Matriochka
La mythique poupée russe, qui ne cesse de dévoiler, étape après étape, les merveilles qui la contiennent. Finesse des dessins, richesse des couleurs, douceur de la sculpture. Et tout ce vide à...
le 5 mars 2015
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Grand amateur de J-RPG, j’avais toujours regardé évoluer les RPG occidentaux de loin, comme on jetterait un vague coup d’oeil à une planète lointaine en se disant qu’un jour, il faudra aller y faire un tour… N’étant pas un grand féru d’heroic fantasy, les witcher, skyrim et dragon age ne m'inspiraient pas des masses.
Puis, l’occasion se présentant, j’ai tâté de ce “Dragon Age : inquisition”, histoire de pas mourir con (et dieu sait qu’il y a encore du boulot) et récemment un peu douché par les sorties J-RPG (Des bisous, Square Enix). En gros, j’ai vu de la lumière, ça avait l’air sympa, je suis rentré.
Le conclave de la Chantrie (le vatican du patelin si vous préférez) a explosé, ouvrant des multitudes de failles magiques dans le monde de Thédas, failles qui vomissent démons et horreurs diverses boulotteuses de civils innocents. Dépêchés sur les lieux, les soldats ne trouvent qu’un survivant/une survivante : vous. Vous êtes incapable de vous souvenir ce qui est arrivé alors que vous étiez dans le conclave et pour parfaire le tableau, vous portez maintenant une marque “connectée” à la brèche, la plus grande faille, celle d’où tout est parti, marque qui vous consume lentement. On vous traite d’assassin, de monstre, on vous enchaîne, bref, le jeu commence sous les meilleures auspices. Il s’avère rapidement que votre marque vous permet de refermer les failles et qu’il serait donc opportun que la populace ne vous trucide pas. Renommé(e) “Messager d’Andrasté”, vous formez avec plusieurs compagnons la communauté de l’anneau… heu, pardon, l’Inquisition, dont le but est d’aller refermer cette saloperie de brèche et gourmander le petit salopiot à l’origine de tout ce foutoir. Tout cela au milieu de castes qui choisissent naturellement le pire moment pour se foutre sur la gueule (c’est vachement réaliste, pour le coup).
Le scénario de DAI va donc suivre l’évolution de votre avatar, du paria honni jusqu’à la figure d’autorité quasi-divine à la tête de l’Inquisition, combats, manœuvres politiques et diplomatiques à l’appui. Il n’est pas original un broc - prenez le seigneur des anneaux, on est sur un schéma narratif et des symboliques très similaires - mais prend place dans un univers riche et complexe, qui a déjà eu deux jeux et une pléiade de romans et comics pour s’étendre, et propose au joueur des dilemmes pour “écrire” une certaine version de l’histoire.
Si la trame narrative est plutôt convenue, on peut porter au crédit de ce DAI son approche plutôt intelligente de thème sensibles comme le racisme, l’intégrisme religieux ou la notion de sacré dans sa globalité : en vous mettant dans la position d’un demi-dieu alors que vous n’êtes qu’un individu moyen, l’histoire ne se borne pas à taper sur la religion mais à confronter son aspect politique et son aspect spirituel, rappelant combien l’équilibre entre les deux est précaire et toujours source de violence lorsqu’il se rompt. Ajoutons à ça une mise en scène diablement efficace, des dialogues ciselés (et bien traduits, même si je trouve qu’il y a quelques “arrangements” avec la VO qui feront râler si on est puriste), Inquisition est expérience narrative qui n’a rien de révolutionnaire dans ses fondements mais beaucoup de talent dans son exécution. Le jeu manie à la perfection les codes de l’aventure épique, qu’il modernise, tout en sachant y immerger le joueur. Qui plus est, pour qui n’est pas féru de la tendance qu’a l’heroic fantasy à nous gaver de notions absconses, l’essentiel de l’univers est résumé via des documents trouvés ça et là, que rien ne vous oblige à lire. En somme, on peut très bien apprécier le jeu et son histoire en mode “light” sans avoir besoin de savoir que les impériaux d’Orlaïs tricotent leurs slips en fil de hautecime depuis 15 générations.
