Final Fantasy VII: Remake
7.5
Final Fantasy VII: Remake

Jeu de Square Enix (2020PC)

23 ans après l'arrivée en fanfare de Final Fantasy VII sur nos consoles et nos PC (si, si), Square, désormais Square Enix, nous propose une relecture "au goût du jour" de ce jeu qui avait précipité une partie des amateurs de plaisirs vidéoludiques dans les bras du JRPG.

Depuis l'annonce sous forme de trailer qui a fait imploser les fans du monde entier, cinq longues années de développement délicat et beaucoup de questions tant sur la forme que sur le fond ont meublé l'attente du produit (F)final.

Maintenant que les présentations sont faites, il est temps d'aller droit au but : en plus du jeu et de votre console (ou de votre PC), des nerfs d'acier sont requis pour le rollercoaster émotionnel qui s'annonce.


Plus de gruyère = moins de gruyère

Pour les deux du fond qui ne découvriraient que maintenant l'univers de Final Fantasy VII, ce remake ne couvre qu'une petite partie du jeu original, en nous faisant déambuler dans cette mégalopole qu'est Midgar, ville en forme de pizza (attesté par les quelques vannes du jeu à ce sujet) d'où s'articulent 8 secteurs, chacun comportant son bidonville quasi souterrain et son quartier résidentiel en surface.

Autant couper court à tout espoir d'open world de folie : le jeu original se concentrant sur des morceaux (plus ou moins gros) de certains secteurs, le remake n'a pas pris de risques et reprend le même déroulement. Cela me semble difficile de le lui reprocher, ceci dit, eu égard au travail scénaristique colossal que cela aurait impliqué.

Un problème se pose alors : comment transformer en jeu complet une séquence durant, dans le jeu original, 6 à 8h environ ?

La solution proposée est toute simple : diluer, parfois jusqu'à l'absurde.

Les phases de progression de l'histoire sont souvent plaisantes, mais sentent parfois les mécanismes là "juste pour casser le rythme". Elles souffrent aussi de certaines longueurs, dont une en particulier (je vous laisse deviner/découvrir laquelle) où l'on frise l'absurdité par rapport au déroulement de l'histoire.

Passent encore les quêtes annexes des différents hubs, pas forcément inspirées et assez peu nombreuses, car elles ont le mérite d'essayer de faire vivre l'univers (sans forcément y arriver, certes).

Par contre, les quelques zones de "transition" (entre deux phases de progression) vides d'interactions (et parfois carrément de combats !) et étendues jusqu'à l'infini donnent surtout l'occasion de revoir ses choix de vie (et de se demander ce qu'on est venu faire là), et c'est là le gros du problème.

La mise à disposition des Chocobos pour la grande partie couvrant secteurs 5, 6 et 7, sans compter la possibilité de revenir directement vers un donneur de quête une fois celle-ci complétée, font réellement aveu de "on a créé ces distances juste pour vous emmerder avec notre remplissage, déso pas déso".

Du coup, vous risquez de rencontrer des moments où la seule envie que vous aurez sera de lâcher la manette, vous demandant pourquoi, après une phase bien rythmée achevée par un combat épique, vous vous retrouvez à parcourir un couloir débile de 2km vide de sens.

C'est globalement ce qui vous saute à la figure après le 1er tiers du jeu.

Les cut-scenes pas toujours bien placées et parfois totalement dépourvues d'intérêt achèvent de casser la dynamique, forçant le joueur à serrer les dents pour continuer (combien de "mais ta gueule" balancés à votre écran ? perso, j'ai vite arrêté de compter).

A noter que l'original ne vous laisse pas tellement plus de liberté que le remake : c'est simplement que l'illusion fonctionne bien mieux, grâce à une avancée nettement plus fluide (autorisée par la concision de la séquence Midgar, bien sûr).

Mère est guez

Fatalement, ces soucis de rythme et de remplissage absurde ont une fâcheuse conséquence sur le scénario : à vouloir se prendre jusqu'au bout pour un jeu complet avec l'histoire qui va avec, on en perd l'origine (l'évolution d'un groupe écoterroriste, Avalanche, avec l'arrivée de l'ex-Soldat Cloud Strife), car un grand nombre de mystères qui n'étaient qu'entraperçus dans l'original vont vous être balancés à la figure sans ménagement, autant par fanservice crade que de besoin irrépressible de remplissage.

Exemple (parmi d'autres) en spoil :

Les hallus de Cloud : en dehors de la première dans le réacteur du début totalement dans le ton, le reste n'est qu'une immonde occasion de faire cachetonner Sephiroth et de faire lever des sourcils. Aucun impact réel sur le déroulement de l'histoire, en tout cas pas tant que l'on arrive au moment où la menace est réelle... à la fin de ce remake, donc. Pile quand l'original commence à réellement l'aborder.

En dehors de cela, ce n'est guère fameux.

On pourrait parler du développement de certains personnages secondaires, présents dans l'original, qui auraient mérité autre chose qu'une quête bâclée ou quelques lignes de dialogue, car l'intention est réellement louable.

