666ème note pour un jeu vidéo, et le hasard fait que ça tombe sur un jeu d'horreur, ça méritait bien une critique, non ?
Bon, les FPS c'est pas forcément ma came, mais j'avais plutôt apprécié le charme rétro et le dynamisme des premiers Doom (enfin, surtout du premier). En plus de ça j'aime bien les jeux d'horreur depuis quelques années, donc le mélange des deux semblait prometteur. Malheureusement cette phrase tout comme le jeu restera à jamais à l'imparfait.
Et en vrai, le problème est évident dès le début : comment tu veux mélanger le dynamisme et le sentiment de surpuissance d'un jeu comme Doom avec le sentiment d'angoisse d'un survival ? Eh bien c'est simple : tu ne peux pas. Ou en tout cas, personne chez ID Software n'a trouvé l'astuce.
Les seules idées qu'ils ont eues pour trouver un compromis entre ces deux styles, c'est de réduire considérablement les zones de jeu pour jouer sur le côté claustrophobique et de foutre des ennemis prêts à attaquer derrière un quart des portes du jeu, histoire de te faire sursauter.
Dans les deux cas, ça ne sert qu'à saper la vie de notre héros de façon injuste. On n'a plus assez d'espace pour tourner autour de l'ennemi et esquiver ses coups (vous m'expliquerez comment je suis censé me sortir indemne d'une rencontre au détour d'un couloir avec l'enculé qui a une tentacule à la place du bras) et on se prend des dégâts gratuitement à chaque fois qu'un ennemi t'attend derrière une porte et te saute à la gorge.
Et on n'est pas aidés par le fait que le fusil à pompe, la seule arme correcte au corps-à-corps, semble faire des dégâts aléatoires. L'ennemi de base du jeu (l'alien qui lance des boules de feu) peut aussi bien mourir dès la première balle à bout portant ou ne tomber qu'au troisième coup de feu. Et même si les médikits sont présents en quantité suffisante tout au long de l'aventure, se prendre des dégâts inesquivables peut vite vous mettre dans une situation inconfortable.
Ne mentionnons pas non plus la hitbox de notre cher Doomguy qui semble faire 8 fois sa corpulence réelle. Je ne compte pas le nombre de fois où un ennemi a balancé un projectile qui m'est clairement passé à côté et où je me suis pourtant pris des dégâts.
Ca, c'était pour le système de jeu. Au niveau du level-design ça n'est guère plus réussi, les niveaux sont extrêmement longs et on s'y fait pas mal chier. La longueur moyenne d'un niveau dans Doom 3 (resets compris), c'est 30 minutes. Autrement dit, c'est le temps que les speedrunners mettent pour boucler Doom 1.
Je n'ai certes pas la prétention d'être aussi talentueux, mais même à mon modeste niveau on se rend compte que le rythme de jeu est infiniment plus lent qu'avant. Certains couloirs mettent plusieurs minutes à être parcourus sans jamais qu'on croise d'ennemis, l'obscurité force à utiliser la lampe de poche du Doomguy, qui malheureusement doit être éteinte toutes les 20 secondes pour économiser les piles… Et si jamais on tombe dans une salle où on est encerclés par les pires ennemis du jeu (sachant qu'à peu près tous les ennemis répondent à cette définition : les nécromanciens, les têtes volantes, les bébés insectes, Jean-Tentacule…) et qu'on meurt sans avoir pensé à sauvegarder au préalable, eh bien on est bon pour tout se retaper.
Dieu merci, les sauvegardes sont illimitées, mais au bout d'un moment on se retrouve à sauvegarder dans chaque salle, ce qui ralentit encore davantage le rythme.
Et puis tous les lieux se ressemblent, c'est nul. Sur la trentaine de niveaux, il n'y en a que deux (dont un bossfight) qui se passent en Enfer, le reste se déroule dans une station sombre et impersonnelle (avec parfois un peu de magma), on n'a vraiment pas la sensation de progresser dans la narration ni d'être sur Mars.
Pire que tout, il n'est pas rare que la solution de certaines "énigmes" soit simplement d'appuyer sur un écran d'ordinateur pour activer une action. Sauf qu'on ne fait pas toujours attention à ces maudits écrans et qu'il m'est arrivé plusieurs fois de tourner en rond dans un niveau sans voir celui qui allait débloquer ma progression. On passe d'ailleurs un certain temps à manipuler ces ordinateurs pour faire un peu tout et n'importe quoi (remettre le courant, conduire un chariot, taper un code, activer un ascenseur…), sûrement une manière pour les développeurs d'expier leur frustration de passer toute leur vie derrière un PC.
Et comme si le rythme de jeu n'était pas déjà assez lent, le scénario a décidé de prendre encore plus de place que d'habitude. On affronte toujours des démons des Enfers hein, sauf qu'il faut écouter une pléthore de personnages aux modèles 3D interchangeables nous décrire comment on en est arrivés là. On s'en fout putain, laissez-moi jouer !
Le jeu n'est pourtant pas exempt de qualités. Déjà, le gameplay fonctionne bien, Doomguy est réactif et dispose d'un bon arsenal d'armes presque toutes utiles (qui utilise encore le pistolet une fois le fusil à pompe et la mitrailleuse obtenus ?) et la transition vers un gameplay entièrement en 3D s'est bien déroulée.
Surtout, l'ambiance est vraiment angoissante. Certes, les couloirs étroits et sombres ça pue la merde lors des phases d'affrontement, mais quand on se contente d'explorer ça fait son petit effet, on ne sait jamais trop ce qui nous attend derrière une porte ou un recoin. Pour ne rien gâcher, la VF est très bonne (il y a beaucoup de doubleurs différents) et quand l'antagoniste se décide à nous contacter par radio avec sa voix menaçante, ça fait toujours un peu sursauter.
Les derniers chapitres du jeu se décident aussi à nous priver de nos armes amassées jusque-là et nous limitent beaucoup plus au niveau des munitions. C'est à double-tranchant parce que ça rend chaque affrontement (surtout contre des hordes d'ennemis) très frustrant, mais en même temps quelle superbe idée pour mettre le joueur dans une position inconfortable au pire moment possible !
Mais voilà, cette bonne ambiance et ce bon gameplay sont trop antithétiques, ils ne sont pas faits pour coexister, et certainement pas dans un jeu aussi long. Et encore moins dans un jeu qui s'appelle Doom !
La meilleure manière de sauver le jeu serait de diviser la longueur de ses niveaux par deux, d'abandonner cette idée stupide de la lampe torche et surtout d'en faire un spin-off ou une nouvelle série, pas un Doom numéroté. Là, on tiendrait quelque chose. Pour le titre, j'ai pensé à Dead Space... Comment ça, "c'est déjà pris" ?
La version Switch de Doom 3 inclut deux extensions en plus du jeu principal, mais j'ai vraiment pas envie de les faire maintenant, je préfère prendre mes distances pour le moment. Alors que les extensions de Doom 1, 2 et 64 avaient été promptement effectuées dès l'aventure principale bouclée, je pense que c'est une synthèse suffisante de mon ressenti.