Et puisqu’on parle d’immersion...
Ici point de héros imposé par le jeu : vous personnalisez votre propre personnage, son sexe, sa race, sa classe, son physique, de la forme de ses joues au dégradé de ses iris ou la profondeur de sa cicatrice. Pour ce qui est de son background, si le jeu en impose en fonction de la race choisie (humain, elfe, nain ou qunari), il est assez sommaire pour que le joueur puisse réellement le développer à sa guise au travers des dialogues dans le jeu, comme sa personnalité. Certes, cela ne débloque qu’une poignée de missions anecdotiques mais la valeur ajoutée se situe plus niveau immersion que gameplay : le joueur a la possibilité de se faire un personnage sur mesure, que ce soit de faciès, d’histoire ou de caractère. Ok, les possibilités offertes ne sont pas infinies et on pourra arguer que quels que soient les choix, votre personnage aura toujours l’air badass et flattera votre ego (on a bien quelques instants gênants lors des scènes de romance mais votre héros sera montré à son avantage la plupart du temps). Pour moi, c’est un choix intelligent, d’autant que côté personnages, DAI propose neuf équipiers plutôt cosmopolites : mages, voleurs, esprits, qunari, rebelles… Il est d’ailleurs assez réjouissant de voir ces derniers interagir sur le terrain, parfois alors même qu’ils sont en train de défoncer du démon. En somme, le jeu en propose pour tous les goûts, libre à vous de coller un personnage générique ou de passer deux plombes à customiser le double menton de votre inquisiteur (sérieux, quelqu’un a déjà pris un avatar générique sans jouer avec le logiciel de faciès ?).
Côté romances, Bioware a relativement bien équilibré : minimum deux partenaires potentiels pour chaque sexe et orientation sexuelle. Pas d’énormes clichés à déplorer non plus, même si on peut reprocher à DAI un poil trop de parti-pris angélique : n’espérez pas jouer les dictateurs, même si vous répondez comme un pourri et exécutez à tour de bras, vous serez de toute façon dans le bon camp. Tout au plus, certains de vos compagnons se tireront mais vous serez toujours un sauveur. Le mode “Sale race” était peut-être prévu en DLC…
Quant aux salopards de service, ils se décomposent en “Pourritures irrattrapables” et “Victimes abusées” qui viendront vous pleurer sur les genoux une fois que vous leur aurez collé une dégelée. Un peu facile, d’autant que le “bad guy” cesse réellement d’être une menace effective à partir de la première confrontation avec l’inquisiteur (confrontation qui a malgré tout sacrément de la gueule, il faut le dire) : le jeu se borne un peu trop à nous répéter que votre adversaire menace l’équilibre du monde sans réellement nous le montrer et donne au final des allures un peu “corvée nécessaire” à lui mettre des bâtons dans les roues. Si cela est un peu plus réaliste que se précipiter à cinq sur un donjon bourré jusqu’à la gueule de monstres teigneux, on peut regretter le manque d’enjeu, d’autant que l’affrontement final est une monumentale blague, même en mode difficile. Pour un soi-disant monstre surpuissant, ça le fait pas trop de se faire péter si facilement le râble par un péquenot qui a la main verte…
Même constat sur les divers antagonismes, dont la menace est un peu trop vite éclipsée/résolue. La mise en scène sauve le tout mais derrière, on ne peut s’empêcher de se dire, aux vues de la tension amenée par l’histoire que ce DAI est trop solaire et optimiste (surtout si on le compare à ses prédécesseurs et leur résignation presque macabre). Le jeu baigne davantage dans une ambiance mystique et un récit héroïque où le triomphe est inévitable, on aurait apprécié un peu plus de nuance, même s’il est grisant d’être le surhomme qui marche dans une lumière quasi-divine...
Soit, côté histoire et perso, DAI a mis les petits plats dans les grands - avec quelques éclaboussures tout de même - quid du gameplay ?
