Déraciné par JipéF

Ca pour être inattendu, c'est inattendu : le projet post Dark Souls de Miyazaki est un jeu d’aventure en réalité virtuelle, qui serait donc probablement passé totalement inaperçu si il n'avait pas un tel géniteur. Toutefois, quand on connait le contexte, ce n'est pas forcément aussi étonnant : Déraciné n'est pas en effet le projet principal de From Software, mais plutôt un bonus, une expérimentation, en attendant Sekiro. Il n'empêche, l'équipe des Souls qui s'essaie à un jeu VR, ça excite la curiosité. Alors, vraie réussite ou expérimentation hasardeuse ? Un peu des deux en fait.

Déraciné réussit incontestablement sur certains points. Premièrement, le jeu est absolument superbe, avec une direction artistique de toute beauté. Par bien des points, cette dernière rappelle Bloodborne nettoyé de toute noirceur. Imaginez l'infirmerie de Yosefka, mais en clean, et avec de la musique de chambre (superbe d'ailleurs) : voila, vous y êtes. Deuxième bon point, le très bon pitch de base, parfaitement adapté pour un gameplay VR : le joueur est un esprit, immatériel et invisible. Son rôle est d’influencer des personnes et des situations afin qu’un destin pré-déterminé s’accomplisse, un peu à la manière d'un ange gardien. Son action se situe en dehors du temps, et par conséquent il évolue au sein de scènes totalement figées, dans une ambiance à la fois paisible et inquiétante. Quand il réussit à accomplir une action, le temps reprend son cours pendant quelques secondes. Autant être direct, c'est magnifique et fascinant à voir et c'est certainement cet aspect contemplatif qui fait la plus grande qualité du jeu.

Mais de manière plus pragmatique, Déraciné n'est pas autre chose qu'un point and click en VR, assez basique de surcroit, dans lequel on a souvent recours à une utilisation un peu random de tous les objets quand on est bloqué. Cela ne dure jamais bien longtemps, car le jeu n'oppose pas vraiment de challenge et est malheureusement doté d'un durée de vie très courte, même pour le genre (5 heures en ligne droite, au maximum). De plus, la narration inutilement alambiquée et les personnages un peu stéréotypés ne poussent pas vraiment à l'indulgence quand on connait le passif du studio dans ce domaine.

Globalement, l'appréciation de Déraciné va donc énormément dépendre de l’importance attachée par le joueur à la direction artistique, son seul et unique point fort. C'est bien certes, mais malheureusement pas forcément suffisant pour laisser un souvenir impérissable. Pour ma part, j’ai plutôt bien apprécié Déraciné, fasciné que j'étais par son bois qui craque et ses violons, mais celui qui espère retrouver la patte des créateurs de Dark Souls, notamment dans le gameplay ou le défi, sera très clairement déçu.