Si je me suis jeté sur Danganronpa, c’est avant tout pour son style visuel manga, le délire school life qui m’a accroché façon Persona 4 et aussi parce qu’il nous présentait un ours double-face grave stylé. Autant dire que je ne savais pas réellement dans quoi je m’embarquais avant de l’avoir entre les mains. Cela étant dit si la perspective d’être face à un Visual Novel n’est pas toujours enthousiasmante pour les européens que nous sommes, vous pourriez bien malgré tout y trouver votre compte.
Warning cependant, on est face à un pur produit japonais avec tout ce qu’on peut trouver de coupes de cheveux improbables et d’éléments scénaristiques capillotractés. C’est d’ailleurs ce qui m’a tenu les premières heures dès lors qu’on nous invite à faire connaissance avec les différents stéréotypes personnages que nous côtoieront durant l’aventure.
Pour rappel, l’histoire commence lorsque vous, alias Makoto Naegi, faites votre rentrée au lycée Hope’s Peak. Rapidement, on se rend compte que l’académie n’est pas un lieu commode . Déjà, parce que les lycéens sont tous des Super-Quelque chose (euh non, Ultimate en réalité, ça rigole pas) et d’autre part parce que le maître des lieux n’est autre que Monokuma, le sympathique ours en peluche monochrome et que ses méthodes d’enseignements sont assez singulières. Le pitch est simple, tout le monde est retenu enfermé dans l’école jusqu’à ce que l’un d’entre vous se décide à tuer un de ses camarades afin d’être promu et de pouvoir quitter les lieux. Ce qui signifie l’exécution des élèves restants s’ils ne parviennent pas à le démasquer lors d’un procès présidé par Monokuma himself. C’est là que le titre montre toute son efficacité : car s’il annonce une construction linéaire, illustrée par un ensemble de règles de vie à suivre définies par Monokuma (pièces non accessibles, contraintes horaires …) , le scénario est vraiment prenant et surprenant.
Comme je le disais, le déroulement est découpé de manière routinière (phase de temps libre, d’enquête et de procès) mais qui permet de mieux renforcer l’efficacité avec laquelle le scénario arrive à nous surprendre. Et si le titre souffre d’une grande facilité dans son gameplay et d’une prévisibilité sur les premières affaires (au moins la toute première), il parvient en réalité à nous manipuler au fil de l’aventure : le joueur pensant comprendre bien mieux que les personnages ce qu’il se trame, n’a au mieux que quelques secondes d’avance sur eux. La différence avec un jeu de réflexion, c’est qu’il est construit de manière à nous faire réfléchir à la résolution de l’enquête et ne nous laisse jamais nous éloigner vers une fausse piste. Je parle bien sûr pour le joueur, car l’histoire, elle, s’amuse bien entendu à mener ses protagonistes vers de fausses pistes. Je n’ai pas de point de comparaison dans ce genre mais je trouve le scénario très bien écrit (jusqu’à la toute fin) pour qu’on se sente impliqué tout au long de l’aventure et qu’on ne décroche jamais. Bien entendu, cela reste une remarque subjective car cela dépendra de vos affinités avec le genre.
Visual novel oblige, je me suis attardé sur le scénario alors que le gameplay n’est pas nécessairement à jeter. En dehors des phases d’enquêtes en mode Point & Click assisté, car les éléments à examiner peuvent être indiqués à l’écran (défaut ou non, personnellement, je ne prends particulièrement mon pied en cherchant les recoins de l’écran où cliquer), et des scènes de dialogues, on retiendra surtout les séquences de procès. Ces procès sont les points culminants de chaque chapitre du jeu, car il s’agit de mettre en ordre toutes les informations assimilées pour reconstituer les faits et trouver le coupable. La mise en scène rythmé, la musique et la direction artistique marquent le véritable plaisir que procure le jeu. Le reste est laissé aux soin des dialogues, qui, si vous vous êtes laissé prendre par l’intrigue, affichent bien la tension de ces scènes et sont ponctués de mini-jeux peu élaborés mais suffisamment variés et efficaces pour maintenir l’excitation. N’étant pas un adepte de la série des Ace Attorney à laquelle je reproche un manque de logique évidente entre le raisonnement attendu et les preuves à disposition, j’ai personnellement trouvé ces phases de procès très bien menées. Sans donner toute les clés de compréhension au joueur, mais permettent d’avoir un déroulement fortement balisé.
Ce n’est donc pas le challenge qu’il faut retenir de Danganronpa mais sa narration, exprimée à travers le point de vue de Makoto l’Ultimate Lambda (Ultimate Lucky en réalité) qui, bien que ressemblant au personnage principal de nombreux animes/mangas, se révèle suffisamment bien écrit pour en devenir charismatique, à l’instar du reste du casting : en particulier Monokuma qui est génialement sadique. Les phases de temps libre nous proposent de mieux se familiariser avec eux (à condition qu’ils soient toujours de la partie) bien que ce soit dommage que cela n’ait que peu d’impact sur l’aventure. Comme souvent dans les productions japonaises, le scénario ne se retient pas d’aborder des thèmes sérieux voir matures entremêlés de situations grotesques sur fond d’une pointe de niaiseries : et ça fonctionne (contrairement aux occidentales).
Des personnages attachants (Kyoko <3), un scénario suffisamment maîtrisé, sans aucun (ou presque) temps mort et ne laissant pas de zone d’ombre, et une fin qui ne déçoit pas (ce qui n’est pas si commun) font la recette de Danganronpa premier du nom. Pour peu qu’on ne soit pas réfractaire ni à cet univers ni au genre Visual Novel, je ne vois aucune bonne raison de se priver de ce titre. Je pense même que c’est un excellent titre pour débuter dans le genre. En contrepartie, il faut accepter le manque réel de challenge. Et si vous ne le savent pas, le jeu est intégralement en anglais, mais reste accessible pour peu qu’on y soit habitué. Pour ceux qui ne sont pas convaincus, il y a toujours la série animée.