Sorti en 1996 Duke Nukem 3D avait su marquer le genre du Doom-like (et oui, dans le temps on ne disait pas encore FPS) grâce à un mélange entre gameplay bourrin et ambiance survoltée et absolument pas subtile. Un titre instantanément culte qui fut un des sujet de discussion favoris des cours de récrée de l'époque. Auréolé de ce succès 3D Realms décida de mettre en chantier une suite. Un chantier de 14 ans qui passa entre bien des mains, qui traversa bien des blagues et des redressements judiciaires avant d'atterrir dans le giron de Gearbox.

La première chose que l'on peut dire sur DNF, car c'est ce que l'on remarque en premier, c'est qu'il est visuellement immonde. Oui, immonde, il n'y a pas de mot plus juste pour qualifier le gloubi-boulga visuel qui s'offre à nous. Textures atroces, modélisations à la machette, animations pauvres, effets ridicules, gestion de la lumière basique... le retard technique accumulé depuis 1997 nous saute littéralement à la tronche. Certains ennemis se résument à de gros blocs informes et marrons quel seuls les connaisseurs réussiront à identifier via leurs souvenirs et non grâce à l'absurde représentation que nous offre le jeu. Même poussé en Ultra sur PC le jeu fait simplement pitié à voir. Evidemment la direction artistique, dont le crédo est le mauvais goût, n'aide pas toujours.

Les jeux moches (enfin... très moches) ne font pas forcément de mauvais jeux .L'année 2010 nous l'a largement prouvé avec Alpha Protocol ou Fallout : New Vegas par exemple. Alors pourquoi n'en serait-il pas de même en 2011 ?
Tout simplement parce qu'une fois la souris en main Duke Nukem Forever se révèle être également pénible à jouer.
En 14 ans le Doom-Like a changé, le jeu vidéo a changé et Duke Nukem Forever essaye de raccrocher les wagons. Qu'on ne s'y trompe pas, ceux qui affirment que DNF est un pur jeu Old School ont simplement tort : barre de vie qui remonte toute seule, gestion limitative des armes, scénarisation importante, intervention régulière de scripts, alternance de gameplays, level design en couloirs, séquences dialoguées (le début est d'ailleurs particulièrement atroce à ce niveau là) à répétition... ils présente toutes les caractéristiques du FPS post Half-Life.

Problème : presque tout ce qu'il fait, il le fait mal. Le level design, tout d'abord, est sans inspiration. A part une poignée de niveaux plus recherchés que les autres, les deux seuls règles sont : le vide et l'étroitesse. Ainsi les couloirs de 1m sur 2 sont en alternance avec des étendus plus vastes mais complètement vides ( tout au plus y voit-on 2 cactus que se chamaillent) et là encore parfaitement linéaires.
Le jeu est en réalité une succession d'arènes qu'il faut nettoyer pour avoir le droit de passer à la suite. Pas spécialement problématique en soit ce choix le devient lorsque le level design n'arrive pas à le camoufler correctement. Ainsi voit-on certains mécanismes qui bloquent le passages mais avec lesquels on ne peut mystérieusement pas interagir. Mais une fois la salle vidée, miracle, on peut les activer.
Plus lourd encore sont les barrières arbitraires qui jalonnent certains niveaux. Ainsi on mourra inévitablement en tombant dans un lac à un endroit donné puis, sans raison apparente, Duke aura appris à nager 20 mètres plus loin parce que le level design a décidé de faire passer le chemin par le lac. Absurde.
Mais le pire n'est pas là, non non non. Le pire intervient lorsque la fin d'une arène se ponctue par un script horriblement mal intégré. Ainsi on ne sait pas vraiment quand on est censé passer à la suite car le script final (qui débloque donc le passage vers la zone suivante) arrive souvent 10 à 15 secondes après la fin de la fusillade. Un temps suffisamment long pour que le joueur se demande si le jeu n'a pas buggué et pour qu'il commence à revenir en arrière pour trouver l'hypothétique chemin. Evidemment tout bon script foireux qui se respecte se doit de ne jamais attirer l'attention du joueur sur lui, histoire qu'il le loupe et qu'il découvre par hasard (et 2 minutes après) qu'un mur s'est écroulé, sans raison apparente, derrière lui.

Ainsi Duke Nukem Forever est un jeu au rythme incroyablement poussif et boiteux, si bien qu'on s'emmerde beaucoup. Le problème des scripts qui ne s'enchainent pas bien ne serait qu'une anecdote si les 2/3 tiers des niveaux n'étaient pas constitués de phases au gameplay bancal. Ainsi on se coltine d'affreux moments dans des véhicules-savonnettes répondant à un moteur physique mou du genou ou d'interminables séquences de rail-shooting au rythme anémique où les cibles arrivent mollement par paquet de 1... Déjà que lorsque c'est rythmé et bien pensé le rail-shooting dans un FPS c'est chiant mais là c'est simplement miteux.
Pour finir certains autres niveaux sont constitués de puzzle simpliste et sans intérêts mais qui occupent pourtant tout le déroulement du stage.
Le plus gros problème du jeu vient donc du fait que les séquences de FPS "pures" sont extrêmement rares. Dommage car ce sont encore les parties les mieux réglées du jeu. L'impact de certaines armes est sympa (le fusil à pompe, le mini lance-roquette alien) et la gestion limitée des armes (seulement 2 en plus des pipe-bomb et des mines laser) encourage à changer régulièrement son arsenal.

