Cette critique contient quelques spoilers minimes sur le déroulement de certains passages. Vous êtes prévenus.
Ça y est, c’est arrivé. J’ai abandonné un Final Fantasy. Bon il y avait eu un précédent avec FF XIII, coupé au bout de 5 heures de jeu dont 3 de tutorial (raison pour laquelle je ne critiquerai pas ce FF, on peut pas parler “d’abandon” au bout de si peu de temps) mais dans le cas de FF IV, je suis tout de même arrivé à la moitié du jeu avant de laisser tomber.
Alors, je suis peut-être devenu un vieux con et ne suis plus sensible au charme particulier des FF, je suis peut-être un jeune merdeux enfermé dans la génération PS1/2 de FF incapable d’apprécier les anciens opus… mais désolé, j’aime pas quand un jeu se fout de ma gueule avec une difficulté totalement dopée artificiellement. FF IV - du moins son remake, je n’ai pas testé l’original mais j’ai cru comprendre que c’était un quasi copié-collé - fait partie de ces jeux durs frustrants. Et des RPG difficiles, j’en ai fait quelques uns, pourtant, Lucifer’s call, Vagrant Story, FF 6, Valkyrie Profile, sans qu’ils m’aient fait abandonner en cours de route.
Pourtant, ça partait bien : certes le scénario peut paraître un rien gentillet aujourd’hui mais il reste accrocheur (la chute et la rédemption d’un chevalier noir devenu paladin et la lutte contre un empire maléfique - Anakin, on t’a reconnu, sors de là !). Le personnage de Cecil est plaisant à suivre et les membres de son équipe sont assez diversifiés pour être intéressants, même si leur background reste, à l’instar de l’histoire, plutôt “simplistes”. Mais ce n’est pas un point sur lequel je critiquerai réellement FF IV, qui remis dans le contexte de son époque, bénéficiait d’une histoire élaborée (En 1991 on avait Sonic et Mario Bros 3 comme jeux phares donc niveau scénario…). Bien sûr, en 2008, on peut trouver le jeu limite niais mais si on est un tant soit peu bon public, l’histoire reste très bien menée et bourrée de rebondissements accrocheurs. Qui plus est, les scènes dialoguées sont servies par un doublage anglais de qualité.
Le jeu propose de jolis graphismes 3D tout en gardant l'esthétique chibi - dont je ne suis personnellement pas fan mais objectivement c’est agréable à l’œil et fluide. J’ai noté quelques bugs d’affichages qui m’ont fait grincer un poil des dents pour un jeu Square mais rien qui ne fasse sauter la sauvegarde ou empêche de jouer. La musique, de Nobuo Uematsu est comme d’habitude de grande qualité et la DS restitue plutôt bien le tout. Ces deux points posent rarement problème dans un FF, je ne m’attarde donc guère dessus : c’est beau pour les yeux et les oreilles. On en attendait pas moins. C’est du récit épique, bien old-school, le cahier des charges est respecté avec talent.
Les menus sont clairs et ergonomiques et le jeu propose - excellente initiative - un système de sauvegarde rapide qui permet d’avoir une sorte de “checkpoint” si l’on doit éteindre la console. Un plus très appréciable pour un jeu dont la durée de vie flirte avec la trentaine d’heures.
Le système de compétences est d’une simplicité absolue : chaque personnage dispose d’un “métier” (guerrier, mage blanc, mage noir, barde…) et ses compétences se débloquent au fil de sa montée de niveau. Par ailleurs, on peut équiper chaque personnage avec armure, armes ou accessoires liés à son métier. Personnellement, je suis très peu fan de ce système d’apprentissage simpliste mais encore une fois, pour un jeu datant de 91, difficile de se plaindre même si Square aurait pu profiter du remake pour enrichir un peu tout ça.
Résumons : histoire sympa - pour l’époque - bonne musique, beaux graphismes, système clair à défaut d’être très riche, personnages accrocheurs, système de sauvegarde repensé, durée de vie plus qu’honorable…Et Game design foiré.
