Partie sur les chapeaux de roues, en 1999, Driver est un précurseur du genre qui deviendra le GTA-like. Une ville ouverte, des poursuites échevelées, une ambiance cinématographique, tels étaient les ingrédients de la formule Driver. Dès le second épisode Tanner, le héros, acquiert la faculté épatante de sortir de sa voiture pour voler le premier véhicule qui passe. C'est à ce moment que la franchise commença son long déclin jusque dans les limbes du frame-rate souffreteux et du gameplay avarié. En état de mort cérébrale la série est récupérée par Ubisoft en 2006. L'éditeur français prend alors son temps et revient au bout de 5 ans avec Driver : San Francisco qui se voit bien en sauveur du soldat Tanner. Ambition déplacée ou vraie réussite ?


DRIVER : CODE QUANTUM

John Tanner est content il vient d'arrêter son ennemi de toujours, Charles Jericho, mais ce dernier ne trouve rien de mieux à faire que de s'échapper... et d'envoyer Tanner à l'hôpital dans la manoeuvre. Au réveil de Tanner les choses ne sont plus tout à fait comme avant. En effet il se découvre un talent exceptionnel, le shift, qui lui permet de s'envoler au dessus des immeubles pour prendre possession du corps de n'importe quel conducteur, et donc n'importe quel véhicule, environnant.
Un nouveau mécanisme de jeu qui permet à la licence de renouer avec ses vertes années. Rigides, imprécises, molles, laborieuses, les phases à pied ont peu à peu tué l'intérêt de Driver et grâce au shift, on n'en a plus besoin ! Souple et intuitif ce système permet de changer de véhicule sans se prendre la tête, le ralenti opéré lors de la manoeuvre permet de faire son choix calmement parmi les 130 véhicules sous licences que comporte le jeu. Dodge Challenger RT, Shelby GT 500, Lamborghini Countach, Mustang Fastback, Pagani Zonda... les modèles de légende se bousculent et offrent un large choix d'approches différentes. Le bourrin prendra un SUV lent mais capable d'emboutir n'importe quoi alors que le féru de performance se tournera plutôt vers un luxueux modèle sportif pour faire la différence via le chrono. Evidemment les modèles les plus performants sont assez rare dans les rues de San Francisco mais le collectionneur pourra acheter les voitures de ses rêves dans des garages moyennant des points de volonté glanés lors des courses ou lors de divers exploits (drift, saut, conduite au raz du trafic). Ainsi on aura toujours la possibilité de choisir une monture précise pour réussir certaines missions délicates.

Mais le Shift ne se limite pas au simple choix d'un véhicule par coquetterie. En effet on pourra par exemple continuer une poursuite mal engagée en chiftant dans un véhicule plus proche des fuyards ou, mieux encore, shifter dans un véhicule roulant à contre sens pour l'envoyer sur nos cibles et les mettre hors course de façon définitive. Les possibilités du Shift sont multiples et bien exploités même dans les missions scénarisés. On devra par exemple éliminer plusieurs véhicules simultanément aux quatre coins de la ville ou alors emmener 2 bolides en même temps à la victoire lors d'une course de rue. En shiftant de l'un à l'autre on s'assure de notre double victoire. Bien sûr le système à certaines limitation comme l'impossibilité de shifté dans le corps des fuyards/poursuivants ou l'obligation d'emmener un véhicule précis au bout de la course. Les petits malins qui se voyait déjà gagner toutes les courses en shiftant juste devant l'arrivée en seront donc pour leur frais. Des restrictions un peu arbitraires mais indispensable pour ne pas transformer cette faculté en cheat code vidant le jeu de tout intérêt.