Ces phases de shoot à pied donnent un peu de sensations (le niveaux où on est minuscule dans la cuisine ou quelques moments western sortent un peu du lot) mais ne sont pas exemptes de défauts non plus, loin de là. Pour le coup d'IA est restée très old school: aucune initiative, elle se contente d'avancer et de tirer, peut importe les conséquences. Une lacune pardonnable lorsque l'on subit des vagues ininterrompues de cinquantaines d'ennemis en simultané... une lacune qui l'est beaucoup moins lorsqu'ils sont au maximum 3/4 à la fois et qu'ils nous tombent dessus dans un couloir minuscule.
Les combats de boss sont à l'avenant : se mettre loin et vider son lance-roquette avant d'aller à l'autre bout de l'arène pour recharger et recommencer.
Des combats de boss qui sont d'ailleurs amenés sans aucune finesse puisqu'il y aura immanquablement des dizaines de lance-roquette au sol lorsqu'on arrive dans la zone (et oui, puisqu'on est limité à 2 armes et qu'ils ne sont vulnérables qu'aux explosifs il faut bien faire en sorte que le joueur puisse les tuer). Comme Duke a évolué avec son temps il y a aussi l'inévitable QTE pour achever le gros vilain.

Hideux, peu convaincant dans son gameplay Duke a toujours sa personnalité pour lui, non ? Réponse : oui et non. Oui car il y a du nichon à la moindre occasion et des grossièreté en cascades. Voir Duke Tendre un gros doigt d'honneur à un boss agonisant c'est toujours sympa. Entendre Duke sortir des répliques de Commandos juste après un Head-Shot ça fait toujours plaisir. Forcément certaines références sont bien trouvées ( "I hate valve puzzle" )
Mais l'enrobage débilo-lourdingue, même si assumé, ne suffit pas à garder l'attention tant le reste du titre est lamentable. C'est d'autant plus gênant que cet aspect là semble être le seul ayant bénéficié d'un peu de travail, même si certains gags tombent à plat.
En fait Duke Nukem c'est un peu comme retrouver un vieux copain de beuverie has been mais qui se croit encore super drôle alors qu'il est plutôt embarrassant à force d'en faire toujours trop.
Peut être que le monde à changer, peut être qu'on a tout simplement grandi aussi mais aujourd'hui les insultes et les nichons ne sont plus l'apanage de Duke et force est de constater que ce n'est plus franchement l'hilarité en continue. Sûrement aussi qu'avec un bon jeu collé à cet esprit l'ensemble aurait eu une toute autre saveur. J'invite ceux qui croient que Duke Nukem 3D ce ne sont que les insultes et les références à refaire le jeu. Car c'est aussi un doom-like, bien qu'assez classique dans ses bases, parfaitement calibré et nerveux. Soit l'exact opposé de Duke Nukem Forever... qui est donc boiteux et mou.

Pour ceux qui avait encore de l'espoir pour la partie multi je suis au regret de leur apprendre qu'à ce niveau là aussi DNF est une calamité. Maps étriqués et laides, équilibrage absent avec des armes surpuissantes qui empêche le moindre combat de durer plus de 2 secondes, pauvreté des modes jeu....
Bref là encore Duke Nukem Forever n'assure même pas le minimum.

DNF est décevant parce qu'il est mauvais et non l'inverse. La médiocrité (pour rester poli) du jeu en terme de game design, de level design, de sensation, etc... ne peut que sauter aux yeux. Bien sûr on a tous fait notre deuil de la tuerie potentielle dont on rêvait en éclatant notre acné, bien sûr qu'avec un développement aussi chaotique le résultat n'allait pas être génial. Ca tombe sous le sens de dire que personne ne s'attendait à un chef d'oeuvre. Ca tombe tellement sous le sens que je ne sais même pas pourquoi je prends la peine de le préciser.
Ceci étant dit on était en droit d'attendre au moins un "bon petit jeu" correct et un peu sympathique... mais même ça on nous l'a retiré. Il faut se faire une raison : Duke Nukem Forever est exécrable à tous les points de vue, un ratage complet qui se paye le luxe incroyable d'avoir la gueule, malgré ses14 ans de gestation, d'un work in progress où rien n'est approfondi. Où rien n'a été fait correctement. Un titre qui ressemble à une suite d'ébauches juxtaposées de façon anarchique.
Duke Nukem Forever est un jeu coincé entre deux époques : il n'a plus la nervosité de son aîné et peine clairement à offrir du spectaculaire millimétré comme ses collègues d'aujourd'hui. Le fait est qu'il n'est pas satisfaisant quelque soit le canevas auquel on le confronte : l'old school ou le moderne. DNF est tout simplement un mauvais jeu, voir un très mauvais jeu.
Vnr-Herzog
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Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Anthologie du Bidon Rouge Explosif [Cliché] et Y a t'il un pilote dans l'hélico ? [Cliché]

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le 14 juin 2011

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