Les studios nippons amorcent désormais une délocalisation du développement de certaines de leurs franchises majeures. 2013 débute ainsi avec deux productions typiquement japonaises à l’origine mais aux accents désormais conjugués à l'occidental. Capcom a ainsi laissé les Britanniques de Ninja Theory se charger de Devil May Cry ; Konami pour un résultat très soupe olé a donné les clés de Castlevania aux Espagnols de MercurySteam. Les Ibériques n’en sont pas à leur premier coup d’essai puisqu'ils ont déjà pondu Lords of Shadow, le reboot très réussi de l'histoire des Belmont et de Dracula, sorti il y a deux ans sur PS360. Alors qu'une suite est d'ores et déjà prévue sur ces mêmes supports, une portable de Nintendo a une fois de plus les faveurs du coup de fouet et voit arriver Mirror of Fate. Avant de savoir s'il faut s'y adonner à sang pour sang, petit tour d'horizon de château et de ses environs.

Vampire, vous avez dit vampire ?

Pour débuter, il est important de préciser que Mirror of Fate est, selon les Espagnols, tout simplement un spin-off du nouvel arc narratif et que l'on peut le cataloguer comme le Clone Wars de Castlevania puisque cet épisode livre certaines clés de l'intrigue et se situe chronologiquement entre le premier et le second volet des Lords of Shadow. Ainsi, si vous n'avez pas eu le plaisir de jouer à l'épisode sur console de salon, vous ne serez pas perdu dans les méandres du scénario mais vous n'en apprécierez pas totalement les clins d'œil ni même la portée intrinsèque de certaines choses surtout que l'on vous balancera en pleine poire la fameuse révélation de la cinématique de fin de la première "saison". Quant aux autres, ils seront rapidement remis dans le bain de sang(ria) et retrouveront avec plaisir Gabriel Belmont et plus généralement la descendance de ce dernier.

En effet, Mirror of Fate est découpé en trois actes et un prologue, chaque partie étant l'occasion pour le joueur d'incarner un membre de la famille Belmont ou autre. En guise de préambule didacticiel, c'est notre bon vieux Gabriel - bien qu'il ait refusé de mourir d'amour enchaîné - qui s'y colle. Les trois autres parties nous mettront successivement dans la peau de Trevor Belmont, fils de Gabriel, de Simon lui-même fils de Trevor et donc petit-fils de Gabriel. Enfin, Alucard, dont le nom n'est autre que l'anagramme d'un vampire des Carpates, sera également jouable une grosse partie du jeu. L'arbre généalogique des Belmont sera ainsi au cœur de ce vaudeville macabre dans lequel on retrouvera tous les ingrédients d'une bonne petite réunion de famille : moments de liesse, d'aveux, de colère, de règlements de compte et bien d'autres choses sans que cela finisse forcément gaiement autour d'une flûte de champagne. Guidés indirectement par un mystérieux personnage miroir et prophète du destin - d'où le titre du jeu -, chaque personnage va en apprendre plus sur l'arbre généalogique qui compose la famille Belmont au gré de leur progression dans le château du suceur de sang. Nous n'en dévoilerons guère plus puisque la narration est suffisamment légère et explicite pour vous permettre de suivre ce soap game opera, mais saluons l'initiative prise par MercurySteam de proposer des cut-scenes animées et intégralement cel-shadées. Du plus bel effet surtout en 3D, celles-ci pourront ceci dit en choquer plus d’un vu que la parlotte entre les personnages n'offre aucune synchronisation labiale, mais tant pis, elles n'en restent pas moins classes.

Malgré le découpage temporel, l'expédition de la famille Belmont reste liée et cohérente jusqu'au bout puisque l'on parcourt les environs du château de Dracula, ceux-ci étant plus que vastes et suffisants pour que l'on ne tombe pas dans la monotonie. Comme dans tout bon Metroidvania qui se respecte ou tente de l'être, l'obtention de capacités annexes permet par la suite de débloquer d'autres zones et de récupérer des bonus annexes comme ces coffres qui allongent les jauges de vie et de magie du héros ou bien encore de débusquer des parchemins laissés par de preux aventuriers morts au combat et n'ayant pas eu la veine d'être digérés par vos doigts agiles. Ces lettres laissées vous prodigueront à la fois conseils avisés mais aussi vous octroieront un bonus d'expérience. Cela nous amène à la gestion de votre personnage. Quel que soit le protagoniste et l'acte, les jauges et l'expérience ne sont pas liées à l'un d'entre eux mais communes à tous, les coups spéciaux débloqués par le gain d'un niveau pour l’un l'étant également pour les suivants. Mais l'on reviendra plus précisément sur les combos, les pouvoirs et toutes ces joyeuses actions un peu plus tard.