BOULEVARD DE LA MORT

Car il n'y a pas que le Shift dans Driver : San Francisco, il y aussi, et surtout, la conduite. On retrouve donc la conduite très arcade où le survirage est roi qui a fait le renom de la série. Les véhicules répondent bien et le jeu restitue correctement le poids des engins si bien qu'on sent bien nos trajectoires lors des incontournables drift que l'on peut ainsi ajusté avec un peu de doigté.
La sensation de vitesse est acceptable, on a de bonnes sensations et on arrive à garder une certaine lisibilité sur l'environnement. Evidemment on est loin de la surpuissance quasi orgasmique ressentie dans un Burnout Paradise (on cherche encore le jeu qui offrira des sensations de vitesse plus impressionnantes) mais c'est tout à fait satisfaisant.
Monde ouvert oblige les tracés font la part belle aux routes alternatives et chemins de traverses. Pour nous faciliter un peu la vie il est possible d'agrandir un peu la mini map afin de trouver la meilleure route. Une option sympathique mais finalement peu utile car envahissante (la mini map qui prend la moitié de l'écran, on a vu plus pratique pour la conduite) et les indications de directions sont suffisantes la plupart du temps.
Facile à prendre en main le jeu demandera tout de même une certaine finesse pour maitrisé les voitures les plus fougueuses (La corvette Z1 par exemple est une sacrée savonnette au premier contact) et les tracés les plus retors.

La difficulté est bien gérée, outrageusement facile les premières heures le jeu se durci au fur et à mesure et le final réclame une certaine concentration pour être dompté. Les poursuivants sont coriaces mais avec le Shift, et un peu d'adresse, on arrive à s'en sortir. Néanmoins la moindre erreur d'appréciation ou de trajectoire peut se payer cash, nos adversaires ayant un certain penchant pour les actions violentes et suicidaires afin de nous stopper. Ceux qui auront bouclé le mode scénario pourront se rabattre sur les nombreux défis. Certains d'entre eux (généralement ceux débloquant les meilleures voitures) mettront vos nerfs à rude épreuve.
Pour l'aider un peu John Tanner dispose d'une jauge qui lui sert à deux choses. la première utilisation est un boost façon nitro qui offre la patate supplémentaire pour faire la différence dans les moments les plus tendus. La seconde utilisation permet d'accumuler de l'énergie pour offrir un effet bélier lors de l'impact avec les autres voitures. Avec une caméra qui se rapproche et qui vibre avec notre moteur cet outil est vraiment jouissif à utiliser puisqu'il permet vraiment d'envoyer valser ses concurrents/poursuivants/cibles dans le décor avec force et autorité.
Cette barre pourra être améliorée (taille et vitesse de rechargement) dans les garage, là encore en échange de points de volonté.

Il y a en revanche un point générateur de frustration, la gestion des collisions. Nos voitures ont une barre de vie et donc foncer à 300 km/h dans une camionnette en sens inverse ne signifie pas forcément la mort par explosion de la boite crânienne sur le tableau de bord en simili-cuir. Les collisions autorisent donc de pouvoir poursuivre la course tout de même mais le résultat n'est pas vraiment à la hauteur.
D'une part les crashs ne sont pas hyper impressionnants (là encore Burnout Paradise reste la référence absolue) et d'autre part l'absorption de notre énergie cinétique se traduit par un désagréable "effet glu".
Traduction : lorsque l'on fonce dans une autre voiture il arrive très souvent qu'on reste collé à cette dernière sans explication. Au lieu de dévier de notre trajectoire sur une tangente à notre direction on restera désespérément scotché au pare-choc de notre victime du moment, sans recours. Les voitures semblent alors peser des centaines de tonnes. Résultat on perd de la vitesse, et du temps, sans pouvoir accélérer ni se remettre dans l'axe. Dans certains cas on arrive même à dériver selon la trajectoire de la voiture qui nous a percuté en bravant toutes les lois de la physique.
Le comportement des véhicules lors de ces moments là est tellement anti-naturel que perdre des courses à répétition à cause de ce genre de détail devient vite saoulant. Un phénomène d'autant plus énervant qu'il ne semble pas affecter nos concurrents. D'une manière générale le moteur physique est donc assez douteux.