On est ici en présence d’un monde semi-ouvert comportant une dizaine de cartes et lieux différents, gigantesques pour la plupart et offrant des affrontements en temps réel, en action-RPG : vous apercevez les ennemis sur votre “radar” et lorsqu’ils vous repèrent, ils vous tombent sur le coin de la gueule. Une touche pour attaquer, de quatre à huit touches pour enclencher les capacités de votre personnage jouable, les trois autres équipiers étant gérés par l’IA du jeu et les ennemis se déplaçant dans le décor autour de vous. On engrange de l’XP, à chaque niveau gagné, chaque personnage peut déverrouiller une capacité en fonction de sa classe (voleur, guerrier et mage, chacun se spécialisant entre trois “sous-catégories” au fil du jeu).
Le système, bien rodé, tient compte de l’évolution des quatre membres actifs de votre équipe pour la répercuter sur ceux qui ne combattent pas : lorsque toute l’équipe monte d’un niveau, les membres laissés sur le banc de touche évoluent également. DAI évite ainsi au joueur de fastidieuses heures de farm pour équilibrer toute son équipe.
Tout est modifiable via le menu, raccourcis, compétences accessibles, IA, équipement. Si l’IA se montre tout à fait capable de gérer le combat (parfois mieux que vous, c’en est presque vexant), les possibilités de la programmer restent assez sommaires et dès lors qu’on veut développer une véritable tactique, il devient indispensable de prendre quatre fois la main. On pourra aussi grincer des dents face à un pathfinding qui jette parfois un coéquipier en travers de votre route, notamment dans les environnements étroits, mais rien d’insurmontable.
L’évolution est relativement lente, lié au fait notamment que les cartes visitées sont gigantesques et les combats de fait plus espacés. Le jeu permet cependant de gagner de l’XP en complétant certaines quêtes ou en lisant les divers documents sur votre route.
Côté combat, s’il est assez jouissif de taper en direct sur l’adversaire, le champ de bataille peut parfois devenir bordélique. On connaît tous la caméra alcoolique des heures les plus sombres de la 3D, qui se colle toujours au mauvais endroit. Comment Bioware a-t-il géré ? En nous laissant nous démerder avec, mes chatons : vous serez contraint de réajuster régulièrement la caméra pour éviter de vous retrouver aux prises avec des atomes d’oxygène pendant que le reste de votre équipe, tournée de l’autre côté, en découd. Mais je suis méchant, il arrive que le jeu gère un peu sa caméra tout seul, ce qui permet de constater qu’elle a probablement un fétiche sur les feuilles d’arbousiers. Inutile d’espérer de la caméra qu’elle vous suive efficacement, ce sera à vous de faire le boulot, ce qui peut parfois s’avérer pénible pour s’orienter ou casse un peu le rythme de l’action. On regrette également le système des précédents Dragon age, à la souris, qui permettait de se rapprocher automatiquement de sa cible.
Il est possible de faire basculer le système de combat en mode “tactique” vue du dessus. Quoiqu’il soit assez basique, proposer une alternative au combat temps réel est un plus appréciable pour les joueurs plus friands de gestion que de baston, surtout face aux adversaires de grande tailles qui ont la fâcheuse tendance à boucher la vue (merci la caméra, incapable de bouger son gros cul toute seule pour se replacer !)
Outre vos personnages, il faudra également manager l’Inquisition en récoltant points de puissance - utilisés sur la table tactique pour débloquer de nouvelles cartes - et points d’influence - qui permettent des bonus appliqués à l’ensemble des personnages comme de nouvelles améliorations ou choix de dialogue : pour se faire, outre les missions de terrain, vous pourrez envoyer vos trois conseillers aux compétences respectives en opérations, dont ils rapporteront points, argent, objets rares, ressources.
Côté exploration, les cartes sont immenses -et pas franchement toujours claires, il m’est arrivé plusieurs fois de tourner autour d’un piton rocheux pour trouver un accès, ou un bug, qui me permette d’accéder à une zone. Il est toutefois possible de débloquer des “points de téléportation” au fil de l’exploration - sous la forme de campements de l’inquisition- permettant au fur et à mesure que l’on maîtrise le territoire de s’y déplacer plus facilement.