Castlevania, un jeu très "fouette"

La réalisation de Lords of Shadow avait laissé le goût de la satisfaction à tous ceux qui avaient apprécié l'expérience proposée. Disons-le de suite, c'est également ici le cas sur le petit écran de la 3DS puisque l'on est en face de l'une des plus belles productions de la portable de Nintendo. L'effet de relief est tout simplement saisissant, reléguant au fond de la classe les autres jeux jusque-là mis en avant comme Paper Mario ou bien encore Super Mario 3D Land et Street Fighter 4 3D Edition. Certes, on pourra toujours pester contre un aliasing parfois très présent, mais l'ensemble mérite qu'on félicite le boulot accompli dans le design, et la variété des environnements.
Au niveau de l'animation, les effets étant souvent multipliés à l'écran, on est en revanche plus enclin à la critique et notamment concernant la baisse de fluidité de l'ensemble, un défaut déjà présent sur l'épisode consoles de salon. Ce n'est rien de bien handicapant sur le long terme, mais suffisant pour être remarqué par la constance du petit souci.
Quant à l'ambiance sonore, on se retrouve face à du réchauffé avec les accords mêlant orgue et violon habituels pour tout ce qui a trait aux canines acérées. Rien de bien "bouleversifiant" pour qui que tu sois et quoi que tu fasses comme diraient un ancien groupuscule.

Même s'il tend à renouveler le genre à l'aide d'un gameplay en 2,5D, Mirror of Fate n'en garde pas moins la formule du Metroidvania, bien moins éculée qu'on ne pourrait le penser. Ce système consiste à offrir un monde au cours duquel des zones ne pourront être atteintes sans l'obtention d'un objet annexe ou pouvoir glané en tuant un boss. On pense ainsi au fouet qui peut s'accrocher à un point d'ancrage pour se balancer ou au double-saut et à la course qui nous mue en Carl Lewis sanguinaire. Parmi les pouvoirs dont on peut disposer selon le Belmont incarné, sachant que l'on en a deux par personnage et déclenchables en appuyant sur les gâchettes L et R de la console. Simon peut par exemple se doter d’un bouclier astral qui le protège des ennemis et de l'environnement ou opter pour une aide qui se charge d'attaquer les ennemis. Alucard peut quant à lui franchir ennemis et portails à l'aide d'une glissade ou bien se transformer en loup aux griffes acérées et destructrices. Quant aux autres facultés de nos "dresseurs", on vous laisse la surprise de la découverte afin de garder intact le plaisir. Il est cependant important de préciser que se servir de ces pouvoirs requiert de la magie et qu'il faut donc en user avec parcimonie et ne jamais perdre de vue la jauge se situant juste en-dessous de celle de votre vie.
En sus de cela, des objets sont aussi affiliés aux Belmont. L'un pourra lancer des haches ou une nuée de chauve-souris, l'autre ralentir le temps à l'aide d'une bombe, voire carrément se muer en pyromane avec une grenade incendiaire et ainsi de suite. Là aussi, chaque aventurier dispose de ses propres bonus également au nombre de deux.

Mais le nerf de la guerre reste le coup de fouet capable de donner bien plus que 50 nuances de gris. Nul besoin de se lancer dans une lecture féminine pour assouvir son besoin de punition puisque la famille Belmont est experte dans l'art de la soumission des démons. Un bouton permet ainsi de frapper directement et énergiquement quand un autre tentera de faire mal à plus de monde via des coups de zone. Les deux derniers boutons se partagent le saut (logique, n'est-il pas ?) et donc le lancer d'objet énoncé à l'instant.
Si Lords of Shadow sur PS360 regorgeait de combos à toutes les sauces, il faudra ici se contenter de l'évolution de votre personnage qui pourra produire de nouveaux coups à chaque gain de niveau. Chaque ennemi battu et chaque parchemin découvert vous permettront de grappiller quelques points précieux. On atteint le niveau maximum – le 18 – grosso modo vers la fin du jeu, mais le panel de coups disponibles vous suffira tout au long de l'aventure surtout si on le couple aux pouvoirs spéciaux.
Par contre, ne cherchez pas une quelconque utilisation du tactile de la console, vous ne trouverez rien sur votre chemin si ce n'est un accès plus rapide au niveau de l'interface. Du déjà-vu en somme mais le fait de disposer de la carte directement sur l'écran inférieur s'avère indispensable puisque l'on peut y deviner la route à suivre avec un code de couleur indiquant la sortie à prendre. En outre, un point d'interrogation s'affiche dans la case si un bonus est disponible dans la zone en question. Pratique pour collecter les trésors qui augmentent vos barres de vie et magie ou encore le nombre maximal d'objets !