Quant aux personnages spécifiques au remake, la décence m'interdit d'en donner un avis franc : tout juste dirais-je que l'on se demande ce qui a piqué l'équipe en charge du scénario.

Et les fileurs, bon, c'est un sacré bullshit pour alimenter les fantasmes des fanboys : rien que ne pas voir Wedge clamser après la chute du pilier, bon, écoutez, non, quoi.

C'est d'autant plus rageant que ce theorycrafting fumeux amène parfois des réponses à des questions qu'on se poserait en repensant au jeu original. Même si l'ensemble est quand même fortement balourd.

Exemple(s) : Jessie qui pense avoir fait une erreur de conception pour la bombe du premier réacteur, comment l'équipe se fait piéger dans le deuxième réacteur, ...

La toute fin est, à ce titre, totalement honteuse tant le niveau de fanservice (déroulement, musique, etc.) y est indécent et ne sert absolument à rien, si ce n'est une fois de plus à être un remplissage.

Honnêtement, j'ai trouvé la séquence de la fuite de Midgar plus sympa dans le remake que dans l'original. Et vu le temps qu'on y passe, elle se suffirait PRESQUE à elle-même en fin de compte.

Je mets l'épée où j'veux, Little John

Allez, arrêtons un peu de clouer le cercueil de ce remake : ce serait oublier que cette chose sait aussi distiller de très bons moments.

Ce constat est d'abord possible grâce au gameplay tentant une relecture moderne des systèmes de Matérias (des orbes donnant accès à divers pouvoirs et qui se fichent dans des emplacements présents sur les armes et armures des personnages) et de jauge ATB (indiquant quand le personnage est en mesure d'agir). Les combats sont en temps réel, mais l'ajout des jauges ATB pour permettre à l'utilisateur de sélectionner des techniques rend l'ensemble plus tactique, et permet l'exécution de combos réellement sympas. Ce n'est pas le système de l'original bien entendu, ce qui peut déstabiliser au début, mais on prend finalement assez vite le pli, ce qui rend les combats assez nerveux, à l'exception peut-être de ceux contre des ennemis volants. Le côté sac à PV de certains monstres et des boss peut irriter, mais donne aussi parfois des combats particulièrement épiques.

L'ajout de fonctionnalités d'amélioration d'arme est plutôt une bonne trouvaille, bien qu'assez lourd niveau ergonomie, à l'image de l'interface de menu dans son ensemble (il manque certains raccourcis pourtant évidents pour les habitués, comme la possibilité de transfert de Materia en cas de changement dans l'équipe). Cela pose question sur la progression au sein d'un jeu en trilogie, mais pour un jeu complet, c'est plutôt intéressant.

Fusil tout neuf et vieilles dentelles

Enfin, terminons-en vers ce qui est évident comme le nez au milieu de la figure : graphiquement, Square-Enix a voulu mettre le paquet. Cela se voit dès le début, entre les personnages très détaillés, les boss majestueux, les effets visuels bien sentis, bien que la lisibilité ne soit pas toujours parfaite.

Les hubs et autres chemins comportent de nombreux petits détails, des cartons que l'on éventre juste en courant dessus, de fils qui pendent, ce qui rend finalement étonnant l'absence de vie de certains endroits (sachant que Midgar est une mégalopole, rappelons-le). Après, quelques détails nous rappellent les cinq années de développement : ce fond représentant Midgar vu du ciel datant à vue de nez de 2005, quelques textures un peu crades, les PNJ anonymes peu inspirés et étrangement moins détaillés,...

Mais à mon sens, cela laisse une impression de travail plutôt bien fait, chose que l'on peut également dire, allez, soyons fous, de la partie sonore : l'idée de la rendre adaptative fait très bien le job, les nombreuses revisites de l'OST originale sont de belle facture.

Petits bémols néanmoins : les nouveaux morceaux sont de qualité et d'intérêt variables, et les hubs souffrent du syndrome du "PNJ à une ligne de dialogue", ce qui provoque de temps à autre des boucles sonores agaçantes.

A noter que le doublage français a le mérite d'exister : s'il doit composer avec quelques problèmes d'intonation, il remplit son office très correctement et contentera les allergiques au sous-titrage (dont je fais partie, en plus d'être un médiocre anglophone).


-------------

Nanti de tares de rythme criants et bouffi d'implants et de raccords parfois à la limite du honteux, Final Fantasy VII Remake paie un lourd tribut à des ambitions marketing et artistiques incongrues, en voulant à la fois être un jeu complet et l'introduction d'une trilogie.

Toutefois, certains moments épiques ou poétiques, la technique souvent chatoyante et le gameplay s'inspirant intelligemment du jeu original permettent miraculeusement d'éviter la sortie de route, bien que le voyage, chaotique dans son ensemble, perdra forcément des joueurs en chemin.

TheMattou
5
Écrit par

Créée

le 4 sept. 2024

Modifiée

le 10 sept. 2024

Critique lue 2 fois

TheMattou

Écrit par

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