Ajouté à cela la possibilité de récupérer des ressources, de crafter, améliorer, personnaliser amures et armes, celle de monter à cheval (pas indispensable et assez mou, selon moi, mais les collectionneurs se régaleront à remplir leurs écuries de montures improbables), de recruter des PNJ pour votre inquisition, d’améliorer vos objets curatifs, votre QG ou vos relations avec vos équipiers - parfois en vue d’entamer une relation amoureuse avec eux- et il est assez clair que DAI est énorme en terme de contenu. Il se contente certes de compiler toutes les features ayant fait leurs preuves dans le genre RPG mais là où on pouvait craindre un énorme bordel incompréhensible, le jeu est bien foutu et n’importe quel joueur un minimum curieux pourra comprendre et exploiter l’ensemble de ses mécaniques au bout de quelques heures (malgré des menus parfois pas nickel, on y reviendra).
Heureusement, par ailleurs, car le tutorial est plus que léger : tellement discret qu’il m’est arrivé de le fermer avant de réaliser que le jeu voulait m’expliquer quelque chose. Et il n’existe pas réellement de tutorial accessible depuis le menu, on se sent donc un peu livré à nous même, aux commandes de cette énorme machine qu’est DAI. Au point que je conseillerais aux non initiés de faire quelques heures de découverte et de recommencer leur partie une fois un peu plus à l’aise avec la masse d’informations à intégrer. Reste qu’une fois ce cap franchi, le jeu se gère très bien sur tous les terrains en même temps. Il offre une grande liberté - certes relative - et une durée de vie plus que satisfaisante (compter 50-60 heures en ligne droite, plus de 100 heures pour remplir l’essentiel des quêtes secondaires). En outre, comme les choix que vous ferez fermeront l’accès à certaines quêtes, une seconde partie sera nécessaire pour couvrir l’ensemble des possibilités, autant dire que si vous êtes complétiste, vous exploserez les deux cent heures à l’aise (et qu’on devra vous interner ensuite). Cela donne parfois la sensation un peu étrange de ne jamais en voir le bout mais je me vois mal geindre qu’un jeu propose TROP de choses. On pourrait également reprocher des cartes trop vides mais après la curée Dragon age Origins où vous ne pouviez pas faire deux pas sans qu’une meute de monstres cinq fois plus nombreux ne vienne vous mordre le cul, j’avoue préférer largement le calme d’Inquisition, vu que je suis un joueur plus exploration qu’action. Affaire de goût.
Côté menus, s’ils sont assez complets et intuitifs, je reste convaincu que le statut et l’inventaire auraient pu être mis sur le même écran avec des onglets. Autre détail, le crafting est parfois un peu chiant à gérer, dans la mesure où il ne permet pas d’afficher l’équipement actuel du personnage pour comparer avec ce qu’on s’apprête à forger. Qui plus est, toujours question d’optimisation, il y a un micro lag assez lourd quand on passe d’un personnage à l’autre. Bien, donc, mais perfectible (surtout sur console où, pour l’avoir testé, c’est brise-burne au possible…).
Je ne dirai rien du mode multijoueur puisque je n’aime pas les gens et que je crèverais la gueule ouverte plutôt que de laisser un quelconque joueur humain venir contaminer mes heures vidéoludiques de sa présence. Ou pour faire court : pas testé et rien à foutre <3.
Pour ce qui est de l’aspect technique : c’est beau dans la moyenne de ce qui se fait pour l’époque malgré une qualité des textures parfois inégale, le jeu est pas mal gourmand pour ce qu’il propose et y jouer en configuration minimale occasionnera du lag, du clipping et quelques bugs de textures variés assez chiants. On peut également faire suer sur le langage corporel qui est le même pour tous les PNJ (vu leur nombre, faut pas trop en demander mais ça aurait été sympa de varier au moins pour vos coéquipiers…) ou encore les temps de chargement pour chaque map qui laisse le temps d’aller lire La divine comédie et de prendre des notes, pour peu qu’on ait pas une machine un peu burnée.