Shadow of the beast

Bien qu'il réponde correctement à nos sollicitations, on meurt fréquemment dans Mirror of Fate, souvent parce que l'on tombe par inadvertance d'une plateforme, parce qu'on se fait littéralement latter par un ennemi ou un boss ou bien tout simplement parce qu'il faut parfois assumer sa noobitude. Mais quoi qu'il en soit, on ne peut qualifier ce jeu de difficile. Non, il y a bien trop de check-points pour cela. Imaginez un peu, vous êtes en plein combat contre l'un des boss du jeu et, déjà qu'ils ne sont pas légion, celui-ci vous met à terre après un joli uppercut. En temps normal, vous frissonnerez à l'idée de repartir pour un combat, mais pas dans Mirror of Fate puisque vous reprendrez votre duel avec des jauges de vie et magie remplies à moitié et celle de l'ennemi revenue à la dernière cut-scene du combat (chaque boss en dispose, donc cela n'a rien d'exceptionnel). Bref, on ne reste jamais bloqué bien longtemps dès lors que l'on a saisi les attaques particulières et les faiblesses d'un boss. Même combat si l'on peut dire en ce qui concerne les quelques énigmes qui sont distillées dans les niveaux et qui ne posent aucun souci majeur. On est là aussi loin de la partie d'échecs entre Gabriel Belmont et la Succube de Lords of Shadow 1.

En revanche, on ne peut pas nier que certains ennemis rencontrés au cours de la progression dans un niveau, comme les vampires ou les lycans, ont un sacré punch et requièrent parfois que l'on fasse appel aux objets et pouvoirs annexes pour s'en débarrasser, mais au risque de se répéter, rien d'insurmontable même pour un joueur occasionnel.
Malgré son bestiaire assez varié et donc parfois puissant, on pourra reprocher à MercurySteam de garder sous le coude quelques séquences épiques et des boss plus piquants comme ils savent le faire puisque certains sont bien esquissés dans le jeu. Il nous manque ce soupçon qui aurait pu faire définitivement basculer la balance vers un très grand hit. A charge de revanche sur consoles de salon, qui sait ?

Il vous faudra une bonne douzaine d'heures pour boucler les trois actes et le prologue du jeu afin de pouvoir accéder à une fin qui nous laisse légèrement le bec dans l'eau. Comptez une à deux heures supplémentaires si vous visez les 100% de complétion du titre, un objectif facilement atteignable qui débloque un bonus visuel annexe. Par contre, n'espérez pas interférer entre les membres de la famille Belmont et les actes une fois le jeu terminé pour parfaire votre pourcentage final puisque chaque membre est lié à sa progression scénaristique.

Verdict : 7/10

Castlevania n'avait pas forcément besoin d'un coup de fouet pour être de qualité sur console portable Nintendo. Pourtant, on ne peut que saluer le bon boulot réalisé par MercurySteam qui nous offre une expérience 3D saisissante. Malgré un manque d'envergure par moments et une difficulté mal dosée, Mirror of Fate s'avère être bien meilleur que ce que l'on pouvait présager. Plus que joli, assez jouable, doté d'un level design qui a du mordant, on se laisse vampiriser tout au long de l'aventure et l'on apprécie le fait d'avoir un pan de l'histoire des Belmont ainsi détaillé. En résumé, il offre de quoi nous donner envie de jouer au pieu avec Dracula. Un comble.

On a aimé :

La réalisation globale
La famille Belmont
Les cut-scenes
Les pouvoirs variés
L'effet de profondeur de la 3D

On n'a pas aimé :

La difficulté mal dosée
Le manque d'epicness par endroits
Mourir souvent inutilement
Les QTE plus que dispensables

On s'en tape :

Du miroir
Angel
7
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le 17 mars 2013

Critique lue 495 fois

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Angel

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