C'était à l'été 1997. Je découvrais alors, sur ma Super Nintendo et grâce à l'adaptateur pour jeux en import, Final Fantasy VI, sorti trois ans plus tôt, en 1994, et une règle mathématique nouvelle : 3=6. Et oui, car comme beaucoup d'entre vous doivent le savoir, le numérotage des opus de la saga Final Fantasy, avant la remise à plat à l'occasion du 7, était affaire de mathématiciens et de philosophes, qui tentaient de trouver des cohérences dans des numérotations parallèles et différentes au Japon et aux Etats-Unis. Ce FF, 6ème opus de la série, ne fut néanmoins que le numéro 3 aux States (d'où la jaquette mentionnée Final Fantasy III) ... Heureusement que le titre nous faisait rapidement oublier, par son contenu, toutes ces petites frasques sans grande importance ...
Dès son introduction, FF6 annonce tout de suite la couleur : Squaresoft nous livre une véritable histoire, profonde, assez sombre, servie par une mise en scène audacieuse pour l'époque de la Super Nintendo. Impossible d'oublier cette séquence d'ouverture durant laquelle notre héroine, Terra, et deux acolytes, se rendent vers la ville de Narshe, accompagnée par une musique inoubliable de Uematsu et une utilisation heureuse du Mode 7 de la console de Nintendo.
Cette séquence est le prémice d'une histoire aux bases simples mais incroyablement accrocheuse et bien narrée, mettant aux prises un empire plus ou moins maléfique (en fait c'est plutot le bouffon de l'empereur qui est maléfique) et un groupe de rebelles beaucoup plus humanistes. L'empire exploite sans vergogne la force magique d'entités réduites à la condition d'esclaves et de piles Duracel : les Espers. Et notre petit groupe, touché au fond de son petit coeur par les conditions de vie inhumaine des Espers, va tenter d'y mettre fin. Après, c'est normal ces conditions inhumaines, vu que les Espers ne sont pas humains ... (pouet ! pouet !). La mise en scène du titre était pour l'époque très satsfaisante et tirait particulièrement bien partie des capacités techniques de la Super Nintendo.
On rencontre, au fil d'une aventure longue et riche, de nombreux personnages qui viendront compléter notre équipe, et bénéficiant tous d'un traitement réussi. Pour des petits sprites 16-Bit, ça déborde de charisme et ça induit un véritable attachement entre le joueur et ses compagnons virtuels. Evidemment, J-RPG oblige, certains passages un peu niais ou cul-cul viendront perturber la trame narrative, mais on pardonne tout à un titre débordant de tant de qualité.
D'autant que de nombreux autres passages restent gravés dans les mémoires. Nous avons déjà parlé de la séquence d'introduction, mais pas de la cultissime séquence de l'opéra, sorte d'évènement dans le jeu et durant laquelle nos héros participeront à une représentation mémorable et aux musiques restées dans les annales. Et bien d'autres évènements marquent la mémoire du joueur : le chateau "couteau-suisse" de Figaro, la naissance du continent flottant, le train hanté ... le tout rythmé par le rire maléfique du grand méchant du jeu : Kefka.
Le gameplay est également à la hauteur de la légende du titre. Simple et efficace. Chaque personnage est affublé d'une technique qui lui est propre et qu'il peut utiliser durant les différents combats, en sus de la personnalisation de chaque personnage grace aux magicites, pierres magiques contenant l'essance de certains Espers. Les combats mobilisent quatre de nos personnages sur le principe de l'Active Time Battle propre à Squaresoft. Un gros bonus de cet opus est la possibilité de mener les combats à deux joueurs pouvant ainsi se partager le controle des différents protagonistes. Il s'agit à mon sens d'un énorme atout de FF6 qui pouvait ainsi, contrairement à la très grande majorité des autres RPG, se jouer à deux.
L'une des forces du titre est également la très grande qualité de sa bande originale, composée donc par le mythique Nobuo Uematsu. Certes, cette OST est basée sur les capacités audio de la SNES, mais celles-ci sont mobilisées à leur paroxisme, pour livrer in fine une partition d'une incroyable qualité, aux refrains inoubliables et participant pleinement à la très forte personnalité que dégage le titre.
Comme cela a aujourd'hui été dit maintes et maintes fois, FF6 est un des épisodes forts de la saga de Squaresoft, le chef-d'oeuvre selon certains, en tout cas l'épisode qui, par consensus, a recueilli les plus grandes éloges critiques, à la fois accessible, mature, adulte, et bénéficiant d'une réalisation, pour l'époque, d'une grande qualité. Graphismes, histoire, personnages, musiques, gameplay, toutes les composantes du titre ont été travaillée pour nous livrer la vraie fantaisie finale.
Bien entendu, derrière chaque triomphe, il y a un scandale. Jugeant pour l'époque le marché européen inapte à accueillir un RPG de cet accabi, FF6 ne fut pas distribué à l'époque sur le vieux continent et fut donc connu par chez nous assez tard, et notamment par le biais de l'import, puis des émulations sur ordinateur. Ce fait reste une erreur impardonnable de la part de Squaresoft et Nintendo qui fut fort heureusement rectifiée lors de la sortie de Final Fantasy 7. L'attente des joueurs européens ne fut assouvie, officiellement, que le 27 février 2002, lors de la réédition du titre sur PSOne, puis en juillet 2007 lors de sa sortie sur GBA. Et découvrir FF6 avec huit années de retard, ça reste appréciable, mais ça revient à découvrir un titre aussi fondamental que Pong à l'époque de la NES.
L'un des meilleurs titres de l'histoire du jeu vidéo ! A redécouvrir encore aujourd'hui pour ceux qui n'aurait pas au l'occasion d'y jouer.