Tout ça sent l’optimisation “ils ont qu’à avoir une machine à 1000 boules, ces pécores” et si vous avez un ordinateur qui tient davantage du grille-pain que de la bécane de course, vous pourrez vous asseoir dessus (le jeu, pas le grille-pain. Je veux pas être responsable de vos accidents domestiques). Le jeu souffre également de pas mal de bugs, qui vont du comique (des moitiés de personnages qui sortent des murs, des PNJ qui flottent au milieu de nulle part) au chiant (une cinématique qui refuse de s’enclencher et empêche l’avancement d’une quête), jusqu’au carrément rédhibitoire (quête refusant de se valider après avoir été terminée, jeu bloqué et sauvegarde bonne pour la poubelle). Ok, sur un jeu de cette ampleur, il est compliqué de tout lisser mais si on peut pardonner les glitches graphiques, ceux qui pénalisent carrément le joueur, c’est plus que limite. Il m’est arrivé deux-trois fois par parties de devoir recharger une sauvegarde car un bug m’avait tout simplement empêché de continuer. Sympa quand il faut revenir 3 à 4 heures en arrière pour pallier les oublis des développeurs.
La musique quant à elle est non seulement parfaite en terme de composition - thèmes épiques mais également thèmes d’ambiance, chansons de bardes - que parfaitement dosée, laissant lors de l’exploration le simple bruit de fond des lieux pour ne se déclencher que par instants, nimbant l’atmosphère d’une touche d’étrangeté et de magie, toute en finesse. Trevor Mortis nous offre du beau son orchestral, intense et nuancé, la BO est un miel pour les oreilles. Mention spéciale au thème principal, dérivé en différentes versions au fil du jeu.
Les doublages, VF comme VO sont exemplaires - même si je trouve personnellement la VO plus pêchue - et parachèvent le travail d’écriture des personnages. Rien à redire, on a du bon son à tous les niveaux.
Sur ses aspects techniques, DAI est donc à la hauteur des attentes même si on peut râler sur une optimisation feignasse et plusieurs bugs - ce qui est une constante sur les triple A, certes, mais perso je me réjouis pas d’avoir le choléra parce que mon voisin a des métastases. Et lutter pour se sortir d’une texture parce que le jeu ne sait plus quoi faire, c’est pénible (et toi au fond, viens pas me dire que j’ai qu’à jouer sur console, j’ai pas le PIB du Honduras à sortir tous les quatre ans parce que Sony ou microsoft a changé quatre pièces sur sa bécane et a ajouté un chiffre derrière pour faire joli. Et on m’ôtera pas l’idée que les RPG à la manette, c’est dégueulasse).
Causons un peu maintenant de ce qui est le fer de lance de Bioware dans ses grandes licences : le choix.
L’idée, c’est que les dialogues s’interrompent régulièrement pour demander au joueur de choisir une réplique dans une roue de dialogue (chacune correspondant à trois attitudes : pacificatrice, narquoise, agressive, avec parfois quelques nuances selon la quantité de réponses possibles), ou de faire un choix tactique (à qui se rallier, épargner ou non un adversaire, etc…) qui influera sur la suite de la partie.
Et si question immersion, c’est du tout bon - couplé à la possibilité de personnaliser son inquisiteur on a réellement le sentiment de le “dessiner” au travers de ses interventions - question conséquence, c’est… discutable.
C’est discutable car comme dis plus haut, même en jouant les pourritures, le karma ne reviendra pas vraiment taper à votre porte pour vous présenter la note, ou du moins à de trop rares occasions et le jeu compte davantage sur l’attachement du joueur à certains personnages pour orienter ses décisions que les potentielles retombées, souvent absentes. On peut argumenter qu’une partie de ces choix auront des conséquences dans le prochain opus de la saga, comme ça a été le cas pour Origin ou le second opus mais quand on achète un jeu, on apprécierait de ne pas avoir une histoire en kit. DAI est trop timide sur les sanctions, trop frileux et favorise l’immersion plutôt que le réel choix moral, s’en remettant purement et simplement au ressenti du joueur au lieu de développer véritablement sa mécanique de choix, qu’on a connu autrement plus piquante dans Dragon Age Origins, par exemple. Ici toutes les décisions prises donnent le sentiment de préparer le terrain pour un DA4.
