Fe
5.9
Fe

Jeu de Zoink Games et Electronic Arts (2018PC)

Lors de l’E3 2016, EA met en avant son label EA Originels avec un petit jeu de plates-formes 3D à la direction artistique bien attrayante : Fe. C’est le studio suédois Zoink qui est en charge, assez prolifique dans la réalisation de petits jeux indés en tout genre sur les années 2010, le plus connu étant Stick it to the Man. Charmé par son style graphique et plutôt intrigué par son univers, malgré des critiques très tièdes et un succès commercial des plus relatifs à sa sortie en 2018, je me suis lancé dans Fe avec l’espoir d’y trouver un bon petit jeu sans grande prétention, et pourtant des ambitions il y en a bien. Je vous propose l’écoute du thème Floden pendant la lecture.


Pour information, j’ai fait le jeu dans sa version Xbox Series S.



RÉALISATION / ESTHÉTISME : ★★★★★★★★☆☆



Le rendu graphique du monde 3D de Fe repose sur un parti pris très particulier mais absolument brillant avec des polygones très visibles et des textures très épurées. Les formes ne semblent quasiment jamais arrondies. Je me s’y suis fait instantanément et toute l’intelligence de ce type de rendu c’est qu’il permet d’économiser quantité de travail graphique à un studio qui n’en a pas les moyens. Plutôt que de se lancer dans un rendu classique allant dans des textures détaillées et des formes réalistes qui aurait nécessairement été inférieures qualitativement aux autres jeux 3D de son époque profitant de meilleures ressources, la réalisation 3D de Fe se démarque et est parfaitement aboutie dans son genre.


Prenant place dans de très vastes environnements dans un monde ouvert que l’on est libre d’explorer avec parfois beaucoup de verticalité, le clipping est très faible, la stabilité est bonne… contrairement à même des grands titres, comme Breath of the Wild l’an passé, et ça illustre pour moi toute la réussite de la réalisation, celle d’être efficace là où il faut. On peut manquer de ressources et s’en sortir sur un monde ouvert en 3D sur le plan technique sans compromis gênant, Zoink le montre bien et je leur tire on chapeau d’autant que je ne les attendais pas là-dessus.


Et ce n’est pas du côté artistique que la qualité se perdra, bien au contraire. Cette nature, fortement inspiré des pays nordiques assez logiquement, aux couleurs ultra-saturées et à la gestion des contrastes ultra-prononcée est absolument magnifique en plus de constituer une identité visuelle parfaitement unique, au jeu et à ses différents environnements en son sein. J’accorderai une mention spéciale aux passages plongés dans l’obscurité où la manière dont les couleurs ressortent est vraiment sublime, j’ai été très impressionné.


Entre la collaboration avec des petites créatures animales toutes mignonnes à la manière de Pikmin et l’ascension épique de créatures gigantesques à la manière de Shadow of the Colossus, les sensations de jeu sont excellentes et bien aidées par l’ensemble du travail visuel et sonore de cette petite production. L’absence d’interface par défaut contribue assez bien aussi à ce sentiment d’immersion, surtout au début du jeu très minimaliste, dans le bon sens du terme. Le chara-design de notre protagoniste très mignon et notre changement de skin selon notre chant sélectionné est également très appréciable.


Si le jeu a l’originalité de ne comporter aucun dialogue, un parti pris radical très respectable, il développe tout de même une petite intrigue bien sympathique en jeu et lors des cinématiques par sa mise en scène. Nous faire adopter le point de vue des créatures ennemies en nous faisant ressentir l’absence d’autre chose à faire que de marcher et d’attaquer ce qui voit, seule manière d’interagir, permet par exemple de bien comprendre le twist final, grâce à la réalisation et aux choix artistiques.


L’OST composée par Joel Billie, collaborateur régulier du studio, fait assez bien le travail même si ça se répète vite tout en restant simpliste. On a tout de même quelques fulgurances comme la musique gagnant des notes et de l’intensité au fur et à mesure que l’on résolve une énigme et qu’on se rapproche de la solution finale. Par contre, pour un jeu qui met en avant ses chants, il aurait été bien que les voix soient plus présentes, beaucoup de chants étant un court bruitage répété, ce qui n’est pas très agréable.



GAMEPLAY / CONTENU : ★★★★★★☆☆☆☆



Se présentant comme un jeu de plates-formes en 3D, le maniement indique tout de suite une certaine rigidité et semi-automatisation avec un moteur de collision pas toujours optimal, une mécanique d’escalade parfois un peu brouillonne… Le gameplay s’enrichit au fur et à mesure de chants à débloquer, c’est-à-dire de moyens d’interagir avec l’environnement de manière à faire apparaître des tremplins, d’ouvrir des portes… Le maniement reste donc assez simple et non sans approximations mais avec quelques bonnes idées comme de nouveaux chants un peu plus intéressants que ceux cités en exemple.


Il est à noter que Fe a le courage de rendre ces mécaniques de jeu souvent à découvrir par l’expérimentation en dehors de quelques messages textuels. Alors ce n’est pas toujours réussi, le jeu pouvant d’un coup faire apparaître un tuto parce qu’il estime qu’on a pas encore compris un truc par nous-même, mais il y a quelques bonnes idées subtiles pour enseigner comme la découverte de peintures murales pouvant aussi bien développer un peu l’univers qu’illustrer une mécanique de jeu de la zone.


En complément de ces chants qui se débloquent nécessairement au fur et à mesure de la trame principale, des cristaux à collecter de manière facultative permettent de débloquer quelques capacités inédites par pallier en profitant de quelques challenges de plates-formes ou de réflexion plutôt bienvenus. J’aurais tout de même comme reproche de légers problèmes d’équilibrage et de répartition sur la progression, une compétence très utile peut ainsi se débloquer vite alors qu’une autre peu utile peut ne se débloquer que très lentement.


En plus de phases de plates-formes et de réflexion plutôt faciles mais certainement pas déplaisantes, on retrouve aussi des phases d’infiltration avec des zones de furtivité totale qu’il nous faut atteindre par des zones à découvert alors que des adversaires invincibles peuvent nous vaincre très rapidement une fois repéré et à leur portée. Comme le reste du gameplay, c’est assez simple et ça marche plutôt bien avec une difficulté progressive et cohérente, introduisant par exemple d’abord un type d’adversaire puis un autre avant de les mêler et enfin de les mêler en nombre pendant qu’on doit résoudre une énigme.


Le contenu n’est pas très conséquent avec une petite douzaine d’heures de jeu pour voir le bout de la trame principale. Les récompenses annexes augmentent bien cette durée de quelques heures, mais comme elles n’ont pour intérêt que de renforcer nos capacités à un moment où on en a plus vraiment besoin… Il y avait peut-être mieux à faire avec le backtracking, les retours en arrière impliqués par les nouveaux chants permettant d’explorer davantage des lieux déjà visités, ici assez peu exploité.



CONCLUSION : ★★★★★★★☆☆☆



Encore plus ambitieux que je ne le pensais sur le plan esthétique, un peu moins abouti et généreux que je ne l’espérais sur le plan ludique, Fe reste une bonne petite surprise dans l’ensemble et une expérience de jeu bien plaisante. Les faibles moyens du studio et leur manque de succès sur leurs précédents titres ne doivent pas vous freiner si l’expérience vous intrigue et ça me fait plaisir de voir EA présenter de tels jeux que je prends plaisir à découvrir et à faire découvrir, entre leurs AAA génériques plus typiques de leur production.

damon8671
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le 17 juin 2021

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damon8671

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