en scène ou de la scénographie (l'art de mettre en valeur la conception de tes niveaux par la manière de les montrer) mais c'est parce qu'elles sont oubliables au possible.
Bah il reste l'envie de rejouer à Borderlands 2, mais je le connais déjà par cœur. Du coup, je peux dire que j'étais fan de Borderlands, à l'imparfait, et maintenant la série est finie pour moi. Elle l'est depuis 2014 en fait. Trois jeux c'était bien.