Darkest Dungeon est un jeu extrêmement séduisant : dès la cinématique d’intro j’ai été conquis par l’ambiance sombre, le style graphique magnifique et le doublage d’une qualité exceptionnelle !
Puis on est lancé dans le premier combat, et c’est un peu rude. Le jeu se montre vite très punitif, possède une interface extrêmement dense, et on croule sous les infos. Pratiquement rien n’est expliqué, il va donc falloir apprendre sur le tas, mais vu comment le jeu fait envie la motivation est clairement là.
Bon c’est difficile par contre. Même pour un type précautionneux comme moi, il faut généralement entre un et trois jets de dés malheureux pour perdre (irrévocablement) un équipier. Car oui, Darkest Dungeon est un énième rogue-lite, et chaque décès est définitif. Mais pour le coup la structure rogue-lite est extrêmement réussie, et chaque nouvelle run vous verra apprendre de nouvelles choses sur les classes, leurs compétences, les ennemis, les synergies, bref les rouages complexes mais intéressants du jeu. En plus de cela il existe un système d’amélioration de la base des héros, grâce aux trésors que vous ramènerez de vos expéditions.
Et là ça devient franchement addictif. On a bien quelques moments de frustration en perdant des héros sur des échecs critiques ou en découvrant un boss franchement énervé, mais ça fait partie du jeu et Darkest Dungeon a l’intelligence de proposer un système pour recruter directement des héros de niveau 1, 2 ou 3 en investissant dans un bâtiment. Bref, jusqu’aux donjons de niveau 3 le jeu sait se montrer sévère-mais-juste, et c’est là qu’il est le meilleur, avec un effet « encore une » qui fonctionne du feu de Dieu.
Mais il faut admettre qu’une certaine répétitivité s’installe, renforcée il est vrai par la relative lenteur des combats et la différence entre le peu d’argent qu’on gagne (à cause notamment d’un inventaire très limité) et le prix de plus en plus élevé des améliorations. Le jeu commence à se faire grindy, et malheureusement les problèmes ne font que commencer.
Déjà l’augmentation de la difficulté (entre les donjons de niveau 1 et 3, puis 3 et 5) se fait surtout au niveau des probabilités : les ennemis font plus de critiques, esquivent beaucoup mieux, et ça devient frustrant. Je sais bien que c’est le principe même de la difficulté d’essayer de réduire les chances de victoire du joueur, mais là il y avait des moments où j’avais vraiment l’impression de me battre contre un fichier excel.
Les développeurs ont aussi pris une série de décisions franchement contestables, afin de rallonger la sauce au maximum : possibilité de recruter des héros niveau 3 maximum (sur 6), coût des améliorations qui augmentent énormément, gain d’XP pas énorme dans les derniers niveaux, et surtout, surtout, punitivité démentielle dans les donjons de niveau 5 ou 6. Et vu qu’il est impossible d’envoyer un héros dans un donjon inférieur à son niveau (encore un choix castrateur et pénible), si on veut avoir une équipe niveau 6 il va falloir essayer d’emmener du niveau 3 au niveau 6 de très nombreux combattants, tout en se résolvant à en perdre au moins la moitié en cours de route (sérieusement les donjons niveau 5 sont hyper violents). D’ailleurs, pour l’anecdote, quand on débloque les donjons niveau 5 on n’a pas encore assez d’argent pour upgrader nos héros niveau 5 à leur maximum, et du coup on doit farmer des donjons niveau 3 avec d’autres héros pour avoir suffisamment d’argent pour ce faire. Grind, grind, grind…
Et le pire c’est que les développeurs auraient pu augmenter les gains d’argent et d’XP sans problème, vu que dans l’état il faut une centaine d’heures pour finir le jeu. En étant plus raisonnable le jeu aurait pu être moins frustrant tout en durant au bas mot 50 ou 60 heures tout de même. On accuse souvent les AAA d’être trop répétitifs et inutilement longs (je pense notamment aux jeux Ubisoft), mais là Darkest Dungeon fait encore pire ! Au bout de 50 heures de jeu, on en est encore au stade où quasiment tout notre argent sert à payer les soins, ce qui rend l’amélioration de l’équipement toujours aussi difficile à financer…
Et, cerise sur le gâteau, dans le dernier donjon le jeu se lâche totalement : impossibilité de fuir, abandon du donjon possible seulement en échange de la vie d’un de vos précieux héros niveau 6 (même Wizardry l’avait pas osée celle-là !), spécialisation des ennemis dans un type de dégâts (qui nécessitent un équipement spécifique, mais qu’on ne peut pas connaître tant qu’on a pas essayé au moins une fois le donjon, et donc perdu au minimum un héros ce faisant). En plus de cela, le dernier donjon est à faire quatre fois de suite, et empêche les héros ayant remporté un de ces rounds de remettre les pieds une deuxième fois dans ledit donjon. Il vous faudra donc quatre équipes de quatre héros niveaux 6 différentes pour venir à bout du jeu. Et vu la difficulté, vous pouvez multiplier ce nombre par deux sans problèmes. Et c’est juste nul ! Moi, quand j’échoue un donjon difficile, j’ai envie de le réessayer (relativement) rapidement, pas de devoir me taper 10 ou 20 donjons secondaires avant même d’avoir une chance d’y remettre les pieds…
Et du coup il va vous falloir recruter des pauvres gars niveau 3, passer des heures à les monter au niveau 6 en croisant les doigts pour qu’ils ne meurent pas au passage, farmer encore et encore de l’XP et de l’équipement, avant même d’avoir une chance d’essayer. Le jeu était déjà répétitif avant de sombrer dans de telles extrémités, mais là il en devient juste ridicule. Et malheureusement, étant incapable d’abandonner quelque chose dans lequel j’ai investi autant de temps, j’ai persévéré jusqu’à finir le jeu, alors que clairement le plaisir diminuait constamment. Même les répliques très cools et hyper bien doublées du narrateur deviennent usante au bout de cent heures, c’est dire…
En gros j’aime bien la difficulté, et je comprends que dans un jeu dur le joueur doit être puni s’il fait le malin. Mais bon, mourir dans un Dark Souls c’est perdre grand maximum 30 minutes de progression. Perdre un héros niveau 6 dans Darkest Dungeon c’est regarder 6 heures de farm partir dans les toilettes…
Bref si vous voulez apprécier Darkest Dungeon, jouez-y 15 à 20 heures avant de passer à autre chose, et ne tentez surtout pas de finir le jeu.
Pour moi qui l’ai fini, ça sera un 12/20 parce la dernière ligne droite est particulièrement ratée, et que la persévérance n’est récompensée que par une qualité déclinante et un niveau de frustration de plus en plus élevé.