Et cela m’amène à un constat global sur ce DAI - et ce pour quoi il m’a tant plu.
Ce n’est pas tant un RPG qu’une expérience narrative. Soit, il emprunte aux mécaniques du RPG et se vend comme tel mais de lui on retient davantage l’implication émotionnelle qu’il demande que ses combats dantesques : exploration plutôt qu’action, émotion plutôt que raisonnement, mise en scène plutôt que gameplay effectif, souffle épique plutôt que réalisme macabre, Dragon age s’est depuis Origins pas mal pimpé. Un peu jeu de gestion, pas mal jeu de rôle, un peu jeu de romance, en définitive DAI est une sorte d’hybride ambitieux dans sa forme et sa finition mais un peu “facile” dans son fond. Ce qui m’agace passablement car la recette a sacrément bien pris sur moi malgré ses quelques problèmes techniques et sa base même, qui est discutable : on pourrait accuser DAI de balancer pas mal de poudre aux yeux. Du coup, quoi que je ne partage pas leur avis, je peux comprendre les joueurs déçus par cet opus.
Vous êtes-vous déjà demandé ce qui vous plaisait dans le média jeu vidéo que n’ont pas les autres médias ? Personnellement, c’est l’illusion dont il est capable : en insufflant suffisamment de puissance narrative et artistique dans ses lignes de code pour me les faire oublier, m’immerger de manière suffisamment profonde pour troubler la ligne entre réalité et virtuel. Et DAI, nonobstant ses approximations et ses petites lâchetés narratives est un modèle du genre : ses personnages bien écrits, son univers foisonnant et la multiplicité des choix offerts confèrent au soft l’illusion que chaque inquisiteur n’aura pas la même partie, il suffit de parler avec d’autres joueurs pour s’en convaincre. La simplicité du fond se dissout dans la richesse de la forme avec DAI et oui, c’est effectivement un peu trop artificiel pour trouver ça parfaitement honnête (et puisqu’on parle d’honnêteté, merci pour la fin en DLC. EA, vous êtes de sacrés enculés.) mais…
J’ai un peu de mal à faire un reproche aussi tranché à DAI : c’est le fondement même du jeu vidéo, de tromper le joueur avec la forme. C’est même ce qu’on lui demande. Alors oui, DAI aurait pu davantage soigner ses conséquences et son méchant, aurait pu - et dû - caresser un peu moins le joueur dans le sens du poil et lui coller quelques claques histoire de ne pas l’endormir dans l’illusion trop lisse d’être un héros inarrêtable mais on ne peut pas décemment le qualifier de mauvais jeu pour ça.
Si je parlais au début de J-RPG, ce n’est pas gratuit : je préfère l’immersion à l’action et l’histoire au gameplay, fort de mon expérience sur les final fantasy qui en matière de poudre aux yeux sont un peu des égéries du genre. Et DAI est ma meilleure expérience en la matière à ce jour, de très loin : intelligent, bien écrit, doté d’une mise en scène qui fait honneur au récit épique, il mérite largement sa communauté de fans. Même s’il a un peu trop tendance à les embobiner.
Si vous êtes plutôt combats épiques et stratégiques, passez votre chemin, DAI risque de ne pas combler vos attente. Si par contre vous attendez davantage de scénario, de personnages intenses et de beaux récits héroïques léchés, Vous vous poudrerez allègrement la rétine avec le “petit” dernier de la saga. Qui annonce du lourd pour son prochain opus.
Sur ce, l’inquisiteur vous laisse. Il a le monde à sauver.
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Créée
le 20 févr. 2017
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