J’ai rarement eu autant l’impression d’un jeu qui en guise de challenge passait son temps à me coller des bâtons dans les roues. Tout d’abord, sachez que pendant la première moitié du jeu vous ne pourrez garder personne dans votre équipe : comprenez qu’entre les naufrages, les attaques ennemies et autres rebondissements scénaristiques, vous conserverez rarement les coéquipiers de Cecil plus d’un donjon avant de vous les faire enlever puis remplacer. Non seulement cela oblige à farmer inutilement (le level des nouveaux équipiers étant fixe et ne s’alignant absolument pas sur celui de Cecil, je me suis retrouvé plusieurs fois avec près d’une dizaine de niveaux d’écart) et gonfle la durée de vie mais en prime, cela ne laisse AUCUNE latitude au joueur pour élaborer une stratégie à son goût. Le jeu décide pour vous la constitution de votre équipe et donc plus ou moins la manière dont vous allez jouer. Personnellement, je ne supporte pas ce genre de Game Design hyper dirigiste ni le fait que le jeu ne s’adapte pas un minimum à moi. Calculer le niveau des équipiers en fonction de celui du leader, comme le font TOUS les FF depuis le 6, c’est trop demander ?
Ensuite, en prime de vous priver de vos coéquipiers, le jeu vous colle régulièrement des handicaps qui, s’ils n’étaient pas couplés à ces problèmes de game design, auraient pu être intéressants : par exemple, en haut d’une montagne relativement pénible à gravir, Cecil devient enfin paladin et… retombe au niveau 1. Et vous devrez redescendre la montagne, pas de téléportation automatique, rien. Si cela demeure gérable (on regagne bien vite quelques niveaux) et que point de vue scénario, c’est cohérent, reste que l'évènement est stressant en soit et donne clairement l’impression d’avoir farmé de l’XP pour RIEN. Un peu plus loin, un donjon vous prive de votre meilleur équipement, qu’avec un peu de malchance vous veniez d’acheter à prix d’or… Et tout le jeu fonctionne sur ce système, anéantissant la sensation d’accomplissement qui survient théoriquement lorsqu’on vient à bout d’un challenge. La difficulté est en dent de scie, on peut ramer pour traverser un donjon truffés de saloperies hyper agressives, pulvériser le boss en deux coups et se faire tuer en un coup par un banal monstre du donjon suivant (vécu au fil de ma partie et pas qu’une fois). Je ne reviendrai pas sur les rencontres aléatoires beaucoup trop fréquentes qui rendent la traversée du jeu franchement pénible par moment (oui, ce n’est pas l’apanage de FF IV mais j’ai trouvé la fréquence des rencontres bien plus élevée que d’habitude). Naturellement, les altérations d’état ne sont pas soignées à la fin des combats, qui rapportent très peu d’argent et obligent donc à farmer régulièrement beaucoup, tout ça, je le rappelle, pour devoir recommencer à chaque changement de coéquipier.
Le jeu ne nous aide pas. Je veux dire, on se plaint souvent que les nouveaux jeux - et les nouveaux FF- sont des balades de santé et je n’ai rien contre un challenge un peu plus relevé que les opus playstation mais pas comme ça. Pas quand au lieu de me proposer une difficulté hardue mais progressive et VALORISANTE, le jeu passe son temps à réduire plus ou moins à néant ce que j’ai pu accomplir en terme d’expérience, d’équipement ou de maîtrise de l’équipe en m’imposant des handicaps en permanence. J’ai abandonné à mi parcours lorsque mon équipe a été décimée par Golbez, le “faux antagoniste” et qu’il me restait deux personnages debout, personnages qui ont été balayés avant même que je n’ai eu le temps d’agir. Tout ça alors que je sortais d’un premier combat de boss qui avait déjà bien entamé mes forces. Ce double affrontement résume très bien FF IV : pénaliser un maximum le joueur sous couvert d’être “dur”.
Objectivement, FF IV a beaucoup de qualités et reste finissable. Il y a pire en la matière mais sa difficulté n’est pas motivante, elle est frustrante au maximum, en venir à bout ne m’apportera qu’une satisfaction rageuse de lui avoir mis le compte et honnêtement je ne suis pas sûr qu’on puisse encore parler de plaisir à ce stade.
Et comme je ne suis pas encore inscrit aux masochistes anonymes, j’ai usé du plus grand pouvoir qu’aucun game design merdique ne puisse m’ôter.
Éteindre la console et aller jouer à autre chose.