KARMACOMA

Le moteur graphique quand a lui offre une bonne surprise : le jeu est fluide. Oui, vous avez bien lu, le Driver cuvée 2011 est un jeu parfaitement fluide, de bout en bout. Un vrai bonheur d'autant que la circulation est dense, le slalom entre les voitures est bien réel et la conduite réclamera donc une attention de tous les instants.
En contrepartie le jeu n'est pas très joli. Il assure la moyenne syndicale mais il manque tout de même de panache visuel. Il faut aussi voir que le jeu ne se déroule que dans une seule ville et que malgré les efforts des développeurs elle manque un peu de variété et de détails.
Niveau ambiance et scénario le jeu est un peu en demi-teinte. Il y a bien une volonté de se la jouer seventies au travers une musique originale rappelant Lalo Schifrin et de nombreux clins d'oeil (La voiture perso de tanner est une Dodge Challenger RT jaune à bande noire, la classe quoi) mais la cohabitation hasardeuse avec la modernité fait passer le tout pour un gimmick gratuit. La direction artistique manque singulièrement d'inspiration et même lors de missions bonus se déroulant dans les années 70 on y croit pas trop, dommage même si ça fait toujours plaisir de revivre les Blues Brothers ou encore Bullit.
Pour ce qui est de l'histoire elle se contente de reprendre grosso-modo le scénario de Die Hard 3 avec quelques trucs pour rallonger la sauce. Les rebondissements tombent un peu à plat et le liant narratif est assez mince. Il faut aussi avouer que Tanner manque singulièrement de charisme et le duo qu'il forme avec son pote black est vraiment trop creux et cliché pour captiver. Heureusement les missions en elles-même sont assez sympa et variées avec quelques passages hallucinatoires assez bien trouvés.

Ce qui est en revanche bien réussi ce sont les dialogues lors des courses. En effet emprunter le corps de quelqu'un ne se fait pas sans surprise et on se retrouvera parfois aux côtés d'une paranoïaque attendant la fin du monde ou au beau milieu d'une scène de ménage. Ces petites scénettes humoristiques rendent l'ensemble vraiment sympathique grâce au décalage entre nos compagnons d'un moment se livrant sans retenue et un Tanner essayant d'influencer leurs choix ou se foutant ouvertement de leurs gueules.

Pour compléter le tout Ubisoft rempli le cahier des charges avec un multi à l'image du jeu, rigolo et rapidement fun. Pas de quoi non plus y passer toutes ses nuits mais l'essentiel est là. Il y a aussi toujours le fameux mode réalisateur permettant de revivre ses meilleurs cascades en choisissant les caméras. Une option sympa mais assez peu ergonomique (cascade de menus interminable, contrôles aberrants lors des déplacement de la caméra) et franchement incomplète (pas de travelling possible, pas de possibilité de copier plusieurs fois le même passage, etc..) qui frustrera vite les William Friedkin en herbe sur le long terme.


RAPIDE ET FURIEUX

Personne n'y croyait, tout le monde s'en foutait mais pourtant Driver a passé la révision avec succès. Vidangé de tout ce qui plombait le game design on retrouve un pur jeu de poursuite, fun et nerveux comme il faut. Alors que Criterion Games peine à donner une suite à son Burnout Paradise et se contente de sortir un mini jeu tout pourri on tient là une réponse sérieuse de la part de Reflections. Un juste retour des choses pour un développeur qui a ouvert la voie à de nombreuses licences devenue depuis des institutions.
Bien sûr le jeu n'est pas parfait et le moteur physique, toujours à la frontière du scandaleux, pourra rendre fou certains d'entre vous mais les sensations sont là et les amateurs de voitures broyées à plus de 200 km/h trouveront largement de quoi faire.
Vnr-Herzog
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le 5 oct. 2011

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